L’épée de Damoclès de la Mer du Nord : des milliers de tonnes d’armes et de produits toxiques pourrissent au large de Knokke Heist

Après la guerre, les Alliés se sont débarrassés d’au moins 40.000 tonnes d’armes chimiques, dont probablement 13.000 tonnes de produits toxiques dans la Mer Baltique. C’est six fois plus qu’il n’en faut pour y anéantir toute forme de vie marine pendant un siècle. Les produits incriminés englobent le gaz moutarde, la chloropicrine, le phosgène, le disphosgène et des dérivés de l’arsenic contenus dans des douilles et des barils qui vont se corroder, et tôt ou tard, libérer leur contenu mortifère. Alexandre Korotenko, un chercheur russe, avait prophétisé que ce scénario catastrophe se réaliserait entre 2020 et 2060. Jacek Beldowski, un chercheur de l’institut océanographique de Sopot en Pologne, rappelle que les barils ne se mettront probablement pas tous à fuir au même moment, et que leur contenu sera largement dilué, ce qui atténuera leur toxicité. Mais il confirme que cette pollution aura bien lieu.

Les chercheurs de la mer Baltique s’activent déjà pour surveiller la faune et ils doivent rédiger un manuel pour décrire les conduites à tenir pour les pêcheurs qui pourraient retrouver ces déchets ou des munitions dans leurs filets. En 1997, une masse de gaz moutarde piégée dans les filets de pêcheurs en Pologne avait provoqué 24 accidents graves.

Comme toute manipulation risque d’endommager les futs et les douilles déjà dégradés par l’immersion et de provoquer les fuites tant redoutées, on a renoncé à procéder au ramassage de ces déchets. Les constructions sous-marines, comme la construction de gazoducs, par exemple, posent aussi le risque de remuer les fonds et de déclencher une catastrophe.

Hélas ! La Belgique est loin d’être épargnée. Au large des côtes belges, à proximité de la frontière avec la Hollande se trouve une de ces décharges sous-marines de la Mer du Nord. A la fin de l’année 1919, le gouvernement belge avait décidé de se débarrasser de quantités de munitions qui avaient été retrouvées après le ratissage des champs de bataille, qui ont été larguées au large de Knokke Heist. 35.000 tonnes de ces munitions, dont un tiers sont des grenades de gaz toxiques, reposent sur le banc de sable du Paardenmarkt, tout proche de la côte, et font l’objet de contrôles réguliers. Seule lueur d’espoir, elles sont désormais enfouies sous une épaisse couche de vase. En 1972, certaines de ces munitions qui étaient réapparues avaient montré que ces sédiments, en prévenant leur mise en contact avec l’oxygène, avait empêché leur corrosion. Elles étaient relativement bien préservées. C’était il y a 40 ans…

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