Près de 23 000 migrants et demandeurs d’asile en provenance du Moyen-Orient et du Sud de l’Asie sont arrivés en Bosnie cette année. Le pays est en effet devenu un passage obligé pour franchir la frontière de la Croatie, qui marque la porte d’entrée de l’Union européenne. Mais la Bosnie, un pays pauvre affligé de nombreux problèmes, n’a guère les moyens de les prendre en charge.
L’année dernière, le nombre de migrants en Bosnie était inférieur à un millier, et le brutal afflux de ces personnes s’explique par la fermeture des autres itinéraires utilisés jusqu’à présent, et notamment la fameuse route des Balkans, qui avait accueilli plus d’un million de migrants entre 2015 et 2016, et qui les menait en Hongrie en passant par la Serbie.
« La route des mosquées »
Ces personnes proviennent principalement du Pakistan, de l’Afghanistan et de la Syrie. La plupart transitent désormais par l’Albanie et le Monténégro, une route qui aurait été surnommée « la route des mosquées » par Peter Webinger, qui dirige le département de l’asile, des migrations et des droits de l’homme au ministère des Affaires intérieures autrichien. En effet, selon lui, les mosquées qui jalonnent cet itinéraire apporteraient une aide aux migrants.
Outre le risque de se voir refouler violemment par les policiers croates, les migrants sont aussi exposés au danger posé par les champs de mines, triste héritage des guerres de l’ex-Yougoslavie qui ont déchiré la région entre 1991 et 2001.
Bihac est devenue la nouvelle Calais
Des milliers d’entre eux ont établi des campements de fortune à la frontière avec la Croatie, avec l’espoir de parvenir à la franchir clandestinement prochainement. Au total, ils seraient près de 5000 à camper à la frontière de la Bosnie-Herzégovine. Environ 4000 d’entre eux se seraient installés à Bihac, une ville de 60 000 habitants située à une dizaine de kilomètres de la frontière. Chaque jour, leur effectif grossit d’une centaine de nouveaux arrivants.
Comme la ville de Calais le fut récemment pour les migrants qui souhaitaient passer illégalement en Grande-Bretagne, la ville est ainsi devenue une impasse pour ces personnes. Ces dernières ne peuvent compter que sur les distributions de repas de la Croix-Rouge et de l’aide de quelques associations humanitaires pour survivre.
Un pays trop pauvre pour pouvoir faire face à la vague de migrants
La Bosnie, un pays montagneux, est l’un des pays les plus pauvres et les plus instables de l’Europe. Elle ne dispose de 6 centres d’accueil de migrants, qui hébergent près de 3000 personnes, et sont tous surpeuplés.
L’Union européenne et la Turquie apportent une aide financière, mais les autorités bosniaques ont été confrontées à des désaccords politiciens et à une bureaucratie complexe qui les ont empêché d’ouvrir un centre d’accueil sur Bihac.
Bientôt des millers de personnes mortes de froid ?
A l’approche de l’hiver, les Nations unies ont mis en garde contre la possible émergence d’une grave crise humanitaire. Dans cette région, les températures peuvent descendre jusqu’à -15 °C en hiver, et les campements de fortune, souvent constitués de tentes, ou de bâtiments abandonnés, ne permettront pas aux migrants de lutter contre le grand froid. De nombreuses personnes risquent de ne pas le supporter, a alerté le responsable régional pour l’Europe de la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), Simon Missiri, dans un communiqué : « Malgré tous les efforts déployés par les organismes d’aide pour fournir de la nourriture et un abri aux migrants, les conditions de vie restent mauvaises et le risque d’hypothermie augmente avec l’arrivée du froid. Sans aide humanitaire, il est difficile de savoir combien de personnes tiendront jusqu’au printemps ».
La FICR et la société de la Croix-Rouge de Bosnie-Herzégovine ont donc lancé un appel pour réclamer 2,9 millions d’euros afin de pouvoir continuer à apporter leur assistance aux migrants au cours des prochains mois. « Nous craignons que, sans une action concertée, les migrants ne soient victimes d’une catastrophe humanitaire qui peut être complètement évitée. Mais si nous agissons maintenant (…) nous pouvons offrir une certaine protection aux migrants et à leurs communautés d’accueil. Mais le temps presse », précise M. Missiri.