Web Analytics

« La réforme des pensions reste le principal obstacle » : les fonds européens de relance pour la Belgique ne sont pas encore finalisés, la Vivaldi peine à montrer une amélioration concrète et risque de perdre une partie du montant

« La réforme des pensions reste le principal obstacle » : les fonds européens de relance pour la Belgique ne sont pas encore finalisés, la Vivaldi peine à montrer une amélioration concrète et risque de perdre une partie du montant
Thomas Dermine et Katerine Lalieux – Getty Images

Selon une source gouvernementale du gouvernement Vivaldi, le blocage des fonds européens de relance concerne principalement les pensions. La Commission européenne examine encore les plans de réforme promis par le gouvernement fédéral belge afin de débloquer la première tranche : une aide de 847 millions d’euros pour la Belgique et ses différentes régions. « Des audits sont toujours en cours, y compris sur d’autres sujets. Mais le principal point de discorde reste la réforme des pensions », indique un vice-Premier ministre. La difficulté réside dans le fait que la Cour des comptes ne peut pas vérifier les calculs des plans finalisés par la Vivaldi juste avant l’été 2023 : « La Cour des comptes ne dispose pas d’estimations de ces revenus et donc pas de l’impact net sur le budget fédéral », a-t-elle commenté sur le budget. L’Inspection des Finances a également signalé dans son rapport qu’elle ne pouvait pas vérifier si la Belgique respectait ses engagements. Le gouvernement envisage désormais de ne pas recevoir les fonds européens avant le mois de mars, au minimum. « Il se pourrait qu’une partie du montant total soit déduite », précise-t-on.

Dans l’actualité : La question des fonds européens de relance reste d’actualité.

Les détails : Le PS et leur secrétaire d’État à la Relance, Thomas Dermine (PS), assuraient que « tout serait en ordre ». Cependant, la réforme des pensions, mise en œuvre par la ministre des Pensions Karine Lalieux (PS), reste peu convaincante. Ainsi, l’incertitude demeure concernant les 847 millions d’euros de fonds européens, attendus tant par le gouvernement fédéral que par les régions.

  • « La première demande de paiement a été soumise le 29 septembre 2023. Le règlement est prévu entre fin novembre 2023 et début 2024″, avait affirmé la Vivaldi dans le cadre du budget 2024, présenté à la Chambre le 8 décembre lors du débat budgétaire.
  • La Vivaldi a présenté les chiffres pour l’année suivante, en anticipant que l’important soutien financier de l’Europe arriverait rapidement. Ces centaines de millions font partie du plan de relance massif lancé par la Commission européenne pour aider les États membres de l’UE à surmonter la crise économique post-Covid.
  • En échange de ces fonds, les États membres devaient soumettre des projets de réforme structurelle : de nombreux projets durables, mais aussi des développements dans divers secteurs ou infrastructures. Par ailleurs, des « promesses » de réformes étaient exigées par la Commission. La Vivaldi, avec le secrétaire d’État Dermine, a intégré dans ces engagements la réforme des pensions, conformément à l’accord de gouvernement.
  • Toutefois, les plans initiaux de Lalieux et du PS, approuvés par Vivaldi, ne représentaient pas une amélioration à long terme des finances publiques, mais plutôt une détérioration. Le vieillissement démographique, déjà un lourd fardeau pour les années à venir, aurait coûté encore plus cher à la Belgique. Dermine n’a donc pas pu demander les fonds européens, sachant que cette demande serait rejetée pour « non-respect des conditions ».
  • L’UE a ainsi exigé des ajustements, faute de quoi le financement promis ne serait pas accordé. Cela pose problème car des projets pour des centaines de millions d’euros étaient déjà inscrits dans les budgets de la Vivaldi, ainsi que dans ceux des gouvernements flamand, wallon et bruxellois.
  • Sous la pression des partenaires de coalition, le PS a finalement cédé, quoique légèrement : juste avant l’été, le gouvernement fédéral a négocié un nouvel accord sur les pensions. Cette fois, il était question d’une amélioration structurelle, selon le gouvernement fédéral.
  • Après l’accord sur les pensions, Dermine a annoncé en septembre avoir soumis la demande. Une avance a déjà été versée : un premier montant de 178.771.050,63 euros a été reçu.
  • Cependant, ces plans de pension doivent encore être évalués par la Commission. « Depuis la soumission de la demande, le secrétaire d’État Thomas Dermine est en contact régulier avec les services de la Commission européenne. Ils examinent si chaque étape a été atteinte et demandent souvent des documents supplémentaires pour finaliser leur analyse. C’est un processus habituel qui prend du temps. Le gouvernement attend une réponse définitive de la Commission au plus tard début 2024« , est-il indiqué dans les documents de fin décembre, dont on a pu prendre connaissance.

L’essentiel : Les fonds européens de relance pour la Belgique demeurent incertains.

  • Au sein du gouvernement Vivaldi, on reconnaît que les choses ne progressent pas aussi aisément qu’espéré. « En effet, les fonds européens de relance sont toujours bloqués du côté de la Commission européenne, à cause des enjeux liés aux pensions », confirme-t-on au sein du gouvernement.
  • « Des audits sont toujours en cours sur différents dossiers. Néanmoins, la question principale demeure celle de la réforme des pensions », confirme un vice-Premier ministre. Il est également admis « qu’une partie du montant total pourrait être déduite si nous ne respectons pas nos engagements relatifs à ces étapes clés, selon l’évaluation de la Commission ». « Cette réduction serait effectuée proportionnellement », ajoute-t-il.
  • Le calendrier est également intéressant : « Nous pourrions seulement avoir une vision complète de la situation en mars ».
  • La Commission européenne a des motifs de réserve concernant le dossier des pensions. La Cour des comptes, chargée d’examiner en Belgique le calcul de ces plans, a été explicite dans un rapport du 23 novembre concernant le budget 2024 :
    • « Dès 2025, le bonus de pension entraînera une augmentation des dépenses, estimées à 178 millions d’euros en 2025 et 357 millions d’euros en 2026. Ces dépenses diminueront progressivement, pour atteindre environ 200 millions d’euros en 2035″, indiquent-ils.
    • « Il sera partiellement compensé par des recettes supplémentaires issues des impôts et des cotisations de sécurité sociale (des personnes travaillant plus longtemps) », notent-ils.
    • Cependant, il est important de souligner : « La Cour des comptes ne dispose pas d’estimations de ces recettes et donc pas de l’impact net sur le budget fédéral. »
  • Le constat est similaire du côté de l’Inspection des Finances dans son avis sur le budget. Le signal est clairement à l’orange :
    • Ils préviennent que la Commission pourrait retenir une partie des fonds : « Pour les fonds de relance, elle examinera l’avancée des étapes clés et pourra appliquer, en cas de retard dans leur réalisation, les mesures de retenue prévues dans sa méthodologie du 21 février 2023, en matière de suspension de paiement. »
    • L’organisme met en avant que la Vivaldi a intégré les fonds européens de relance dans le budget sur la base « de l’atteinte supposée de toutes les étapes nécessaires pour le paiement de la première tranche ». Toutefois : « Dans son rapport du 19 septembre 2023, l’Inspection des Finances a indiqué que les conditions n’étaient pas remplies pour considérer cette étape comme complète« .
  • Depuis la Chambre, le spécialiste du budget de l’opposition, Sander Loones (N-VA), réagit fermement à toute cette saga : « Le secrétaire d’État Dermine aime croire qu’il apporte un chèque européen, il s’avère plutôt que c’est une facture européenne. Nous en payons le prix fort, avons déjà reçu peu en retour, et maintenant, cela risque de diminuer encore. Dermine a intitulé son livre ‘Les Wallons travaillent bien’… malheureusement, cela ne semble pas être le cas des ministres PS au sein du gouvernement De Croo. Et nous pourrions tous en subir les conséquences. »

La perspective globale : La Commission européenne va-t-elle adopter une approche stricte ? La question demeure ouverte.

  • Alors que les élections approchent, tant au niveau national qu’européen, ce dossier reste extrêmement délicat. Ironiquement, même le PS a déjà lancé un avertissement : à l’automne, Dermine affirmait qu’“un futur gouvernement devrait, de toute manière, réaliser une réforme fiscale” pour continuer à bénéficier des milliards de la relance européenne. C’était surtout pour mettre la pression sur le MR, qui était le seul à freiner sur ce dossier. Aujourd’hui, il apparaît que les travaux sur la réforme des pensions ne sont toujours pas finalisés.
  • Par ailleurs, au niveau européen, un débat intense se déroule autour des nouvelles règles budgétaires de l’Union européenne, mettant l’accent sur les « réformes structurelles ». Les pays démontrant leur engagement dans ces réformes auront plus de facilités à obtenir des dérogations aux contraintes budgétaires européennes imposées par la Commission.
  • La question est donc de savoir jusqu’à quel point la Commission européenne exigera ces réformes et comment elle assurera leur suivi.
  • Dans la pratique, cela semble difficile. Dans leur nouvel ouvrage La Grande Abuffata (le grand festin), les économistes italiens Tito Boeri et Roberto Perotti illustrent de manière éloquente comment l’Italie a reçu des centaines de milliards d’euros d’aides publiques sans vraiment tenir ses promesses.
  • “La plupart des réformes promises existaient seulement sur papier, mais n’ont été que peu ou mal mises en œuvre par les gouvernements italiens successifs, aboutissant au mieux à des résultats décevants, et dans le pire des cas à un échec total”, écrivent Boeri et Perotti.
  • La Commission risque ainsi de perdre sa crédibilité faute d’un contrôle sérieux sur ces fonds de relance, et face à la tâche qui lui incombe avec les nouvelles règles budgétaires. Les États membres ont convenu de les renforcer, tout en envisageant de les étendre sur quatre ou même sept ans, pour laisser place aux “réformes structurelles”.
  • Au Parlement européen, le débat sur ces nouvelles règles continue. L’objectif reste de maintenir le déficit budgétaire en dessous de 3 % du produit intérieur brut (PIB). En outre, il existe des règles concernant la dette publique, qui ne doit pas excéder 90 % du PIB : si c’est le cas, une réduction annuelle d’au moins 1 % du PIB est requise. La Belgique fait évidemment partie de cette dernière catégorie.
  • Le Parlement européen veut avoir son mot à dire : les Verts, avec le député européen Ecolo Philippe Lamberts, sont en première ligne. Ils souhaitent que les États membres conservent une certaine flexibilité et “ne doivent pas faire d’économies sur la santé, l’éducation et la culture”, pas plus que sur la transition environnementale, bien sûr. Le débat initié par Lamberts pourrait potentiellement prolonger la mise en place de l’ensemble des nouvelles règles.
Plus d'articles Premium
Plus