Un pays du « Club Med » et un pays « frugal » qui font une proposition commune pour modifier les règles budgétaires de l’Union européenne, c’est l’alliance improbable du jour.
Dans l’actu : L’Espagne et les Pays-Bas présentent ensemble un « non-paper », en amont de la réunion des ministres des Finances de l’Eurogroupe, apprend Politico.
En résumé : les règles budgétaires actuelles sont obsolètes et elles devraient être modifiées/remplacées par des objectifs plus réalistes et adaptés à chaque État.
Concrètement : C’est assez peu concret. Le document préconise la « transformation des objectifs à moyen terme en une règle de dépenses simple » : pouvoir emprunter en temps de crise et réduire les dettes en période de croissance.
L’essentiel : le document évite soigneusement de parler des objectifs de limitation de la dette publique à 60% du PIB et d’un déficit maximum de 3%. Avec un nombre toujours plus grand d’États membres dont la dette dépasse les 100%, le premier objectif ne semble plus vraiment réaliste. Pour l’heure, les règles de l’UE imposent une vitesse de réduction de la dette de 5% par an. Mais avec les crises successives, cette règle risque de plonger de nombreux Etats dans la récession.
Remarquable : il est étonnant que deux pays qui se sont toujours opposés sur les règles budgétaires au sein de l’UE agissent ensemble. Le signal est clairement adressé à Paris, Berlin et Rome, qui restent les trois poids lourds décisionnels au sein de l’UE. Madrid et La Haye, respectivement 4 et 5e puissance de l’UE, veulent montrer qu’elles peuvent être à l’initiative dans un débat qui dure depuis des années.
Le détail : le mot investissement est répété 11 fois à travers le texte. L’argent bien dépensé et nécessaire à la transition énergétique et numérique devrait se faire en dehors du cadre budgétaire, plaident les deux pays. C’est aussi le point de vue de la gauche de la Vivaldi ici en Belgique.
Le contexte : Depuis mars 2020, les Européens ne sont plus soumis à aucune règle budgétaire, les crises sanitaire et énergétique étant passées par là. Mais un nouveau cadre sera défini et appliqué sans doute à partir de 2024. La Commission européenne a fait une proposition en ce sens, qui n’est pas très éloignée du texte de l’Espagne et des Pays-Bas. Pour l’heure, l’Allemagne juge que la nouvelle proposition n’est pas assez stricte et appelle à des sanctions qui dans les faits ne sont jamais prises. On n’y est certainement pas encore : le texte devra ensuite prendre le chemin du Parlement et in fine des Etats membres.