L’assemblée générale annuelle de l’ONU révèle surtout l’affaiblissement de l’Occident

Le grand rendez-vous annuel des chefs d’État, l’assemblée générale des Nations unies, se tient à New York cette semaine. Mais ni les dirigeants chinois, indien ou russe ne semblent avoir jugé bon d’y participer. L’absence de ces nations, qui sont pourtant les nouvelles puissances de notre époque, souligne la perte de vitesse de cette institution, et plus généralement, de l’Occident. Les médias n’ont pas manqué de relater que lors de son intervention, le président Trump avait fait rire l’assistance, lorsqu’il avait vanté son bilan, et affirmé qu’aucune autre administration n’avait fait autant que la sienne au cours de l’histoire de son pays.

Mais ils ont souvent omis un détail capital : le président chinois, Xi Jinping, le Premier ministre indien, Narendra Modi, et le président russe Vladimir Poutine ont tous 3 boudé l’assemblée générale des Nations unies cette année. Les commentateurs auxquels cela n’a pas échappé ont jugé que ces absences étaient lourdes de significations, et qu’il fallait y voir un signe de l’affaiblissement de l’Organisation.

Le déclin des Nations Unies est le reflet de l’avènement d’un nouvel ordre mondial dominé par la Chine

Selon le journal les Échos, ce n’est pas tant la fin du multilatéralisme, laminé par le président américain Donald Trump qui préfère lui substituer des accords bilatéraux, voire, le protectionnisme, que l’émergence d’un nouvel ordre mondial orchestré par la Chine, qui est responsable de cet affaiblissement.

L’empire du Milieu est l’un des fondateurs de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), avec la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan, créée en 2001, pour résoudre les différends de nature frontalière. Mais depuis, cette organisation s’est développée, et l’année dernière, l’Inde et le Pakistan l’ont rejointe. Désormais, elle représente 3,2 milliards d’habitants et un PIB cumulé de 37.000 milliards de dollars, soit près de la moitié de la population et des revenus de la planète.

2 événements ont précipité la remise en cause de la suprématie occidentale

Au cours des 12 derniers mois, Washington s’est retiré de l’accord nucléaire iranien, du Conseil des Droits de l’homme, du Pacte mondial sur la migration et de l’Unesco. Précédemment, les Etats-Unis avaient dénoncé l’accord de Paris sur le climat, et ce mois-ci, le conseiller américain à la sécurité nationale John Bolton a menacé de sanctionner la Cour pénale internationale si elle contestait les intérêts américains.

Mais d’après Les Echos, la remise en cause de l’ordre mondial basé sur la suprématie occidentale avait débuté bien avant, à la faveur de deux événements historiques : l’attentat du 11 septembre 2001 et la crise financière de 2008 :

“L’attentat du 11 septembre est perçu comme un refus des valeurs libérales occidentales, tandis que la crise financière – dont les économies émergentes vont être une des premières victimes – les ébranle profondément. Si elles ont été favorables à la mondialisation, elles souhaitent désormais en réécrire les règles. En commençant par refuser l’occidentalisation. D’où l’hindouisme triomphant de Modi ou l’exaltation de la Turquie de Soliman par Erdogan”.

En coulisses, la Chine demeure active à l’ONU

Pourtant, le site Politico affirme qu’en coulisses, la Chine est plus active que jamais aux Nations Unies :

« Tandis que Trump s’apprête à passer trois jours à sermonner les autres dirigeants sur des questions allant de l’Iran au commerce des drogues, et que la plupart s’inclineront pour éviter de se ridiculiser, la prédominance américaine aux États-Unis s’affaiblit et la Chine comble le fossé ».

Cette soumission apparente peut inciter certains diplomates américains à penser que l’emprise des Etats-Unis sur l’Organisation est intacte, en dépit du changement d’approche  de Washington, mais il n’en est rien, comme l’ont constaté les diplomates américains qui y travaillent à plein temps, explique le site. Sous couvert d’une attitude prudente à l’égard des Etats-Unis, visant à éviter toute confrontation, les diplomates chinois ne ménagent pas leurs efforts au sein de l’Organisation. “Moscou semble vouloir tirer parti de ses succès militaires en Syrie pour s’affirmer à nouveau comme une grande puissance aux Nations Unies, pour effacer sa période de faiblesse de l’après-guerre froide. En revanche, les responsables chinois ont un ordre du jour bien plus vaste – et finalement plus important – en ce qui concerne l’Institution. Cet  ordre du jour implique des idées, des alliances et de l’argent. Les autorités chinoises ont poussé les Américains à soutenir l’approche de Pékin pour promouvoir le développement international et – au grand dam des fonctionnaires occidentaux – étendre son influence. (…)

À long terme, les diplomates voient la Chine utiliser les Nations Unies pour légitimer une vision du développement international et de la coopération rivalisant avec l’ordre mondial dirigé par les États-Unis – et compte tenu que les États-Unis se montrent soudain hésitants à soutenir cet ordre, cette idée est très séduisante. Les responsables chinois insistent sur le fait qu’ils ne veulent pas utiliser les Nations Unies comme un instrument pour imposer leur modèle politique à d’autres États. Mais ils aimeraient que l’organisation favorise l’influence économique et idéologique de la Chine, tout comme ils croient que les États-Unis et leurs alliés ont utilisé les Nations Unies pour diffuser les valeurs libérales occidentales depuis la guerre froide”.

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