Après l’Inde, le second producteur mondial de riz veut limiter ses récoltes : vers une nouvelle crise alimentaire mondiale ?

La Thaïlande est en proie au manque de pluie et doit mettre en place des mesures exceptionnelles pour réduire sa consommation d’eau. Or, s’il y a bien une culture qui boit énormément, c’est celle du riz.

Dans l’actualité : les mesures protectionnistes se multiplient chez les principaux pays producteurs de riz. Fin juillet, c’était l’Inde, numéro un mondial de la riziculture, qui a annoncé un moratoire sur l’exportation de riz blanc non basmati. Voici que le numéro deux, la Thaïlande, doit réduire le volume de ses récoltes. Cause et méthode différentes, mais résultat similaire sur le marché alimentaire mondial.

  • Dans le cas de l’Inde, il s’agissait de protéger l’approvisionnement national d’une possible hausse des prix. Quitte à en provoquer ailleurs, car le pays produit 40% du riz mondial, et que le riz blanc non basmati représente un quart de ses exportations de cette céréale. Les exportations de riz étuvé et de riz basmati se poursuivront sans entrave, mais cela représente quand même un impact non négligeable sur l’approvisionnement mondial.
  • La Thaïlande, deuxième sur la liste, produit 15% du riz mondial, mais elle a annoncé qu’elle allait exhorter ses riziculteurs à planter moins, cette année. La cause : des pluies trop faibles, ce qui incite le pays à économiser son eau.

« Les précipitations cumulées sont d’environ 40% inférieures à la normale, ce qui présente un risque élevé de pénurie d’eau. La gestion de l’eau du pays doit donc se concentrer sur l’eau destinée à la consommation […] ainsi que sur l’eau destinée à la culture, principalement pour les cultures pérennes. »

Surasri Kidtimonton, Administration nationale de l’eau de Thaïlande, dans un communiqué

Les cultures pérennes désignent celles qui ne doivent pas être replantées chaque année, et qui nécessitent donc moins de travail et moins d’eau que les récoltes dites annuelles. Le riz, qui est une culture annuelle, nécessite en moyenne 2.500 litres d’eau par kilo récolté, relève CNBC, tandis que le millet ‘graminée), qui est pérenne, n’en nécessite qu’entre 600 et 1.200 litres au kilo de céréales.

  • Une différence de taille, qui a d’ailleurs motivé les Nations-Unies à inciter à cultiver plutôt ce genre de grains. La Food and Agriculture Organization (FAO) de l’ONU a d’ailleurs érigé 2023 en « année du millet« , mais aussi du sorgho, dans les pays d’Asie et d’Afrique où l’eau fait défaut.
  • Mais à plus court terme, la décision de la Thaïlande risque de perturber encore plus un marché du riz déjà sous pression : les prix au détail ont augmenté de 11,5% sur un an et de 3% depuis le début de l’année. Ce sont les prix les plus élevés atteints sur les 11 dernières années.
  • Or la consommation de riz mondiale est estimée à 495 millions de tonnes par an, soit 15,7 tonnes par seconde. C’est la céréale la plus consommée par 3,5 milliards d’êtres humains, et elle fait vivre 120 millions d’agriculteurs. Son approvisionnement est essentiel. Et paradoxalement, les prix élevés incitent à en cultiver toujours plus.

« Le prix mondial du riz aura le potentiel d’augmenter encore si la production de riz en Thaïlande diminue de manière significative d’une année sur l’autre. Les agriculteurs thaïlandais pourraient toujours choisir de planter du riz en raison de l’environnement actuel des prix mondiaux élevés du riz à l’exportation. »

Oscar Tjakra, analyste principal de Rabobank, interrogé par CNBC
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