Les talons hauts sont peut-être sexy et provocants, mais ils n’en sont pas moins inconfortables, au point que l’on dirait qu’ils n’ont pas été conçus pour la marche. Et c’est presque vrai, affirme la BBC, qui rappelle qu’ils proviennent de Perse, où les guerriers à cheval les portaient pour pouvoir se dresser sur leurs étriers lorsqu’ils tiraient à l’arc.
En 1599, le Shah de Perse Abbas avait envoyé la première mission diplomatique en Europe, et ses émissaires de sont rendus dans les cours de la Russie, d’Allemagne et d’Espagne. C’est ainsi que les chaussures à talons hauts des Perses, qui sont apparues comme des attributs virils et masculins, sont devenues à la mode dans les aristocraties européennes. Elles n’étaient guère pratiques dans les rues boueuses de l’Europe du 17ème siècle, mais leur manque de confort en faisait un attribut parfait pour les élites :« Le manque de commodité est l’un des meilleurs signes de statut », explique Elizabeth Semmelhack du Musée Bata de la Chaussure de Toronto. « Ils ne travaillaient pas dans les champs et ils n’avaient pas besoin de beaucoup marcher ».
Le roi de France Louis XIV, qui était plutôt de petite taille (1,63 m), portait ainsi des chaussures avec des talons de 10 cm de haut, toujours de couleur rouge, parce que la teinture rouge était chère, mais aussi parce qu’elle lui donnait un air martial. Rapidement, la mode s’était répandue ailleurs en Europe, et le jour de son sacrement en 1661, le roi Charles II d’Angleterre, qui mesurait pourtant 1,85 m, a été peint portant des talons hauts rouges à la française. Cependant, en 1670, Louis XIV avait publié un édit qui réservait l’usage des semelles et talons rouges aux seuls membres de sa cour.
A cette époque, les femmes avaient l’habitude d’adopter des éléments du costume masculin et elles s’approprièrent les talons hauts, tout comme elles s’étaient appropriées les épaulettes, les cheveux courts, les chapeaux d’hommes et les pipes. Cependant, à la fin du 17ème siècle, il y eut un changement : alors qu’auparavant, les élites suivaient une mode unisexe en matière de chaussures, les hommes commencèrent à porter des talons plus bas, plus robustes et plus pleins, le talon des femmes a commencé à s’affiner, et à se courber. L’extrémité de leurs chaussures était de plus en plus effilée pour donner l’apparence de petits pieds. Peu à peu, la mode des hommes a évolué vers des vêtements plus confortables et plus pratiques, et le vêtement a commencé à perdre sa fonction d’indicateur d’une classe sociale, tandis que les différences entre les vêtements féminins et les vêtements féminins se sont accentuées.
En 1740, les hommes avaient complètement cessé de porter les talons hauts, devenus un attribut efféminé et ridicule, l’apanage des femmes que l’on considérait comme émotives, sentimentales, et impossibles à éduquer. A la Révolution Française, les femmes cessèrent également de les porter, et ce n’est qu’à la moitié du 19ème siècle que les talons hauts firent leur retour, à la faveur des progrès en photographie qui ont changé la perception des femmes et de la mode. Les artistes pornographes publiaient des cartes postales polissonnes sur lesquelles ont voyait des femmes dénudées seulement vêtues de talons hauts. Ce sont ces images qui pourraient avoir donné le caractère érotique des talons hauts.
Dans les années 1960, les talons hauts pour hommes ont fait leur retour sur les bottes de cowboy, et sur les chaussures plateformes des années 1970.
Selon Semmelhack, les hommes n’en ont peut-être pas tout à fait fini avec les talons hauts pour eux-mêmes, et si les talons hauts devaient devenir un indicateur de pouvoir, les hommes seraient prêts à les adopter à nouveau.