Une grippe précoce a pris l’industrie pharmaceutique par surprise. Celle-ci se combine à une pénurie d’emballages causée par la guerre en Ukraine, tandis que le Covid ne demande qu’à ressurgir.
Comment l’Europe se retrouve – encore – confrontée à une pénurie de médicaments
Pourquoi est-ce important ?
La grande pandémie de 2020 a souligné la vulnérabilité des filières d'approvisionnement en médicaments de l'Union européenne - les antidouleurs et les antibiotiques, en particulier. Le Covid devait provoquer un grand moment de prise de conscience des risques d'une délocalisation vers l'Asie ainsi qu'un grand retour des productions nationales. En 2023, on en est encore loin.Dans l’actualité : l’Union européenne se retrouve une nouvelle fois en pénurie de médicaments essentiels. Les pharmacies manquent d’antidouleurs et de médicaments contre la fièvre, à base de paracétamol ou d’ibuprofène, ainsi que d’antibiotiques. Or ils sont très demandés en cette saison.
- L’Europe est plongée dans une situation sanitaire complexe : le Covid-19 menace de ressurgir, avec des hausses régulières du nombre de contaminations, mais aussi des infections saisonnières – rhumes, grippes, et autres – plus précoces qu’à l’accoutumée.
- « On s’attendait à ce qu’il y ait une poussée d’infections, mais plutôt vers la période de Noël ou après. Et au lieu de cela, elle est arrivée très tôt, déjà en octobre et novembre. Il y a donc eu une forte augmentation de la demande de médicaments antibiotiques de marque » explique Adrian van den Hoven, de Medicines for Europe, le lobby des fabricants de médicaments génériques, auprès d’Euractiv.
- Sauf que si la demande est anormalement haute pour l’instant, elle avait été anormalement basse durant la majeure partie de la pandémie, où les populations, confinées et masquées en public, étaient moins susceptibles de développer des maladies saisonnières. Le secteur a de ce fait diminué sa production durant cette période selon van den Hoven. Mais les saisons des maladies ne sont plus aussi prévisibles qu’auparavant, et voilà l’industrie fort démunie une fois la bise venue.
Pénuries en série
- M. van den Hoven assure aussi que l’Europe assure une large part de sa propre production: « Une partie est produite en Inde, mais une grande partie est encore produite ici en Europe, en Autriche, en France ou au Royaume-Uni. » Mais l’industrie pharmaceutique est confrontée à une nouvelle difficulté : la pénurie d’emballages.
- La distribution de médicaments requiert des quantités non négligeables de papier et de carton ; or ces denrées sont aussi en pleine pénurie, qui nourrit encore la guerre entre Russie et Ukraine, les deux pays étant de grands producteurs.
- Or l’emballage de médicaments est très réglementé : tout transfert de médicaments d’un pays vers un autre pour satisfaire la demande passe par un changement des boîtes et des notices pour que les langues correspondent, ce qui entraîne un gaspillage supplémentaire.
Le Covid en embuscade
Au sein de la Commission européenne, on craint un regain viral après les fêtes de fin d’année, les premières sans mesures de confinement ou de distanciation depuis 2021.
- En outre, le contexte de réouverture de la Chine, alors que les contaminations y sont en hausse, fait craindre une nouvelle vague répandue par le retour des touristes chinois à l’occasion du Nouvel An lunaire, de même que l’apparition de nouveaux variants.
- À court terme, la Commission tenterait d’intervenir et d’aider les usines à augmenter la production de médicaments, tandis qu’à moyen terme, la présentation de la stratégie pharmaceutique de l’UE sera accélérée.
- Rappelons en outre que la prise de médicaments non nécessaires ne fait qu’accentuer les difficultés d’approvisionnement. Or, les antibiotiques qui manquent actuellement ne sont d’absolument aucune utilité pour traiter un rhume, une grippe, ou encore le Covid-19, excepté pour des cas bien spécifiques de surinfection. Ce sont toutes des maladies causées par des virus, alors que les antibiotiques ne sont utiles que contre des bactéries.