L’élection présidentielle turque sera une course palpitante au coude-à-coude : « Il y a une polarisation depuis 20 ans »

Le dimanche 14 mai, les Turcs se rendent aux urnes pour les élections présidentielles. Après 20 ans de présidence Erdogan, la Turquie pourrait choisir de changer de cap. Le challenger d’Erdogan, Kemal Kilicdaroglu, est aussi son parfait opposé. Business AM s’est entretenu avec Dirk Rochtus, maître de conférences en politique internationale à la KU Leuven, au sujet de cette course passionnante.

L’essentiel : Les élections présidentielles turques se déroulent dans un climat de grande tension. Les deux principaux candidats sont au coude à coude. D’un côté, le président sortant Erdogan et de l’autre, Kemal Kilicdaroglu, le leader d’une alliance de six partis. Tous deux ont des points de vue totalement différents sur la politique intérieure et étrangère.

  • « Erdogan a introduit un système présidentiel fort. Cela signifie qu’en tant que président, il n’est pas seulement le chef de l’État, mais aussi le chef du gouvernement », déclare Dirk Rochtus. « Le poste de Premier ministre a été supprimé. Erdogan peut soumettre ses propres propositions, qui sont ensuite adoptées sans autre forme de procès. »
  • « Kilicdaroglu souhaite rétablir l’État de droit, le poste de Premier ministre, redonner plus de poids au parlement et garantir l’indépendance de la justice. Il juge inacceptable que de nombreuses personnes soient emprisonnées en raison de leurs opinions politiques et souhaite qu’elles soient à nouveau libérées ».

Réfugiés syriens

  • « Beaucoup ne sont probablement pas très sensibles à ce discours sur la démocratie. Mais cela entre en ligne de compte. Erdogan a persécuté des dizaines de milliers de personnes. Ces personnes seront certainement attentives à cet argument », ajoute Rochtus. « Mais c’est avant tout l’économie qui joue, et ensuite le sort des réfugiés syriens en Turquie. Cela pèse également sur la société et l’économie. »
  • « Ces réfugiés représentent un lourd fardeau pour la Turquie. Erdogan veut les transférer en Syrie. Kilicdaroglu veut faire de même, mais il a une approche plus humanitaire. Il estime qu’il est préférable que les réfugiés retournent en Syrie, mais il souhaite également aider la Syrie à faire face à la situation. Kilicdaroglu pense à une sorte de programme de reconstruction, qui pourrait impliquer l’Occident. »
  • « Il y a toujours eu une polarisation en Turquie au cours des 20 dernières années. 50% de la population était pour Erdogan et les 50% restants étaient contre lui. Si Kilicdaroglu réussit et commence à restaurer les libertés démocratiques, les personnes qui appartiennent au camp pro-Erdogan pourraient être tentées de le suivre à l’avenir. La réconciliation n’est donc pas exclue », conclut Rochtus.

(SR)

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