Après 11 paquets de sanctions européennes et presque autant du G7, l’économie russe est très loin d’un effondrement. Il faut dire que la Russie et son économie ont une longue histoire d’adaptation.
L’économie russe retrouve la croissance et déjoue les pronostics : « Dans un monde global, les sanctions sont un instrument du 19e siècle »

Pourquoi est-ce important ?
Ceux qui promettaient l'enfer en Russie seront déçus. L'économie russe plie, mais ne rompt pas, retrouvant même le chemin de la croissance. Les sanctions freinent le développement de l'économie russe, mais ne mettent certainement pas Moscou à genou. Les Russes sont eux-mêmes étonnés.La Russie s’adapte
Dans l’actu : Oleg Deripaska, l’un des oligarques les plus riches de Russie, se dit surpris par la résilience de l’économie russe.
- Dans le Financial Times, celui qui a fait fortune dans l’aluminium estime que les entreprises russes privées et de l’État ont su s’adapter.
- « J’ai été surpris que les entreprises privées soient si flexibles. J’étais plus ou moins sûr que jusqu’à 30 % de l’économie s’effondrerait, mais ce fut bien moins », a-t-il déclaré.
- « Le capitalisme d’État a créé des conglomérats massifs avec une faible productivité, de faibles taux d’utilisation et de bas salaires. Aujourd’hui, j’ai été surpris de constater que dans certaines de leurs usines, les salaires étaient similaires à ceux [des entreprises] que j’ai fondées dans la même région », a-t-il ajouté. « Ils ont de l’argent, ils recruteront, ils pourront faire face. »
- Les sanctions ? Elles sont d’un autre temps, selon l’oligarque, dans un monde globalisé : « Nous avons déployé tant d’efforts pour rendre le monde global, en termes de commerce, d’investissement, de flux d’informations […]. Les sanctions sont un instrument du 19e siècle. Elles ne sont pas efficaces au 21e siècle. »
- La faute aux pays du Sud qui ne suivent pas les sanctions occidentales ? « Vous savez, ces gens ont besoin de nourrir 1 milliard de personnes chaque jour, et vous leur demandez de s’engager ou de souffrir », questionne l’oligarque. « C’était une grave erreur de la part de ceux qui pensaient pouvoir utiliser ce mécanisme pour faire pression sur les régimes autocratiques. »
- « Sur le prochain milliard de personnes qui sont sur le point de naître, 70 % vivront dans cette région du monde. Faisons face à la réalité. Ils veulent le développement, ils ont besoin des ressources russes, des solutions russes, du commerce avec la Russie », a conclu Deripaska.
3 chiffres rassurants
Les détails : la résilience de l’économie russe en chiffres.
- Après quatre trimestres de contraction, l’économie russe a rebondi au 2e trimestre 2023, avec une croissance du PIB de 4,9%.
- Sur l’ensemble de l’année, la banque centrale revoit ses prévisions à la hausse avec une croissance de 1,5 à 2,5%, contre 0,5 à 2%, anticipés plus tôt cette année. Poutine s’est montré encore plus optimiste la semaine dernière, en annonçant une croissance de 2,8%.
- En 2024 et 2025, le FMI voit la croissance russe dépasser la croissance de la zone euro, à 1,5 et 1,3%.
- Le taux de chômage est seulement de 3% en Russie. Les entreprises ont toutes les difficultés à embaucher, ce qui augmente les salaires.
- Le commerce avec la Chine et l’Inde ont explosé. De 32 % au cours des huit premiers mois de 2023 pour atteindre 155 milliards de dollars en Chine. De 300% au cours de premier semestre pour atteindre 33 milliards de dollars en Inde, selon l’agence de presse officielle RIA Novosti.
3 signaux d’alerte
Mais : tous les feux ne sont pas au vert.
- Après un sommet de 18% l’année dernière, la décrue de l’inflation a été continue. Mais cette décrue semble aujourd’hui prendre fin : l’inflation russe est repartie à la hausse à 5,2% en août, contre 4,3% en juillet. C’est le niveau le plus élevé en six mois. L’objectif de la Russie est une inflation de 4%.
- En conséquence, une dévaluation monétaire du rouble, qui s’échange aujourd’hui à 96 roubles pour 1 dollar. L’autre cause de la dévaluation monétaire est la fuite des capitaux : 250 milliards de dollars depuis le début du conflit. La Banque centrale a dû réagir et a augmenté ses taux d’intérêt pour la première fois depuis le début du conflit et la hausse de 20% en février 2022.
- La Russie connait un déficit budgétaire de 2%. C’est assez rare que pour être souligné. La Russie n’avait plus connu de déficit en 20 ans. La cause est ici les sanctions sur les produits pétroliers, dont les revenus ont baissé de 40%, et l’approvisionnement européen en gaz qui tente d’éviter le gaz russe.
- Mais ce déficit pourrait bientôt prendre fin. En effet, le plafond du G7 contre le pétrole russe devient de plus en plus inefficace. Aujourd’hui, on estime que deux tiers du pétrole russe s’échangent au-dessus du plafond de 60 dollars.