Interdiction des exportations d’ASML : les Pays-Bas coincés entre les superpuissances américaines et chinoises

« Si vous permettez à une puissance étrangère d’imposer des restrictions commerciales plus strictes à vos principales entreprises technologiques, vous renoncez à votre souveraineté », conclut Sanne van der Lugt, spécialiste de la Chine, à la suite des pressions exercées par les États-Unis sur le fabricant de machines à puces ASML pour qu’il cesse d’exporter des technologies cruciales vers la Chine. Pékin, quant à lui, est en colère face à la démarche de Washington.

À la une : le fait que le conseiller américain à la sécurité Jake Sullivan soit intervenu personnellement pour faire révoquer la licence d’exportation néerlandaise de certaines machines ASML vers la Chine n’est pas bien accueilli par le gouvernement chinois.

  • La Chine qualifie l’ingérence américaine d’acte « d’hégémonie » et « d’intimidation ».
  • Wang Wenbin, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a exhorté les Pays-Bas à « être impartiaux, à respecter les principes du marché et la loi, à prendre des mesures pratiques pour protéger les intérêts communs des deux pays et de leurs entreprises et à maintenir la stabilité des chaînes d’approvisionnement internationales. »
Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale du président américain Biden – Getty Images

L’épisode ASML remet-il en question la souveraineté des Pays-Bas ?

Zoom avant : des questions se posent également aux Pays-Bas. L’ agence de presse Bloomberg a rapporté que le gouvernement néerlandais avait orienté Jake Sullivan directement vers ASML elle-même. Un très mauvais signal, selon Sanne van der Lugt, experte de la Chine mais également politicienne du parti pro-européen Volt.

  • « Si vous permettez à une puissance étrangère d’imposer des restrictions commerciales plus strictes à vos entreprises technologiques les plus importantes, vous abandonnez votre souveraineté », a-t-elle écrit dans un article très commenté sur LinkedIn. « Vous envoyez alors le signal à tous les pays ayant des relations difficiles avec les États-Unis qu’ils ne devraient pas acheter la technologie néerlandaise s’il existe une alternative. »
  • Elle souligne une deuxième mauvaise conséquence. Cela pourrait inciter la Chine à développer elle-même pleinement la technologie en question. « En conséquence, ASML sera confrontée à un redoutable concurrent chinois bien plus tôt qu’elle ne l’aurait été sans sanctions. Auparavant, cela ne valait pas la peine de développer cette technologie soi-même. Aujourd’hui, la Chine en a besoin et les coûts n’ont plus d’importance. »

Zoom arrière : on ne peut exclure que la guerre technologique géopolitique s’étende à d’autres domaines. La Chine peut facilement faire de même avec l’Europe, à qui elle fournit de nombreuses terres rares. Van der Lugt : « Nous devons maintenant nous attendre à ce qu’une première entreprise européenne de défense ne puisse plus s’approvisionner en gallium ou en germanium en provenance de Chine. »

(OD)

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