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Le Vlaams Belang exulte après la victoire éclatante de Geert Wilders aux Pays-Bas, mais quelles sont les implications de ces résultats sur le cordon sanitaire en Flandre ?

Le Vlaams Belang exulte après la victoire éclatante de Geert Wilders aux Pays-Bas, mais quelles sont les implications de ces résultats sur le cordon sanitaire en Flandre ?
Geert Wilders (PVV) a Tom Van Grieken (Vlaams Belang) – Horacio Villalobos#Corbis/Corbis via Getty Images

Rue de la Loi, tout le monde observe les résultats de près, entre stupéfaction et dégoût. L’issue du scrutin qui a donné le parti d’extrême droite grand vainqueur n’est pourtant pas une surprise. Au-delà des récents sondages aux Pays-Bas, l’essor de la droite radicale émerge un peu partout en Europe. Au nord du pays, ces élections pourraient rejaillir dans le débat politique flamand.

Dans l’actu : le PVV de Geert Wilders remporte les élections aux Pays-Bas, avec 37 sièges, loin devant ses adversaires.

Le détail : ces résultats mettent la pression sur le cordon sanitaire. Mais aussi sur le VB.

  • Hier soir, l’atmosphère était à la fête au Vlaams Belang. Tom Van Grieken a rapidement félicité Geert Wilders pour sa victoire aux Pays-Bas, revendiquant également une part de ce succès. « Nous collaborons efficacement depuis de nombreuses années et continuerons sur cette voie », a-t-il annoncé dans un communiqué de presse.
  • « Nous observons un mouvement de droite similaire partout en Europe. La tendance observée depuis quelque temps se confirme également aux Pays-Bas. Nous partageons un patriotisme commun et aspirons à remettre nos citoyens au premier plan. Rien ne peut contrer cette force motrice. » Van Grieken a réitéré ses propos ce matin sur la VRT, son enthousiasme étant tellement manifeste que le Vlaams Belang semble déjà célébrer une victoire anticipée pour les élections de juin 2024 en Flandre.
  • Wilders, qui a obtenu 37 sièges, parait désormais destiné à participer à la formation d’un gouvernement. C’est là que les choses deviennent intéressantes pour le Vlaams Belang : une coalition incluant le PVV, un soutien à un gouvernement minoritaire, ou même, plus surprenant, un « Premier ministre Wilders » (ce qui pourrait être envisageable au vu des résultats) sont autant de scénarios qui accentueront la pression sur le cordon sanitaire en Flandre.
  • Mais cela accroît également la pression sur le Vlaams Belang : Wilders a notablement modifié son approche et son discours durant la campagne. Van Grieken devra donc choisir entre adopter une stratégie similaire ou maintenir une ligne plus dure.
  • Pour les autres partis du nord du pays, notamment la N-VA, le cd&v et l’Open Vld, la question récurrente est de savoir s’ils envisagent de rompre le cordon sanitaire. Il est difficile d’ignorer que Sammy Mahdi (cd&v) s’est presque aligné sur Pieter Omtzigt et son NSC. Mais ce parti néerlandais a déjà franchi un cap en déclarant qu’il pourrait envisager une collaboration avec le PVV, sous certaines conditions. Pour le VVD, parti libéral de droite des Pays-Bas, qui entretient des liens avec l’Open Vld et la N-VA, la situation est similaire, mais c’est moins assumé.
  • Quoi qu’il en soit, les tout premiers signes indiquent une possible coalition sans Wilders comme Premier ministre, mais avec son parti. Dans ce scénario, Dilan Yeşilgöz pourrait avoir une chance de devenir Première ministre, puisque son VVD est le troisième plus grand parti après le PVV de Wilders et GroenLinks/PvdA de Timmermans.
  • Une autre perspective suggère que le VVD et le NSC d’Omtzigt ont contribué à renforcer le PVV en ne rejetant pas d’emblée l’idée d’une coalition avec Wilders pendant la campagne, voire en laissant la porte ouverte. Ainsi, ils ont légitimé une version plus modérée du PVV, rendant le choix de ce parti comme un vote « utile ».
  • Pour la N-VA, la question demeure : son président, Bart De Wever, a clairement exprimé l’année dernière qu’une coalition avec le Vlaams Belang n’était ni réaliste ni souhaitable, « car le parti n’est pas en mesure de changer ». De plus, le Vlaams Belang s’isole lui-même au niveau fédéral en refusant de participer au gouvernement « par principe », facilitant ainsi la tâche aux partis francophones, mais s’isolant davantage en Flandre.
  • Ce week-end, Jan Jambon a ouvert la porte au VB, indiquant avoir observé « que le Vlaams Belang est en train d’opérer certains changements« , mais a immédiatement adressé un « no pasaran » en l’état actuel des choses. La N-VA ménage comme à son habitude la chèvre et le chou, pour tenter de satisfaire l’ensemble de son spectre électoral.
  • Chez les chrétiens-démocrates et les libéraux flamands, la résistance à l’idée d’une collaboration avec le Vlaams Belang est à la fois principielle et idéologique. Il semble impensable que l’Open Vld et le cd&v ouvrent cette porte, même si certains ténors le souhaitent. « Beaucoup dépendra de l’évolution de la situation aux Pays-Bas dans les mois à venir pour pouvoir se faire une idée claire », nous glisse un président de parti du nord du pays.

Les réactions : elles pleuvent sur les réseaux sociaux.

  • Chez Groen, Nadia Naji a préféré citer les mots de Timmermans : « Aux Pays-Bas, tout le monde est égal. Peu importe l’endroit où vous avez grandi. Vous avez votre place. » Mais la co-présidente des Verts avait aussi un mot pour ses collègues : « Le résultat aux Pays-Bas montre clairement que CHAQUE parti en Flandre doit laisser la porte fermée à l’extrême droite. »
  • Le député Kristof Calvo (Groen) a, lui aussi, voulu transposer les résultats à la situation belge : « Bon, la Flandre. J’espère que cela suffira comme signal d’alarme. »
    • Ce à quoi Georges-Louis Bouchez, le président du MR, a vivement réagi : « Les idées folles de la gauche créent de tels phénomènes. Tout taxer, tout interdire. La gauche est devenue l’idiot utile des extrémistes. La seule solution est une politique libérale qui récompense le travail, assure la sécurité et ne raconte pas n’importe quoi aux gens. »
    • Calvo lui a répondu : « Si vous attaquez la gauche ce soir avec un tel résultat, vous vous trompez vraiment d’adversaire. Je considère au moins les libéraux comme des alliés potentiels dans cette affaire. Et j’espère que vous et d’autres apprendrez des erreurs de Yeşilgöz (la successeure de Rutte à la tête du VVD, ndlr.) »
    • François De Smet, président de DéFI s’est alors glissé dans la conversation : « La droite gouverne les Pays-Bas depuis 2010… L’enseignement du scrutin me paraît plutôt alerter sur ce qui se produit lorsque les libéraux abandonnent le progressisme pour le populisme, par ex sur la question migratoire. Il reste heureusement des libéraux de progrès. »
    • Cela illustre les divergences de point de vue sur les raisons qui peuvent expliquer cette vague brune, chez nos voisins. Gauche et droite s’accusent assez classiquement. Sans penser que tout le monde pourrait être responsable de l’explosion des extrêmes.
    • Mais personne ou presque ne parle d’un évènement majeur qui s’est déroulé début octobre, et qui a marqué le point de départ d’une forte progression du PVV de Wilders dans les sondages. Cet évènement, c’est bien sûr le 7 octobre et les attentats en Israël. Le point de départ de manifestations pro-palestiniennes qui ont déferlé sur l’Europe et les Pays-Bas les semaines suivantes, avec parfois certaines dérives, comme des drapeaux israéliens brûlés, la présence de croix gammées ou de drapeaux islamiques génériques, qui sont souvent repris par les mouvements jihadistes.
  • À gauche, du côté francophone, Elio Di Rupo a félicité Timmermans « pour son travail et ses résultats ». Il a aussi rappelé « les dangers et les travers que représentent les extrêmes. Le populisme n’est pas une solution. À nous d’en tirer les conclusions et de continuer le combat. »
  • La co-présidente d’Ecolo, Rajae Maouane, a constaté la « gueule de bois ce matin aux Pays-Bas », mais se réjouit « d’une éclaircie verte dans la grisaille ». Il reste à voir si le cartel formé par GroenLinks et le Pvda pourra jouer un rôle dans la formation d’une coalition.
  • Paul Magnette (PS) et Bart De Wever (N-VA) n’ont, eux, toujours pas réagi aux résultats à l’heure d’écrire ces lignes. Le chef du groupe parlementaire des nationalistes, Peter De Roover (N-VA), a toutefois laissé son commentaire : « À quel point la Belgique est-elle un pays fou ? Eh bien, avec un résultat similaire en 2024 en Flandre à celui des Pays-Bas, la Vivaldi II serait un fait. »
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