La Finlande et la Suède ont annoncé dimanche leur intention de fournir des milliards d’euros d’aide aux entreprises énergétiques en difficulté dans leurs pays. Ces mesures font suite à l’annonce de la fermeture, pour une durée indéterminée, du gazoduc Nord Stream 1 par la société publique russe Gazprom.
La baisse des flux de gaz en provenance de Russie, avant et après l’invasion de l’Ukraine en février, a fait grimper les prix du gaz et les coûts de l’électricité en Europe. La hausse fulgurante des prix de l’électricité a entraîné de fortes pertes sur le marché à terme de l’électricité pour les entreprises du secteur de l’énergie, les obligeant à trouver des fonds pour déposer des garanties supplémentaires sur les bourses.
« Dernier recours »
La Finlande offre 10 milliards d’euros et la Suède prévoit de fournir 250 milliards de couronnes suédoises (23,2 milliards d’euros) en garanties de liquidités. C’est ce que rapporte l’agence de presse Reuters.
« Le programme du gouvernement est un dernier recours pour financer des entreprises qui seraient autrement menacées d’insolvabilité », a déclaré la Première ministre finlandaise Sanna Marin lors d’une conférence de presse dimanche. Marin a fait valoir que des mesures devraient être prises au niveau de l’Union européenne pour stabiliser le fonctionnement du marché des dérivés et du marché de l’énergie dans son ensemble.
À son tour, le ministre suédois des Finances, Mikael Damberg, a déclaré que les garanties en Suède dureraient jusqu’en mars de l’année prochaine. Sans l’intervention du gouvernement, les producteurs d’électricité auraient pu se retrouver aujourd’hui en « faillite technique ».
« Le moment Lehman Brothers »
Fin août, l’entreprise publique finlandaise Fortum avait indiqué que les garanties qu’elle doit déposer avaient augmenté de 1 à 5 milliards d’euros, en une semaine. Sans compter les garanties placées par sa filiale allemande Uniper. Filiale qui a d’ailleurs déjà reçu une enveloppe conséquente du gouvernement allemande, de hauteur de 15 milliards d’euros, fin juillet. En contrepartie, l’Etat allemand a reçu une part de 30% dans Uniper, le plus grand consommateur de gaz russe du pays.
« D’une certaine manière, cela a l’étoffe d’une sorte de moment Lehman Brothers dans le secteur de l’énergie », a suggéré le ministre finlandais de l’Economie, Mika Lintila.
Ces propos avaient aussi été entendus en Allemagne ; en juin, le vice-chancelier Robert Habeck a évoqué la menace d’un « effet Lehman Brothers dans le système énergétique » pesant sur tous les acteurs du secteur.
Lorsque Lehman Brothers, à l’époque la quatrième banque d’investissement américaine, a déposé le bilan en septembre 2008 avec une dette de plus de 600 milliards de dollars, elle avait déclenché les pires développements de la crise financière américaine.
Belgique
Dans notre pays aussi, les dirigeants politiques sont conscients que de nombreuses entreprises sont en grande difficulté. Le Premier ministre Alexander De Croo a déclaré dimanche dans l’émission « De Zevende Dag » de la VRT : « Nous n’allons pas laisser des entreprises faire faillite, nous n’allons pas permettre que des dizaines de milliers de personnes soient jetées à la rue. »
Le Premier ministre, comme le Premier ministre finlandais, a également insisté sur des mesures au niveau européen. Les ministres européens de l’Energie se réunissent cette semaine pour en discuter.
ArcelorMittal
Dans une interview accordée à De Tijd ce week-end, le PDG du géant de l’acier ArcelorMittal, Geert Van Poelvoorde, a plaidé en faveur d’un plafonnement européen des prix de l’électricité. « Le patient est aux urgences et si vous n’intervenez pas, l’hémorragie va s’aggraver », analyse-t-il.
« Dans le secteur de l’acier, il y a déjà des arrêts de production, à hauteur de 30 %, et cela va augmenter. (…) Cela signifie que vous devez donner des médicaments au patient », poursuit Van Poelvoorde. « Mais ce médicament n’arrive pas assez vite. Ce n’est pourtant pas difficile. Le prix de l’électricité en Espagne est inférieur à la moitié de celui de la Belgique et de l’Allemagne, car Madrid a plafonné les prix. »
(CP)