Les ventes de logements neufs sont en chute en Chine. Pékin baisse les taux d’intérêt pour essayer de relancer la demande. Mais elle a une autre stratégie : des tours d’immeubles vides ou dont la construction n’est pas encore terminée sont détruites, pour booster l’activité économique et limiter l’offre, pour éviter la chute des prix. Le but est de sauver un secteur criblé de dettes.
L’immobilier chinois a un problème de demande. Depuis un an environ, les ventes sont en chute, ce qui vient à un mauvais moment pour les promoteurs immobiliers, qui connaissent des problèmes de liquidités pour rembourser leurs dettes.
De part et d’autre, des appels se font entendre pour que Pékin stimule la demande, pour que ce secteur qui représente près entre 25 et 30% du PIB ne s’effondre pas et ne contamine pas le reste de l’économie. La Banque populaire de Chine, la banque centrale du pays, a par exemple réduit différents taux d’intérêt ces derniers mois. Mais la Chine engage aussi une autre méthode plus radicale pour donner un coup de pouce : détruire l’offre.
Littéralement. Des blocs d’immeubles entiers, vides ou dont la construction n’est pas terminée, sont transformés en poussière. Avec une réduction de l’offre, les prix de l’immobilier ne devraient pas chuter (trop de logements vides sur le marché font chuter les prix), et la reconstruction demande de la main-d’oeuvre et crée de l’emploi, c’est tout bénef, John Keynes et sa théorie de grands travaux n’auraient pas rêvé mieux.
Offre
« Construire, interrompre, démolir, répéter » : ce jonglage entre l’offre et la demande n’est pas une nouvelle solution. Il est aussi accompagné de mises en suspens de chantiers, aussi dans le but de rendre l’offre plus rare. La construction d’une tour d’immeuble met en moyenne 8 ans. Cela fait partie intégrante du fonctionnement du marché immobilier chinois. Selon les analystes de Fathom Consulting, cités par The Telegraph, ces dernières années, l’équivalent de trois milliards de mètres carrés a été détruit ou mis en suspens. De quoi héberger 75 millions de personnes.
La Chine compte de vastes villes fantômes. Elles sont le fruit du développement du secteur immobilier alimenté par la dette. Une sorte de bulle qui a apporté pendant des décennies de la croissance à la Chine et qui lui éclate aujourd’hui à la figure.
« Le stock cumulé de capacités inutilisées atteignant le chiffre stupéfiant de dix milliards de mètres carrés, il semble que la Chine ait eu recours aux démolitions pour réduire une partie de cet excès », explique Joanna Davies, responsable de l’économie chinoise chez Fathom.
Demande
Les estimations de S&P suggèrent que les ventes de biens immobiliers en Chine vont chuter d’un tiers cette année, une baisse supérieure à la crise financière. La confiance des acheteurs chinois est au plus bas, suite à la crise déclenchée par Evergrande. Beaucoup ont peur de voir leur investissement partir en fumée suite aux déboires de nombreux acheteurs, au cœur de la crise, qui n’ont jamais vu leur appartement terminé.
La Banque centrale a baissé les taux d’intérêt, à 4,3%, en vue de relancer la demande, et elle a accordé des prêts spéciaux à hauteur de 30 milliards de dollars pour les promoteurs, en vue de terminer les logements inachevés.