La ministre des Affaires étrangères fait face ce vendredi soir aux députés de l’opposition et de la majorité. Ces derniers attendaient un changement d’attitude par rapport à ses précédentes explications autour de l’affaire de l’Irangate.
Sur le fond, la ministre a refait une nouvelle fois la chronologie des faits en veillant cette fois à ne plus paraitre incohérente. Sur la forme, Lahbib a montré patte blanche, comme l’attendaient les partis de gauche de la majorité, qui avaient perdu confiance en la ministre.
- « Je suis désolée que les choses se soient passées ainsi. J’avoue que nous aurions pu gérer les choses différemment et j’aurais dû mieux communiquer”, a-t-elle déclaré. La ministre a également reconnu qu’elle n’aurait « pas dû réagir de manière aussi véhémente en rejetant la faute sur d’autres niveaux de pouvoir. Je vous prie de bien vouloir m’excuser pour mon manque de clarté, je n’ai jamais réfléchi en termes de calculs politiques. »
- Sur le fond, la ministre reconnait « avoir été à l’origine d’une confusion dans la mention que j’ai faite sur l’avis de l’OCAM”, a-t-elle ajouté. C’est sur ce point précis que l’opposition avait explicitement demandé la démission de la ministre, la semaine dernière.
- Lahbib a toutefois réitéré que l’envoi des invitations n’était pas « opportune », ne déchargeant pas l’ancien secrétaire d’Etat bruxellois, Pascal Smet (Vooruit), qui a démissionné. Mais la ministre a admis que l’attribution des visas et l’enchainement des procédures auraient pu être de meilleure facture : « Il faudra un modus operandi qui définit plus clairement qui s’occupe de quoi à l’avenir”
- Lahbib est aussi revenue, comme mercredi dernier, sur la situation diplomatique avec l’Iran et les circonstances de l’opération Blackstone, qui visait à faire libérer Olivier Vandecasteele et d’autres prisonniers occidentaux. Une situation qui obligeait la Belgique à se montrer prudente. Refuser des visas dans ces circonstances aurait été perçu « comme un mauvais signal » par Téhéran.
Sera-ce suffisant ?
Peu avant son intervention, on apprenait que Lahbib avait fait marcher son réseau, en appelant notamment certains députés socialistes pour tenter de calmer le jeu, ce qui n’avait visiblement pas fonctionné.
Les députés de la majorité n’en démordent pas ce lundi :
- Malik Ben Achour (PS) : « Ce Parlement n’est ni un confessionnal, ni une église et je ne suis pas curé. Vos excuses pour pas cher – sans jamais évoquer vos propres responsabilités dans la procédure – ne m’intéressent pas après tous ces parapluies ouverts et tous ces mensonges. Le 15 juin, vous avez menti à la Chambre (sur l’OCAM, ndlr.) et c’est irrémédiablement à inscrire à votre passif. Et l’argument diplomatique agité récemment est un alibi, un emballage qui ne tient pas. La question qui se pose est donc de savoir si vous êtes encore suffisamment fiable au vu de toutes vos contradictions qui ensevelissent votre responsabilité. »
- Samuel Cogolati (Ecolo) : « J’entends votre introspection tardive mais, pour moi, il n’y a pas eu de ‘confusion’. J’ai moi-même tenté de recoller les pièces du puzzle, mais je ne comprends toujours pas votre feu vert après l’opposition, notamment, de notre ambassadeur en Iran (…) Que vous fallait-il de plus pour dire « stop » ? Reconnaissez-vous votre « responsabilité Politique » dans l’octroi des visas ? »
L’opposition demande toujours sa démission :
- Safai Darya (N-VA) : « Un mea culpa tardif ne justifie rien : seule votre démission serait un signal clair. » La députée a réitéré les risques qu’auraient fait prendre la ministre aux opposants iraniens et à leurs familles.
- Peter De Roover (N-VA) : « Les excuses demandées que vous formulez portent uniquement sur des éventuels ‘malentendus’ qui auraient été créés par une mauvaise communication. Or, il y a bien plus que des malentendus ! »
Maintenant que Lahbib a changé de ton, reconnaissant ses erreurs, beaucoup se jouent désormais en dehors de l’hémicycle, entre les présidents de parti, qui voudront ou non faire redescendre la température sur ce dossier. L’affaire ne sera dans les faits pas réglée avant jeudi prochain et le vote de défiance/confiance.