Confrontés à une pénurie de microprocesseurs qui n’en finit pas, les États-Unis tentent de relancer leur propre filière. Une relocalisation massive qui, selon Pat Gelsinger, le PDG d’Intel, ne peut réussir qu’avec une très forte implication de l’État.
Alors que la crise du coronavirus a fait prendre conscience à l’Union européenne de la vulnérabilité de son approvisionnement en médicaments de base, aux États-Unis, c’est la grande pénurie de microprocesseurs qui met en évidence les dangers de la délocalisation. Alors que le pays produisait encore un tiers des puces mondiales il y a quelques années, cette part n’est plus que de 12% depuis que les producteurs asiatiques, taïwanais et coréens en particulier, ont développé ce secteur de leur économie. De facto, le marché américain de l’informatique, mais aussi celui de l’automobile, est devenu ultra-dépendant de fabricants tels que Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC) ou Samsung.
Une situation qui doit changer au plus vite selon Pat Gelsinger, le PDG d’Intel: « Si le monde devient dépendant d’un seul endroit, ce n’est pas politiquement stable, et ce n’est pas non plus pratique. Dieu a décidé où se trouvent les réserves de pétrole. Nous pouvons décider où se trouvent les fabriques. »
Le PDG visent en particulier Taïwan et la Corée du Sud, deux pays « géopolitiquement instables ».
52 milliards pour des puces
Une conclusion qu’il n’est pas le seul à avoir atteinte : au Sénat américain, républicains et démocrates ont pu mettre leurs différends de côté pour voter un plan d’urgence, le CHIPS Act, de 52 milliards de dollars destinés à dynamiser l’industrie des semi-conducteurs, mais celui-ci doit encore être approuvé par la Chambre des représentants.
L’État à la rescousse des entrepreneurs
Des subsides plus que nécessaires selon Gelsinger, alors que sa firme a elle-même investi des sommes astronomiques pour relocaliser une production suffisante: « Nous investissons 20 milliards de dollars en capital cette année. Nous allons donc dépenser nos flux de trésorerie pour construire des laboratoires et des usines, mais nous cherchons aussi des subventions et le soutien des gouvernements. Je pense qu’il faudra un CHIPS Act 2, peut-être un CHIPS Act 3 pour réaliser pleinement cet objectif. »
Le PDG a aussi précisé que produire est une chose, mais pour concurrencer les fabricants asiatiques, il faudra que les Américains soient concurrentiels. Ce qui signifie maintenir des prix bas, idéalement plus bas que ceux pratiqués en Orient, alors que les investissements atteindront des sommets. En d’autres termes, l’État devra soutenir l’industrie à bout de bras pendant une période qui risque de se prolonger.