Mercredi dernier, l’OPEP+, le cartel des pays producteurs de pétrole et leurs alliés, a décidé de réduire la production mondiale de 2 millions de barils par jour en novembre. Mais selon Julian Lee, stratège pétrolier à l’agence de presse Bloomberg, cette réduction sera à peine perceptible dans la réalité.
Selon Lee, il y a plusieurs raisons à cela. La principale est que les pays de l’OPEP+ ont déjà produit beaucoup moins que leurs objectifs fixés. En septembre, la production quotidienne aurait été inférieure de 3,6 millions de barils à ce que l’OPEP+ avait souhaité.
En outre, cet écart se creuse. En septembre de l’année dernière, l’OPEP+ produisait « seulement » 700.000 barils de moins par jour que les quotas visés. La dernière fois que l’OPEP+ a atteint ses objectifs de production remonte à avril 2021, selon les chiffres de Bloomberg.
Les nouveaux objectifs ne représentent pas grand-chose
Les nouveaux objectifs entrent en vigueur le 1er novembre. Toutefois, bien que l’OPEP+ compte 23 membres, les nouveaux quotas de production n’auront en réalité un impact que sur huit pays, estime M. Lee. Il s’agit de l’Arabie saoudite, du Koweït, des Émirats arabes unis, du Sud-Soudan, de l’Algérie, du Gabon, de l’Irak et d’Oman. Tous les autres pays produisent déjà moins que ce qui était attendu d’eux.
Au total, ces huit pays doivent produire quelque 890.000 barils de moins. C’est déjà moins de la moitié de l’objectif de 2 millions. Mais d’après Lee, il est peu probable que ce chiffre soit atteint. Selon l’analyste, il est peu probable que le Soudan du Sud, le Gabon et l’Irak se conforment à la nouvelle réglementation.
Après tout, les deux premiers pays ont constamment dépassé leurs quotas de production pendant plus de deux ans, il semble donc peu probable qu’ils se joignent soudainement au cartel. L’Irak, lui aussi, ne bougera pas. Le ministre du pétrole du pays, Ihsan Abdoel-Jabbar Ismail, a annoncé mercredi, immédiatement après l’annonce de l’OPEP+, que les exportations irakiennes resteront inchangées. Même s’il y a une réduction de la production, bien que peu probable selon M. Lee, elle n’aura d’impact que sur le marché intérieur.
Compensation d’autres pays
Il reste donc cinq pays : Algérie, Oman, Arabie Saoudite, EAU et Koweït. Au total, ils réduiraient la production d’un peu plus de 800.000 barils par jour, on est donc loin des 2 millions. D’autant que cette réduction de la production sera compensée par des augmentations dans les pays qui produisent actuellement beaucoup moins que les objectifs, estime l’analyste de Bloomberg.
Il pointe spécifiquement du doigt le Kazakhstan, qui produit actuellement 560.000 barils par jour de moins que les objectifs fixés. Sur l’un des plus grands sites pétroliers, un problème technique serait en train d’entraver la production, et un autre est fermé pour des travaux de maintenance.
Lorsque ces travaux prendront fin ce week-end, le pays recommencera à pomper 260.000 barils supplémentaires par jour. Le défaut technique sera également résolu d’ici la fin du mois, selon le ministre de l’Énergie du pays, ce qui ramènera la production à sa pleine capacité en novembre. En cas de succès, la réduction totale de la production de l’OPEP+ ne s’élèvera qu’à environ 230.000 barils par jour, soit près de 90 % de moins que les 2 millions de barils convenus mercredi. Sans compter la réponse des États-Unis.
Toutefois, M. Lee conclut en disant que l’embargo européen sur le pétrole russe, qui entrera en vigueur début décembre, pourrait bien avoir un impact plus important. Cela pourrait obliger la Russie à réduire sa production. Selon l’analyste, cela pourrait bien faire en sorte que la réduction de la production de 2 millions soit, dans ce cas-là, atteinte. Mais ça fera mal à la Russie, cette fois.
BL