La tyrannie de la majorité, ou pourquoi ‘l’Opinion publique’ n’existe pas

[PICTURE|sitecpic|lowres]

Le concept de l’opinion publique est un fléau humain, au même titre que l’élitisme mondial, affirme Brandon Smith sur le blog financier Zero Hedge. Les être humains sont des êtres sociaux, et de ce fait, ils recherchent instinctivement « l’impératif tribal », mais cet impératif est souvent l’instrument des oligarques et des dictateurs qui tentent de faire adhérer les individus à un idéal de groupe dans leur intérêt.

Les gens sont partagés entre leur désir de faire partie d’un groupe, et celui de comprendre le monde dans lequel ils évoluent, et souvent, ces deux tendances sont en conflit l’une avec l’autre. Pour résoudre ce conflit, la tentation est grande d’adhérer à l’opinion de la majorité, qui permet de se doter du sentiment d’appartenance au groupe, tout en donnant le sentiment d’être informé. Leur raisonnement est le suivant: «Si la majorité de la population y croit, alors, du fait d’une loi statistique, ce doit être la vérité. Ceux qui ne partagent pas l’opinion de la majorité sont de ce fait en opposition avec la loi statistique, ce qui signifie qu’ils sont en retard sur leur temps, ou qu’ils sont des déviants sociaux ou des fous ».

Le problème, c’est que l’histoire a montré clairement que « l’opinion publique » a généralement tort. Les progrès qui ont été accomplis sont le fait de minorités et d’individus qui ont eu une idée que le reste du monde n’avait pas vue. La réalisation collective ou la vérité collective n’existent pas, et n’existeront jamais, parce que le collectif ne pense ni de façon créative, ni de façon honnête. Sa seule préoccupation, c’est la survie du système quelques en soient les coûts, et en général, cette survie passe par des mensonges.

Le débat actuel qui s’est ouvert aux Etats Unis à propos de la détention d’armes illustre bien ce phénomène. Reuters a publié que selon un sondage, 74% du peuple américain soutenait la création d’une loi en faveur d’un contrôle renforcé de la détention d’armes. Mais dans la dernière ligne de l’article, on apprend que l’échantillon du sondage n’était composé que de 559 personnes, ce qui semble bien peu pour exprimer l’opinion du peuple américain sur une question de cette nature.

Les sondages posent un autre problème : ils ne permettent pas de voir que les gens ne parviennent pas à trancher certaines questions, et que la majorité n’est pas aussi nette qu’ils ne le donnent à penser. Dans la plupart des cas, lorsqu’une majorité se dégage, on ne sait pas exactement comment ces gens sont arrivés à adopter ce point de vue, qui les a convaincus, et comment.

En outre, dans ceux qui se reconnaissent de la majorité, un certain nombre est mal informé et en réalité, ils ne savent pas quoi penser. La plupart des oppositions entre les « pour » et les « contre » une idée se réduit en fait à une lutte entre deux minorités éduquées, avec, entre elles, la grande masse du public qui n’a pas de point de vue fondé sur une réelle connaissance de la question en cause.

L’attachement à la «majorité» et à l’«opinion publique» est le résultat de notre idolâtrie des idéaux démocratiques, mais ce que veut la majorité n’a pas vraiment d’importance. Dans une république, les droits fondamentaux du peuple, comme la liberté de parole, par exemple, sont inscrits dans la Constitution, et ils ne peuvent pas être remis en cause par les changements d’opinions passagers de la population, même si cette opinion est majoritaire.

Les élites savent manipuler les masses pour dissimuler leurs comportements abusifs. Lorsqu’un crime est commis, elles crient à «l’intérêt commun», ou la « sécurité nationale » pour obtenir l’adhésion de la  majorité du peuple, et faire sentir aux dissidents qu’ils s’opposent à une masse qui les dépasse et les rend insignifiants. Le combat pour la liberté n’a rien à voir avec «l’éveil du peuple », mais plutôt au rassemblement d’une minorité courageuse et énergique capable de tenir face aux brimades, et de supporter la marginalisation que lui imposera la majorité.

Plus