Les lobbyistes de Facebook & Co se préparent à la bataille avec l’Europe

Facebook, Amazon, Microsoft et Google renforcent simultanément leurs équipes européennes de lobbying à Bruxelles. ‘Les géants de la technologie ont peur des nouvelles réglementations européennes’, estiment les experts.

C’est une époque dorée pour ceux qui aspirent à une carrière de lobbyiste technologique en Europe. Les géants américains du numérique ont pas mal d’offres d’emploi à proposer.

Facebook et Amazon sont actuellement à la recherche d’un ‘responsable de la communication politique’ qui se concentrera sur les institutions européennes, constate-t-on à la lecture d’offres d’emploi. Le nouveau recrutement aidera à créer ‘des campagnes de communication de grande envergure qui éduqueront les décideurs politiques, les consommateurs, la presse et les groupes intéressés par notre fonctionnement », écrit ainsi Facebook.

Le thème ‘Concurrence et choix’ sera une priorité, peut-on encore lire plus loin. Cela suggère que Facebook se prépare à de nouvelles confrontations avec la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager. Cette dernière a récemment annoncé qu’elle souhaitait adapter les règles de concurrence européennes à la nouvelle réalité numérique.

Libra

La société de Mark Zuckerberg est également à la recherche d’un ‘responsable des politiques publiques’, doté de bonnes connaissances en blockchain, crypto-monnaies et paiements, ainsi que sur les réglementations européennes dans ces domaines. Cela semble indiquer que le géant américain prépare une offensive de relations publiques à propose de son projet de monnaie numérique controversée Libra. Le représentant travaillera depuis Bruxelles ou Londres.

L’équipe européenne de lobbying de Facebook recherche également un expert en politiques médiatiques pour sa division ‘Content Distribution & Algorithm Policy’.

Cloud

Il existe également un parallèle entre Amazon et Microsoft. Les deux géants de la tech recrutent actuellement un lobbyiste basé à Bruxelles pour leurs services de cloud, Amazon Web Services (AWS) et Azure, respectivement.

AWS a récemment eu affaire au garant américain de la concurrence. ‘Maximiser les avantages du cloud computing pour les clients en éliminant les blocages réglementaires et politiques’, telle est la mission de l’équipe ‘politique publique’ d’AWS.

Le ‘directeur des affaires gouvernementales Azure’ devra lui défendre la position de Microsoft auprès des institutions européennes et des différents États membres, ‘en particulier la France et l’Allemagne’.

Google

Google a également publié des offres d’emploi pour Bruxelles. La société recherche un expert en confidentialité pour son équipe GAPP (Affaires gouvernementales et politiques publiques), mais également un lobbyiste pour se concentrer sur la Commission européenne.

Ce dernier sera responsable de plusieurs campagnes de promotion des intérêts de Google, ‘dans le domaine des propositions réglementaires spécifiques, ainsi que dans la gestion des données, de la politique de protection des consommateurs, de la politique des plateformes et des enjeux économiques’.

À noter, dans ce contexte: Google est la société-mère de la plateforme de vidéos YouTube. Un autre géant de la vidéo, le service de streaming Netflix, possède également un service de lobbying en pleine croissance à Bruxelles.

Par ailleurs, l’équipe de lobbying de Google qui se concentre sur la Commission n’est qu’une partie de sa plus large division ‘institutions européennes’.

Protection des données et confidentialité

Iskander De Bruycker (Université de Maastricht), spécialiste du lobbying et de la politique européenne, a une explication à cette intense activité de recrutement. ‘Les géants de la technologie se sentent menacés par l’avalanche de réglementations européennes qui arrivent. Nous avons déjà vu le phénomène dans d’autres secteurs. Les entreprises et les secteurs sous pression renforcent leur présence à Bruxelles.’

Des thèmes comme la protection des données et la confidentialité sont sensibles aux yeux du grand public. ‘Les gens se sentent concernés et incitent les politiciens à la vigilance’, explique De Bruycker. ‘Mais cela peut également fonctionner dans l’autre sens. Pour attirer l’attention sur un dossier particulier, les politiciens européens peuvent en faire un thème de l’opinion publique’.

Selon le professeur en politique européenne, il est intéressant de remarquer que les géants américains de la technologie ne confient pas leur lobbying, même partiellement, à un acteur externe ou une organisation sectorielle. ‘Les géants du numérique veulent toujours un peu plus s’en charger eux-mêmes.’

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