L’impensable vient de se produire dans le seul pays au monde à avoir connu l’apocalypse nucléaire : mercredi, Shigeru Ishiba, l’ex-ministre de la Défense du Japon qui est également un expert dans ce domaine, a proposé dans une émission de télévision que son pays rouvre le débat sur l’abolition des « trois principes non-nucléaires ». Ces principes interdisent au Japon de produire, de détenir des armes nucléaires, ou de permettre la présence d’armes nucléaires sur le sol japonais.Sa déclaration fait suite au sixième essai nucléaire réalisé par la Corée du Nord dimanche dernier, et au survol récent du pays par un missile balistique intercontinental nord-coréen, 5 jours plus tôt.Selon leur Constitution, les Japonais n’ont le droit de mener que des opérations militaires défensives, ce qui exclut la détention d’armes nucléaires. Comme la Corée du Sud, le Japon bénéficie du « parapluie nucléaire » américain, et c’est aux Etats-Unis qu’il incombe d’assurer sa défense. Cependant, aucune arme nucléaire américaine n’est stationnée au Japon.Mais dans l’hypothèse où la Corée du Nord serait désormais capable d’atteindre une ville américaine, il n’est plus certain que les Etats-Unis seraient toujours disposés à respecter ces dispositions, qui les exposent à d’éventuelles représailles.
Uniquement le transport d’armes nucléaires
Le Japon, qui dispose de centrales nucléaires, possède de grandes quantités de plutonium fissile et d’une capacité technologique qui lui permettrait de construire des milliers de têtes nucléaires. Mais Ishiba a semblé rejeter cette possibilité :
«Si le Japon, le seul pays à avoir souffert d’une attaque nucléaire, possédait des armes nucléaires, cela enverrait le message qu’il est acceptable que tout le monde en ait ».
Il a plutôt privilégié l’hypothèse d’une présence d’armes nucléaires américaines sur le sol japonais : « Pouvons-nous vraiment nous permettre de dire que nous souhaitons bénéficier de la protection des armes nucléaires américaines, mais que nous ne les voulons pas dans notre pays ? »Yoshihide Suga, le Secrétaire général du Cabinet, a cependant mitigé ses propos : « Jusqu’à présent, nous n’avons pas parlé de remettre ces trois principes en cause, et nous n’envisageons pas de le faire », a-t-il dit.En 2015, à l’approche du 70e anniversaire du bombardement d’Hiroshima, le ministre de la Défense japonais Gen Nakatani avait déjà déclenché une vive polémique quand il avait suggéré que des textes de lois examinés par le Parlement n’excluaient pas la possibilité que l’armée japonaise transporte des armes nucléaires. Mais il s’était dépêché d’ajouter que cela était impossible en raison des « trois principes non-nucléaires ».