Hier, lors d’un discours donné à l’occasion de la Global Investment Conference de Londres, le président de la Banque Centrale Européenne, Mario Draghi, a envoyé le signal que les marchés attendaient depuis des semaines : «La BCE est prête à faire tout ce qu’il faudra pour préserver l’euro ». Et d’ajouter : « Et croyez moi, ce sera suffisant ». Il indiquait de cette manière que la BCE serait prête à acheter des obligations espagnoles et italiennes en cas de nécessité.
Les marchés ont immédiatement réagi à cette déclaration : les taux des obligations espagnoles à 2 ans, ont perdu 72 points pour repasser à 5,47% en moins d’une heure, et on a observé la même chose sur les obligations italiennes. Mais le fait est que l’on ne sait pas encore quelle sera la nature de l’intervention de la BCE.
Certains analystes évoquent un « bluff » pour « passer l’été », et ils estiment que l’euphorie ne durera pas à moins que la BCE ne prenne des mesures concrètes. Elle doit pour ce faire « explorer la flexibilité de son mandat », qui lui interdit normalement d’accorder des prêts directs aux Etats souverains. En outre, le marché a appris à se méfier du risque de subordination, c’est-à-dire du fait que les instances européennes se déclarent créanciers privilégiés lorsqu’elles accordent des prêts, et qu’elles exigent d’être remboursées en priorité, augmentant le risque relatif des autres créanciers. Ce risque est devenu concret lorsque la Grèce a réalisé des « coupes de cheveux » sur ses dettes auprès du secteur privé. Cela signifie qu’une aide de la BCE ne sera bien accueillie que si ses clauses de remboursement sont inconditionnelles.
Le FMI a proposé que la BCE organise un vaste QE (quantitative easing), pour sortir la zone euro de la crise. La BCE ne renouvellera probablement pas l’expérience du LTRO, ces 1000 milliards d’euros de prêts à taux faible qu’elle avait émis à l’adresse des banques entre décembre 2011 et février 2012. Il s’est avéré depuis que ceux-ci n’avaient pas eu que des bénéfices. Les banques espagnoles et italiennes s’en sont servies pour acheter des obligations italiennes qui ont depuis chuté en valeur, ce qui leur a causé des pertes, et les a fragilisées, les mettant en difficulté pour rembourser leurs propres dettes.
Pour le professeur Tim Congdon, c’est du côté de la politique européenne qu’il faut rechercher les causes de cette crise. Il estime que forcer les banques à renforcer leurs capitaux propres de 9% est bien trop rapide, et que c’est ce qui a provoqué le credit crunch. « Les prêts se réduisent du fait d’une perturbation règlementaire inappropriée. Il est déraisonnable de demander aux banques de réduire leurs actifs en risque au moment d’une récession », dit-il.