Le tapis rouge et les honneurs pour Macron, l’invisibilité pour von der Leyen : l’Europe a manqué son coup en Chine

En prenant Ursula von der Leyen dans ses valises, le président Macron voulait montrer à la Chine une Europe solidaire et unie. C’est tout l’inverse qui est en train de se passer à Pékin.

Pourquoi est-ce important ?

La carotte ou le bâton. Cela fait longtemps que l'Europe ne sait trop quoi choisir pour s'affirmer devant la Chine. La visite d'État du président français et la venue de la présidente de la Commission symbolisent cette incertitude comme rarement.

Dans l’actu : l’invisibilité de von der Leyen en Chine.

  • Le tapis rouge, le défilé militaire et les banquets pour Emmanuel Macron, en visite d’État en Chine. Le contraste ne peut être plus saisissant avec la présidente de la Commission européenne, accueillie à l’aéroport par le ministre chinois de l’Écologie, et puis laissée seule.
  • Alors que Macron rejoignait un somptueux banquet en compagnie de Xi Jinping, la présidente de la Commission donnait une sobre conférence de presse au siège de la délégation de l’UE.
  • Von der Leyen et ses équipes avaient marqué leur intention de ne pas participer à la visite d’État, mais dans les faits, cela a renvoyé l’image d’une Europe désunie.
  • Macron est la carotte, qui se veut volontariste dans son approche avec la Chine. Von der Leyen est le bâton qui a déjà prévenu que si Pékin livrait des armes à la Russie, cela nuirait à la relation UE-Chine.
    • L’Europe vogue aussi entre deux messages économiques : celui de limiter la dépendance du Vieux continent à une puissance étrangère (von der Leyen) et celui de continuer à faire du business avec la 2e économie du monde (Macron et la kyrielle de business men français qui l’accompagnent).
  • Bref, la Chine a divisé pour mieux régner : l’Allemande a été totalement absente des médias d’État chinois, tandis que les réseaux sociaux la diabolisaient, la qualifiant de marionnette américaine, fait remarquer Politico.
    • Un média chinois affilié au ministère de la Défense illustre cette représentation finalement assez maladroite de l’UE : « Le voyage de Macron en Chine s’accompagne de l’espoir que la Chine donnera un coup de pouce à la France… mais en emmenant von der Leyen avec lui, il semble que Macron manque un peu de sincérité. »
    • Et d’ajouter : « Von der Leyen, une personnalité pro-américaine bien connue, qui vend l’Europe au profit des États-Unis et qui ne ménage pas ses efforts pour pousser l’Europe à affronter la Russie. Elle n’est parvenue en Chine qu’en s’accrochant à Macron ».

Un bilan assez maigre

L’essentiel : qu’a obtenu Macron ?

  • Face au discours musclé de von der Leyen, Xi Jinping a adopté comme à son habitude un langage très diplomatique, mais finalement assez clair : « La Chine et l’UE doivent intensifier leur communication afin d’établir une compréhension mutuelle correcte et d’éviter les erreurs d’interprétation ou de jugement. »
  • Macron a opté pour une approche plus douce, expliquant que la Chine était le seul pays au monde capable « de ramener la Russie à la raison » et donc désamorcer le conflit en Ukraine.
  • Le bilan diplomatique est toutefois bien maigre :
    • Xi Jinping se contentant de dire qu’il allait appeler le président ukrainien Volodymyr Zelensky, mais à une date non précisée, « au moment adéquat et quand les conditions seront réunies ».
    • Le président chinois n’a à aucun moment laissé entendre qu’il interviendrait auprès de Moscou.
  • Lors de la conférence de presse commune, le dirigeant chinois a suivi sa ligne traditionnelle depuis le début du conflit, appelant la communauté internationale à « rester rationnel et calme », s’opposant « à une logique de blocs », comme le font les États-Unis. Il a néanmoins semblé plusieurs fois agacé par le style plus prolixe de son voisin, le président français, qui est intervenu deux fois plus de temps que son hôte.
  • En revanche, sur le plan économique, Macron a pris ce qu’il était venu chercher : un accord à 36 milliards de dollars pour l’achat par la Chine de 150 Airbus A320 Neo et de 10 A350.
  • Finalement, la rencontre n’a débouché « sur aucune surprise » sur le plan diplomatique, laissent entendre plusieurs sources. Mais un diplomate française nuance : « C’est un premier contact qui en appelle d’autres. » À commencer par ce vendredi où Macron et Xi Jinping passeront près de 7 heures ensemble.
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