Le plus grand projet de fusion nucléaire au monde est reporté : « Impossible d’obtenir le ‘premier plasma’ en 2025 »

Le plus grand projet de fusion nucléaire au monde est reporté : « Impossible d’obtenir le ‘premier plasma’ en 2025 »
Un employé d’ITER (Getty Images)

Pietro Barabaschi, directeur général d’ITER, le plus grand projet de fusion nucléaire sur Terre, a confirmé que le calendrier initial du projet ne serait pas respecté. Il a promis que l’organisation présenterait un calendrier « réaliste » l’année prochaine. Selon le plan initial, le réacteur devait générer du plasma pour la première fois en 2025.

Pourquoi est-ce important ?

Depuis des décennies, les ingénieurs et les scientifiques se cassent les dents sur la question de la fusion nucléaire. Dans ces réacteurs, ils veulent imiter ce qui se passe dans le cœur du soleil, en fusionnant des noyaux atomiques légers pour produire de l'énergie. La fusion nucléaire, si la technologie devient un jour viable, promet de fournir une quantité quasi-infinie d'énergie sans émissions. C'est pourquoi 35 pays se sont associés pour construire ITER. Le réacteur, actuellement en construction dans le sud de la France, devrait prouver que la fusion nucléaire est commercialement viable d'ici aux années 2030.

L’essentiel : Lors d’une conférence de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur la fusion nucléaire qui s’est tenue cette semaine, Barabaschi a révélé que l’équipe ITER travaillait sur un nouveau calendrier. C’est ce qu’a rapporté World Nuclear News. Le nouveau calendrier devrait être annoncé au milieu de l’année prochaine. Le calendrier actuel, établi en 2016, prévoyait le démarrage du réacteur en 2025. Dix ans plus tard, ITER devait être pleinement opérationnel, après quoi la fusion nucléaire commerciale aurait pu commencer dans les années 2040.

  • Bien que l’on ne sache pas grand-chose pour l’instant, on sait déjà qu’ITER a pris un retard considérable. Lors de la pandémie de Covid, des problèmes sont apparus dans la chaîne d’approvisionnement de composants clés. Puis, en 2022, on a constaté que certaines parties du réacteur étaient endommagées. ITER se compose de plus d’un million de pièces complexes, dont beaucoup doivent être fabriquées sur mesure.
  • Pour ces raisons, le conseil d’administration d’ITER avait déjà l’intention de présenter un nouveau calendrier cette année. Toutefois, cet été, on a appris que la présentation serait reportée à l’année prochaine. Ainsi, bien qu’il n’ait pas encore été officiellement confirmé que le calendrier initial ne serait pas respecté, il était virtuellement impossible qu’ITER produise du plasma dès 2025.
  • Barabaschi a déclaré lors de la conférence qu’il n’y a « évidemment aucune possibilité que nous obtenions le premier plasma en 2025 ». Le directeur général d’ITER a même révélé que cela n’aurait même pas été possible il y a trois ans, avant que les problèmes techniques ne soient découverts.
  • Selon Barabaschi, le nouveau calendrier « ne sera pas une bonne nouvelle » pour ceux qui espèrent que le projet sera bientôt opérationnel. Ce qui est positif, cependant, selon le chef d’ITER, c’est que la culture de l’organisation a changé, de sorte que l’équipe est maintenant beaucoup plus consciente des problèmes potentiels. « Nous réussirons. J’en suis persuadé », affirme-t-il.
  • La construction du réacteur aurait déjà beaucoup progressé. Les travaux seraient aujourd’hui achevés à 80 %. Selon Barabaschi, il reste cependant des défis techniques difficiles à relever.

Pourquoi ITER est-il si important ?

En résumé : ITER est l’un des plus grands projets internationaux au monde. Son principal objectif est de démontrer la viabilité et le potentiel de la fusion nucléaire en tant que source d’énergie propre et inépuisable.

  • Le projet est financé et mis en œuvre par 35 pays, dont les États-Unis, la Russie, la Chine, l’Union européenne et bien d’autres encore. Le réacteur sera conçu comme un tokamak, dans lequel un plasma extrêmement chaud est piégé et maintenu sous contrôle par des champs magnétiques.
  • ITER représente une étape importante pour faire de la fusion nucléaire commerciale une réalité, car il permettra de comprendre et de surmonter les défis techniques liés au développement des tokamaks. L’objectif ultime est de créer une source d’énergie propre et abondante.
  • La première étape consistera à obtenir le « premier plasma », une étape cruciale dans le processus de développement et de démarrage d’un réacteur de fusion nucléaire. Il s’agit du moment où le réacteur peut déclencher pour la première fois la réaction de fusion nucléaire avec le plasma d’hydrogène. La fusion nucléaire est le processus par lequel deux noyaux atomiques légers, généralement des isotopes de l’hydrogène, fusionnent pour former un noyau plus lourd, libérant ainsi d’énormes quantités d’énergie.
  • Après le « premier plasma », les scientifiques et les ingénieurs continueront à affiner le réacteur et à viser des températures, des pressions et des rendements de réaction plus élevés pour parvenir finalement à une fusion nucléaire auto-entretenue, générant plus d’énergie qu’il n’en est consommé. Selon le calendrier initial, ITER devait atteindre cette étape finale aux alentours de 2035. Des réacteurs de fusion nucléaire commerciaux pourraient alors être construits dans les années 2040.

(SR)

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