Les médias américains sont aux prises avec ce qu’on appelle un « Trump slump » (‘effondrement de Trump’) aux États-Unis. L’impact que le président a eu sur les médias et la société depuis de nombreuses années commence à s’éroder. L’intérêt général pour l’actualité politique est en déclin et cède la place à des questions telles que la technologie ou l’économie mondiale.
Chaque style a sa date de péremption. Trump semble avoir atteint sa limite. Nul n’est besoin d’en chercher la raison trop loin : la communication de Trump est principalement dominée par ses tweets sans fin. Ils sont remplis d’exagérations et se caractérisent par un manque de détails spécifiques. De plus, il y a la répétition constante des choses du passé, les noms de ses « bêtes noires » préférées (Mueller, « les démocrates », Hillary Clinton, les « médias fake news », etc.), l’énumération continue des injustices qui lui sont infligées (« No Collusion », « No Obstruction », « Witch Hunt », « Hoax »), ses vantardises à propos de l’évolution des marchés boursiers et de l’économie, les insultes et humiliations à l’adresse des personnes qui ne lui sont pas loyales, sa manière de tourner en spectacle tout ce qu’il prend en main et son éternelle auto-promotion.
Cela a bien fonctionné pendant un certain temps, mais il semble maintenant que le meilleur est derrière lui. Les électeurs veulent juste faire une pause pour échapper à l’atmosphère permanente de perturbations et de futilités qui accompagne le monde de Trump.
Épuisés par le ‘Moi-moi-moi show de Trump’
Un récent sondage de Fox News a révélé que les électeurs démocrates préféraient « un dirigeant constant et fiable » (72 %) à « un nouveau programme audacieux » (25 %). Même le Wall Street Journal, traditionnellement conservateur, a rapporté la semaine dernière que l’establishment démocrate et républicain partageait l’idée que « les gens sont épuisés par le ‘Trump Show' ».
Congratulations to Rex Tillerson on being sworn in as our new Secretary of State. He will be a star!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) February 2, 2017
Rex Tillerson, a man who is “dumb as a rock” and totally ill prepared and ill equipped to be Secretary of State, made up a story (he got fired) that I was out-prepared by Vladimir Putin at a meeting in Hamburg, Germany. I don’t think Putin would agree. Look how the U.S. is doing!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) May 23, 2019
Les candidats à la présidentielle doivent donner aux électeurs le sentiment « qu’ils comprennent les gens comme eux ». (« I feel your pain » [‘Je ressens votre douleur’], dit Bill Clinton). En dehors de la base de Trump – qui est prête à tout lui pardonner – ce groupe d’électeurs semble être de plus en plus mince. Car c’est précisément sur ce thème que les républicains ont reconquis le Congrès américain en novembre. De nombreux électeurs ont donné leur vote à Trump il y a trois ans. Non pas parce qu’ils étaient d’accord avec lui, non pas à cause de son fanatisme ou de son ego, mais parce qu’ils ne pouvaient pas supporter Hillary. Mais ce groupe commence aussi à en avoir assez du style « moi-moi-moi » de Trump. Et ce sont certainement ces gens qui décideront bientôt des élections. Trump doit donc chercher d’urgence une nouvelle histoire.
C’est également un problème pour les chaînes de télévision, les médias en ligne et les autres. Pendant des années, ils ont pu se concentrer sur le style chaotique de Trump pour remplir leur programmation. Sur ses annonces non planifiées, ses tweets souvent offensants et son comportement non conventionnel. Les dirigeants d’entreprises de médias sont maintenant inquiets, car aucun autre « moneymaker » n’est actuellement en vue.
Stock Market is heading for one of the best months (June) in the history of our Country. Thank you Mr. President!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) June 25, 2019
Les démocrates n’ont pas de star
Parmi les nombreux candidats démocrates à l’investiture présidentielle, il n’y en a aucun qui pourrait immédiatement s’approprier le fil d’actualités comme Trump l’avait fait après 2015. Le premier grand débat télévisé entre les démocrates est prévu plus tard cette semaine. Les taux d’écoute ne seront même pas proches de ceux du premier débat républicain, lorsque Trump avait fait sa première apparition. Les candidats démocrates vont maintenant se partager l’attention des médias. La seule démocrate qui suscite réellement une attention particulière est Alexandra Ocasio-Cortez, la politicienne prodige âgée de 29 ans. Mais elle n’est pas candidate.
La lassitude à l’égard de Trump est réelle
Les chiffres des médias prouvent également que la lassitude à l’égard de Trump est réelle. Selon Parse.ly, une entreprise qui a comparé le nombre d’articles lus sur Trump avec le nombre d’articles écrits, la demande de contenu lié à Trump a diminué de 29 % au cours des six derniers mois par rapport aux six premiers mois de sa présidence. Les tweets de Trump ont aussi de moins en moins d’impact. Le président reçoit encore deux fois moins de réactions à ses écrits qu’au début de son mandat.
Selon l’agence de recherche sur les médias MoffettNathanson, les chiffres d’écoute des principales chaînes de télévision en 2018 étaient inférieurs de plus de 10 à 20 % à ceux de l’année précédente. Une tendance qui a déjà commencé après la course électorale de 2016. A la fin de l’année dernière, les chaînes de télévision ont également cessé de retransmettre en direct les méétings de campagne de Trump, à l’exception de Fox News, car les téléspectateurs ont déserté. Les chaînes de télévision ne sont pas les seules à noter le désintérêt du président. Après l’inauguration de Trump, le New York Times a profité d’un « Trump Bump » (une envolée brutale), grâce auquel le journal a pu enregistrer des centaines de milliers de nouveaux abonnés numériques. Mais cela s’est également terminé au milieu de l’année dernière.
Pour les entreprises de médias qui ont bénéficié pendant des années de l’attention qu’un des présidents les plus inconventionnels de l’histoire pouvait susciter, il n’y a rien d’autre à faire que de chercher d’autres thèmes. Et si l’on en croit le sondage ci-dessous, cela vaut aussi pour le président lui-même.