Facebook a annoncé mardi le lancement d’un nouveau mode de paiement numérique appelé Libra. Il s’agit d’une crypto-monnaie que les entreprises et les utilisateurs finaux pourront utiliser pour payer toutes sortes de choses à partir de 2020.
Dans De Afspraak, le directeur d’Econopolis, Geert Noels, a expliqué ce lancement :
Le Libra est un panier de monnaies numérique
« C’est en fait un panier de monnaies. Une monnaie fabriquée avec un panier d’autres monnaies (euros, dollars, yens, livres). À cet égard, il ne s’agit pas d’une nouvelle pièce exotique comme le Bitcoin, dont on ne connait pas la valeur. La valeur du Libra sera déterminée par un panier d’autres monnaies stables. »
Le Libra serait une monnaie numérique. Noels: « Ils associent de vieilles idées concernant ce que devrait être une monnaie stable à de nouvelles idées sur la meilleure façon de négocier ces monnaies et de maintenir la confiance en cette monnaie. »
Cette monnaie devrait permettre aux utilisateurs de Facebook de faire des achats en ligne et de transférer de l’argent en toute simplicité, sans faire appel à leur banque. Mais allons-nous tous payer plus tard via Facebook et Whatsapp ?
Un potentiel énorme
Noels: “Le mode de paiement sera différent. Nous pensons toujours en termes classiques de cartes bancaires. De vieilles sociétés telles que Visa et Mastercard font partie du consortium, alors que les banques traditionnelles ne s’y sont pas jointes. Très remarquable. Uber, Lyft et Booking.com, par exemple, s’y sont déjà associés. Cela signifie qu’ils peuvent potentiellement intégrer leurs plates-formes ou leurs transactions, ce qui implique qu’un grand nombre de personnes pourra utiliser cette monnaie. Et c’est assez nouveau, même le bitcoin était une monnaie relativement marginale qui n’était utilisée que dans certaines niches. »
Le lobby des banques en action
Noels poursuit en déclarant que le Libra se heurtera sans aucun doute à l’opposition du monde bancaire. « Facebook sous-estime peut-être le lobby à venir du secteur financier. Il va maintenant faire pression sur Facebook pour que la société soit scindée, ou mettre en avant toutes sortes de pratiques peu recommandables en matière de protection de la vie privée. Google, par exemple, a une licence bancaire mondiale, mais la seule raison pour laquelle ils ne déploient pas vraiment de services bancaires est la peur du lobby. »
5 problèmes majeurs avec l’introduction du Libra :
Une figure qui n’appartient pas au lobby des banques, mais au secteur numérique, est le Français Gilles Babinet. Il est vice-président du Conseil du numérique français. Babinet met en garde dans le journal Libération contre l’introduction du Libra.
« On ne peut pas simplement lancer un système de paiement qui, à long terme, pourra être utilisé par 2,5 milliards de personnes, sans en discuter en profondeur avec toutes les parties concernées, à commencer par les différents États-nations ».
- Le nombre d’utilisateurs impliqués . Nous ne parlons pas du lancement d’une sorte de carte de crédit. Nous parlons d’une monnaie pouvant être échangée immédiatement par 2,5 milliards d’utilisateurs existants. C’est potentiellement huit fois plus que les gens qui paient chaque jour en euros ou en dollars.
- L’association entre un réseau social et un système de paiement. À long terme, ces réseaux peuvent permettre la mise en place de « crédits sociaux ». Comme en Chine, où les mauvais comportements sont punis.
- Le risque de crédit. Facebook peut-il commencer à accorder des prêts et des crédits demain ? Le crédit est le lubrifiant de notre système économique et monétaire mondial. Qu’en est-il des réglementations nationales ?
- L’initiative comporte sans aucun doute une dimension politique. Peter Thiel, membre du conseil d’administration de Facebook, n’a pas caché, lors du lancement de son système de paiement PayPal, qu’il voulait mettre les États-nations hors-jeu.
- Facebook s’est avéré peu fiable à plusieurs reprises.Un article d’opinion de deux consultants de Capco paru mardi dans De Tijd affirme que « Facebook a également souligné que les données et informations financières des utilisateurs resteront totalement privées et ne seront partagées ou utilisées à des fins commerciales nulle part ». Comme si une telle promesse avait un sens pour M. Zuckerberg.
https://twitter.com/pattymo/status/1141026521106264065
La politique en action
La plus grande barrière est probablement politique. Facebook a consulté de nombreux organismes de réglementation avant de lancer le projet. Ils leur ont donné un « accord prudent ». Cependant, quiconque gère un portefeuille numérique doit s’adapter aux réglementations nationales. Comme les règles contre le blanchiment d’argent ou l’argent du crime. Ou contre le financement du terrorisme.
Calibra, qui deviendra le porte-monnaie numérique dominant dès le jour 1 grâce à son intégration dans Whatsapp et Messenger, devrait immédiatement faire sortir les chiens de garde de la concurrence de leur cage. Ces préoccupations pourront disparaître lorsque la monnaie se développera et se décentralisera. Il n’en reste pas moins que la monnaie numérique de Facebook soulève des questions sur la stabilité financière. Le succès du Libra n’est donc pas garanti. Mais ce qui est remarquable, c’est que le Libra pourrait être la base de la réglementation « long overdue » (‘attendue depuis longtemps’) de Facebook lui-même.