Principaux renseignements
- L’approche libérale de la prostitution en Allemagne est critiquée car les travailleurs du sexe ne sont pas suffisamment protégés.
- Le modèle scandinave, qui criminalise l’achat de services sexuels mais dépénalise leur vente, gagne du terrain en tant qu’approche possible pour limiter les dommages liés à la prostitution.
- Les partisans du modèle scandinave affirment qu’il donne plus d’autonomie aux travailleurs du sexe.
L’approche libérale de la prostitution en Allemagne a relancé le débat. La présidente du Bundestag, Julia Klöckner, a lancé la discussion en qualifiant l’Allemagne de « bordel de l’Europe ». Elle a critiqué l’idée selon laquelle la prostitution est simplement un métier et a déclaré qu’il y avait un manque de respect envers les femmes.
Modèle nordique comme solution potentielle
La ministre de la Santé, Nina Warken a fait écho aux sentiments de Klöckner, plaidant pour l’adoption du modèle nordique. Ce modèle, mis en œuvre en Suède, en Norvège, en France et en Irlande, criminalise l’achat de services sexuels tout en décriminalisant la vente. Warken estime que cette approche protège les travailleurs du sexe en les exemptant de poursuites, tandis que les acheteurs sont tenus pour responsables.
La professeure Julia Wege, chercheuse spécialisée dans la prostitution, la traite et la vulnérabilité des femmes, soutient le regain d’intérêt pour le modèle nordique. Elle considère qu’il s’agit d’une étape cruciale pour atténuer les effets néfastes de la prostitution sur la santé mentale et physique. Tout en reconnaissant que les interdictions se heurtent souvent à une certaine résistance, elle souligne qu’elles peuvent servir de rappel puissant pour fixer des limites claires.
Parlement européen
Le Parlement européen a remis le sujet à l’ordre du jour en adoptant une résolution qui invite les États membres de l’UE à envisager le modèle scandinave. La résolution met l’accent sur la criminalisation de l’achat de services sexuels et sur le renforcement de l’aide aux personnes cherchant à sortir de la prostitution.
Critiques envers l’Allemagne
La légalisation de la prostitution en Allemagne en 2002 a été critiquée parce qu’elle n’a pas permis d’éliminer la coercition, la violence et l’influence du crime organisé dans l’industrie du sexe. Les organisations de défense des droits des femmes plaident en faveur de protections plus fortes, en particulier pour les femmes migrantes qui sont souvent vulnérables à l’exploitation.
Le professeur Wege attribue l’approche libérale de l’Allemagne à son incapacité à donner la priorité aux droits des femmes. Une évaluation gouvernementale réalisée en 2004 avait déjà mis en évidence le manque de protection des femmes migrantes, mais les changements nécessaires n’ont pas été mis en œuvre.
Motivations économiques
Les motivations économiques qui sous-tendent l’industrie du sexe sont également importantes. Le professeur Wege souligne les vastes profits générés par la prostitution, qui donnent lieu à de puissants efforts de lobbying privilégiant le gain financier au détriment du bien-être des personnes concernées. La situation centrale de l’Allemagne et les règles de libre circulation de l’UE ont facilité l’expansion rapide du marché.
Le professeur Wege souligne que la plupart des femmes qui se prostituent n’agissent pas de manière autonome. Elle identifie un petit groupe qui travaille de manière indépendante, mais un groupe beaucoup plus important, composé principalement de femmes migrantes, qui sont exploitées, traumatisées et économiquement dépendantes. Ces femmes n’ont souvent pas conscience de leurs droits.
Exploitation
De nombreuses migrantes entrent dans l’industrie du sexe en Allemagne par désespoir plutôt que par choix. Elles sont confrontées à des opportunités limitées et à de profondes inégalités dans leur pays d’origine, ce qui les pousse à chercher d’autres moyens de survie. Les tentatives de réglementation du secteur se sont révélées insuffisantes pour lutter contre la violence à l’égard des travailleurs du sexe.
Alors que certains considèrent l’achat de services sexuels comme un plaisir inoffensif, le professeur Wege souligne les graves infractions pénales qui en découlent, notamment la violence exercée par les acheteurs et l’exploitation par les proxénètes. En fin de compte, elle reconnaît qu’il est peu probable que la prostitution soit entièrement éliminée, mais elle estime que l’adoption du modèle nordique envoie des signaux cruciaux qui donnent la priorité à la sécurité et au bien-être des femmes. (fc)
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