La présidente Tsai Ing-wen ne peut pas briguer un troisième mandat consécutif, alors que les Taïwanais voteront le 13 janvier prochain. Ceux-ci ont le choix entre trois candidats. Avec la menace d’invasion chinoise qui pèse d’autant plus fort.
La présidente de Taïwan défend son bilan à l’approche des élections : « Ce n’est pas le moment pour une invasion chinoise majeure »

Pourquoi est-ce important ?
La présidente taïwanaise Tsai Ing-wen, en poste depuis 2016, incarne une ligne assez dure envers la Chine continentale. Elle était même partisane de la déclaration d'indépendance unilatérale, avant de mettre de l'eau dans son vin. Elle doit maintenant défendre son bilan alors que l'île vote en janvier prochain, tandis que l'armée chinoise se fait pressante.Trop de défis internes pour une invasion chinoise
Dans l’actualité : Tsai Ing-wen estime qu’une invasion chinoise n’est pas pour demain, quand bien même Xi Jinping semble avoir une obsession de conquête de « l’autre Chine ». Selon elle, Pékin a bien trop de pain sur la planche pour l’instant.
« Mon idée est que ce n’est peut-être pas le moment pour eux d’envisager une invasion majeure de Taïwan. En grande partie à cause des défis économiques, financiers et politiques, mais aussi parce que la communauté internationale a clairement indiqué que la guerre n’est pas une option et que la paix et la stabilité servent l’intérêt de tous. »
Tsai Ing-wen
Une invasion qui éclipserait la Normandie
- La présidente sortante défend son bilan. Elle a incarné l’intransigeance face à Pékin durant deux mandats, après un long règne du parti nationaliste Kuomintang, plutôt en faveur du dialogue avec Pékin.
- Deux mandats durant lesquels l’APL, l’Armée populaire de Libération de la Chine communiste, a joué le jeu de la pression. Ce sont parfois des centaines de violations simultanées de son espace maritime aérien que devait gérer l’armée taïwanaise. Avec un réel risque de faux pas.
- La « réunification » des deux Chine – la républicaine et la communiste – est présentée par Xi Jinping comme une étape incontournable, ce qui laisse à penser qu’il voudrait en faire le clou de son passage à la tête de Pékin. Les services de renseignement américains estiment que Xi a exigé de l’APL d’être capable d’envahir d’ici 2027, rappelle The Guardian.
- Mais les prédictions de calendrier pour une telle invasion, à travers un détroit de 180 km de largeur, n’ont jamais été fort précises. Ça ne sera très probablement pas en 2023 ; les estimations courent jusqu’en 2048, pour le centenaire de la République populaire de Chine. Et vraisemblablement sans Xi.
- Il est clair que l’armée de Pékin se prépare et amasse des forces et des infrastructures dans le sud du pays, face au détroit. Mais une telle opération éclipserait, par sa taille et sa complexité, le débarquement de Normandie de 1944. Et face à un adversaire beaucoup plus conscient de la menace et très bien préparé. Une invasion chinoise qui ne s’improviserait pas.
- D’autant que Tsai Ing-wen a raison : Pékin a d’autres problèmes à gérer. Comme une économie qui stagne alors qu’elle devait démarrer en trombe cette année, un secteur immobilier qui n’en finit pas de s’effondrer, et une pression internationale réelle pour décourager toute action belliqueuse. D’autant que tant que Biden est à la Maison-Blanche, le soutien américain à Taïwan semble assuré.
Élections, à Washington et à Taipei
Cela dit, la présidente sortante estime que les élections dans son pays laissent présager de nouvelles manœuvres agressives des Chinois. Comme à chaque fois. « Cela inclut l’utilisation de stress militaire et de coercition économique, d’importantes campagnes de guerre cognitive, tant sur les plateformes traditionnelles que sur les réseaux sociaux, ce qui n’est pas inconnu au peuple taïwanais », résume-t-elle.
- Car Pékin aimerait certainement voir quelqu’un de plus collaboratif en poste à Taipei. En janvier prochain, les Taïwanais auront le choix entre trois candidats.
- Lai Ching-te (ou William Lai), pour le DPP. Du même parti, il se pose en continuateur de la politique de la présidente actuelle, dont il est le vice-président.
- Hou Yu-ih pour le Kuomintang. L’ancien parti unique nationaliste est indissociable de l’histoire chinoise du XXe siècle et du repli du régime sur l’île de Taïwan face aux communistes. Après sa défaite de 2016 face à un DPP bien plus indépendantiste, le parti espère un retour.
- Ko Wen-je pour le TPP (Taiwan People’s Party). Il se positionne comme l’alternative, plus marquée à gauche, face aux deux grandes formations politiques.