La Lituanie a-t-elle mis le feu à la Baltique ? C’est ce que considèrent les Russes devant la décision de la république balte de bloquer le trafic ferroviaire entre Kaliningrad et le reste de la Russie. Une manière de mettre la pression sur cette enclave stratégique qui, à Moscou, risque bien de ne pas passer.
C’est une nouvelle situation potentiellement explosive qui se dresse à l’est de l’Europe : les autorités lituaniennes ont interdit le transit de marchandises issues de l’enclave russe de Kaliningrad et sanctionnées par l’Union européenne sur leur territoire. De facto, la république balte a donc interdit le transfert de biens entre la Russie proprement dite et l’une de ses provinces et, celle-ci étant coincée entre la Pologne et la Lituanie, elle se retrouve bien isolée du reste de sa patrie.
Les trains ne passeront plus
Les Lituaniens bloquent ainsi le trafic ferroviaire destiné à transporter le charbon, le métal, les matériaux de construction et les équipements de haute technologie entre Kaliningrad et le cœur de la Russie, contraignant les autorités russes à opter pour le passage maritime en Baltique. Le gouverneur de l’oblast de Kaliningrad, Anton Alikhanov, a estimé que la moitié des importations de son enclave seraient affectées par ces sanctions.
Évidemment, les Russes n’ont pas manqué de réagir : le Kremlin a jugé que cette interdiction était illégale, car la Russie et la Lituanie ont signé un traité en 1993, qui stipule que la Russie peut transporter librement des marchandises sur le territoire lituanien. Mais l’Union européenne a rétorqué que, comme ces marchandises transitaient sur son territoire, elles peuvent faire l’objet d’une interdiction.
Depuis, le ton monte : le ministère russe des Affaires étrangères a convoqué le principal envoyé de la Lituanie à Moscou pour lui adresser une protestation, rapporte Euractiv.
Une décision « ouvertement hostile »
« La situation est plus que sérieuse », a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. « Cette décision est vraiment sans précédent. C’est une violation de tout ». Le ministère russe des Affaires étrangères a demandé à Vilnius de revenir immédiatement sur ce qu’il considère comme une décision « ouvertement hostile. »
« Si le transit de marchandises entre la région de Kaliningrad et le reste de la Fédération de Russie via la Lituanie n’est pas entièrement rétabli dans un avenir proche, la Russie se réserve le droit de prendre des mesures pour protéger ses intérêts nationaux », a-t-il déclaré.
Une base économique et stratégique
Sans surprise, le gouvernement ukrainien a salué la décision de la Lituanie d’ainsi interrompre le trafic entre la Russie proprement dite et Kaliningrad. Cette région est en effet stratégiquement très importante pour Moscou : prise sur l’Allemagne nazie en 1945, cette ville qui s’appelait autrefois Koenigsberg est un port important, le seul débouché russe sur la Baltique qui n’était jamais pris dans les glaces, et qui joue un rôle important pour le commerce maritime et l’industrie de la pêche. En outre, l’oblast sert de port d’attache à la flotte russe de la Baltique et abrite de nombreuses troupes ainsi que des missiles stratégiques.