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« On risque vraiment de perdre la main » : l’Europe a peur des éoliennes chinoises, mais apparemment elle a un plan

« On risque vraiment de perdre la main » : l’Europe a peur des éoliennes chinoises, mais apparemment elle a un plan
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le CEO de WindEurope, Giles Dickson. (Xiao Yuanpan/VCG via Getty Images, Philipp von Ditfurth/picture alliance via Getty Images)

Dans son discours sur l’état de l’Union prononcé mercredi, Ursula von der Leyen a fait des promesses pour une industrie « à succès » mais en proie à d’inquiétantes difficultés : l’éolien. Le secteur accueille ces mots avec soulagement. Car il ne cache pas son angoisse face aux turbines chinoises.

Pourquoi est-ce important ?

L'industrie éolienne a longtemps été l'une des grandes réussites de l'Europe. Toutefois, les fabricants européens commencent à sentir le vent tourner, face à une Chine qui progresse à une cadence infernale. Jusqu'à commencer à marcher sur leurs plates-bandes. Il vaudrait mieux ne pas tomber dans une nouvelle dépendance, surtout dans un secteur aussi important pour l'avenir du Vieux Continent.

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Dans l’actu : les mots de von der Leyen sur l’industrie éolienne bien accueillis par le secteur.

  • Mercredi, la présidente de la Commission européenne a glissé quelques promesses pour l’industrie européenne de l’éolien lors de son discours sur l’état de l’Union.
  • Le secteur sourit : aurait-il enfin été entendu ?

Un train de mesures arrive au secours de l’éolien européen

L’essentiel : qu’a dit von der Leyen ?

  • Ursula von der Leyen a consacré une bonne partie de son discours au fameux Pacte vert européen. A ce sujet, elle a notamment parlé spécifiquement de l’industrie de l’éolien. « Un exemple de succès européen », a-t-elle loué.
  • Dans la foulée, la présidente de la Commission a reconnu que le secteur était « confronté à un ensemble sans équivalent de difficultés« .
  • Elle a dès lors promis de prendre, en concertation avec l’industrie et les États membres, un « train de mesures européennes sur l’énergie éolienne« . Cela se matérialisera par :
    • Une accélération de la délivrance des permis.
    • Une amélioration des systèmes d’enchères.
    • Un élargissement de la focale mise sur les compétences, l’accès aux financements et la stabilité des chaînes d’approvisionnement.

« De l’éolien à l’acier, des batteries aux véhicules électriques, notre ambition est très claire : l’avenir de notre industrie des technologies propres doit se construire en Europe. »

Ursula von der Leyen, lors de son discours sur l’état de l’Union du 13 septembre 2023.

Il était temps

Le contexte : le secteur crie à l’aide.

  • Cela fait de nombreux mois que les entreprises du secteur appellent les responsables politiques européens à l’aide. Comme nous vous l’expliquions dans cet article, de son propre aveu, l’industrie européenne de l’éolien est en bonne voie pour se cracher. Sa chaîne d’approvisionnement est en effet sur le point de craquer.
  • Turbines, tours, fondations : c’est toute la structure des éoliennes qui est concernée, tant sur terre qu’en mer. Et pour l’offshore, on risque aussi bientôt de manquer de navires d’installation.
    • D’une part, le lobby européen de l’éolien WindEurope pointe du doigt la dépendance (quasi totale) de l’Europe à la Chine en ce qui concerne les terres rares. Le problème est le même pour les matériaux qui ne sont pas considérés comme rares mais qui sont cruciaux pour la fabrication des éoliennes, comme le cuivre ou le nickel.
    • D’autre part, l’inflation pour toutes ces matières premières constitue un autre net frein au développement de l’infrastructure éolienne.
  • Au rythme actuel, l’industrie estime que l’offre ne pourra très bientôt plus du tout répondre à la demande. Les plus de 400 GW d’énergie éolienne supplémentaires souhaités par les instances européennes semblent être utopiques. Si rien ne change rapidement, du moins.

Ces promesses ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd

Les réactions : réjouies.

  • Les promesses faites mercredi par von der Leyen ont donc été accueillies à bras ouvert par l’industrie européenne de l’éolien.
  • WindEurope, a d’ailleurs réagi via un communiqué plutôt fourni. Les promesses de la présidente de la Commission sont « très bienvenues », y lit-on. « Elle a qualifié l’industrie éolienne de ‘réussite européenne’. Mais l’énergie éolienne peut devenir une réussite encore plus grande pour l’Europe », ajoute le lobby. Les points soulevés par von der Leyen semblent avoir fait mouche :
    • Pour les permis, « environ 80 GW de projets éoliens sont toujours bloqués dans des processus bureaucratiques partout en Europe », souligne WindEurope.
    • Les enchères, elles, « nuisent à la santé de la chaîne d’approvisionnement éolienne européenne ». « Certains pays font même payer les promoteurs pour construire des parcs éoliens », déplore le lobby. « Les coûts de ces enchères dites négatives doivent être répercutés – sur les consommateurs ou sur une chaîne d’approvisionnement déjà en difficulté. »
    • WindEurope note également que la réalisation des objectifs européens nécessite 200.000 emplois supplémentaires d’ici 2030 et des milliards d’investissements dans chaque pays.
  • Le groupe danois Orsted, premier développeur mondial de parcs éoliens offshore, a lui aussi salué les annonces de von der Leyen.
    • Rappelant les difficultés dans lesquelles est englué le secteur, son CEO Mads Nipper s’est dit « très encouragé » par le discours sur l’état de l’Union.
    • « Je crois fermement que nous devons procéder à une évaluation à 360 degrés de la manière dont les enchères sont conçues », a-t-il notamment fait valoir, cité par Riviera.
  • Le géant allemand RWE s’est lui aussi réjoui du discours. Son patron, Markus Krebber, a déclaré que les mesures annoncées étaient « plus que bienvenues ».
    • « Ces bonnes intentions doivent désormais être suivies de mesures concrètes », a-t-il toutefois prévenu. « Nous avons besoin d’une action déterminée qui puisse être mise en œuvre rapidement et sans bureaucratie majeure. »

Des éoliennes chinoises « injustes et dangereuses »

Mais aussi : quelques mots aux rivaux.

  • Si l’industrie européenne de l’éolien est si inquiète, c’est aussi parce que sa rivale chinoise avance à vitesse grand V. Et qu’elle commence à ambitionner de lui faire de l’ombre sur son propre territoire.
    • En témoignent notamment les grandes ambitions du leader chinois Goldwind en Espagne, que nous vous évoquions il y a quelques semaines.
    • Un autre exemple a été donné cette semaine avec l’annonce d’une autre société chinoise, Samy. Un de ses responsables a indiqué à Recharge qu’elle comptait installer une éolienne terrestre de 10 MW (on fait difficilement mieux) en Allemagne d’ici 2025.
  • Dans son communiqué, WindEurope a d’ailleurs averti que les fabricants chinois commençaient à remporter des commandes sur le Vieux Continent.
  • « Ils proposent des turbines moins chères, des normes plus souples et des conditions financières non conventionnelles », lit-on dans le communiqué. « Il existe un risque très réel que le développement de l’énergie éolienne se fasse en Chine et non en Europe. »
  • Auprès de Recharge, le directeur du lobby, Giles Dickson, y est allé plus franco. Il a appelé à éviter de reproduire le scénario de dépendance aux énergies fossiles que l’on a connu avec la Russie. Et a qualifié les éoliennes chinoises « d’injustes » et de « menace pour la sécurité ».
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