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C’est reparti : Israël se rend aux urnes pour la cinquième fois en moins de quatre ans mardi. Va-t-on assister au retour de Netanyahou ?

Le 1er novembre, Israël connaîtra sa cinquième élection parlementaire en 43 mois. Et comme pour les quatre précédentes, il semble que les Israéliens ne soient toujours pas en mesure de prendre une décision ferme sur qui devrait diriger le pays. Les électeurs sont confrontés à un choix entre le bloc des partis de droite de Benjamin « Bibi » Netanyahou et la coalition gouvernementale des partis de droite, centristes et de gauche, dirigée par le Premier ministre démissionnaire Yair Lapid. Ou bien, les élections auxquelles participent pas moins de 40 partis pourraient déboucher sur une nouvelle coalition autour de Benny Gantz, l’actuel ministre de la Défense et ancien chef d’état-major de l’armée. Pour Netanyahou, il s’agit peut-être de la dernière chance de redevenir Premier ministre. Et pour cela, il devra forger de nouvelles alliances très controversées.

Le dernier mandat de Netanyahou, entaché de scandales, a pris fin en juin 2021, après la formation d’une coalition de huit partis qui n’avaient pas grand-chose en commun, si ce n’est le désir de mettre fin au règne de Bibi et de son parti, le Likoud. Pendant son année en tant que chef de l’opposition, Netanyahou a profité des divisions de la coalition et a encouragé les partis d’opposition à voter contre tout projet de loi proposé par le gouvernement.

La coalition anti-Netanyahou s’est effectivement effondrée cet été après avoir perdu sa très mince majorité. Résultat : la semaine prochaine, Israël tiendra sa cinquième élection en moins de quatre ans. Les sondages prévoient que le bloc de droite et de partis religieux de Netanyahou ne parviendra pas à obtenir la majorité à la Knesset, mais l’ancien Premier ministre a forgé de nouvelles alliances controversées dans sa tentative de retour au pouvoir.

Ben-Gvir : du phénomène d’extrême-droite au faiseur de roi ?

L’alliance la plus controversée est celle passée avec Itamar Ben-Gvir et son parti Otzma Yehudit. Pendant plus d’un quart de siècle, Ben-Gvir, âgé de 46 ans, n’était connu que comme un phénomène marginal d’extrême droite en Israël. C’est un admirateur de Meir Kahane, un extrémiste israélo-américain assassiné en 1990 qui, entre autres, voulait priver les Israéliens arabes de leur citoyenneté, séparer les espaces publics en Israël pour les Juifs et les Arabes et interdire les mariages entre Juifs et non-Juifs. Ben-Gvir a construit sa carrière juridique en défendant des accusés juifs accusés de terrorisme et de crimes haineux, et a lui-même été accusé plus de 50 fois de sédition. Après plusieurs tentatives pour devenir membre de la Knesset, il y est parvenu en 2021, lorsque son alliance a remporté six sièges aux élections. Depuis lors, il est devenu de plus en plus populaire.

Aujourd’hui, Ben-Gvir dit avoir pris ses distances avec les idées les plus extrêmes de Meir Kahane. Il a demandé à ses partisans de chanter « mort aux terroristes ! » au lieu de « mort aux Arabes ! ». Il ne soutient plus l’expulsion de tous les Arabes, mais seulement de ceux qu’il appelle des terroristes. Mais la sincérité de Ben-Gvir sur ce point a été mise en doute en septembre par un membre important de son parti. Dans une vidéo ayant fait l’objet d’une fuite, Almog Cohen, a présenté la nouvelle apparence modérée de son leader comme un « stratagème électoral ». Et puis il y a eu sa visite le mois dernier dans un quartier palestinien de Jérusalem-Est où il a encouragé la police à ouvrir le feu sur des lanceurs de pierres palestiniens tout en sortant son arme de manière démonstrative.

Sorti de scène

Ben-Gvir devrait obtenir le troisième plus grand nombre de voix lors des élections de la semaine prochaine. Son ascension est en partie due à Netanyahou, qui a courtisé l’extrême droite ces dernières années et aurait promis à l’ancien avocat un poste de ministre dans son prochain gouvernement. Mais en même temps, la popularité croissante de Ben-Gvir agace Netanyahou. Lors d’un événement électoral la semaine dernière, des agents de sécurité ont escorté le partenaire de coalition potentiel hors de la scène avant l’apparition de Netanyahou, afin que l’ancien Premier ministre puisse éviter d’être photographié avec Ben-Gvir.

Robert Menendez, président de la commission des Affaires étrangères du Sénat américain, aurait averti Netanyahou que l’inclusion de politiciens d’extrême droite dans un éventuel futur gouvernement nuirait aux relations entre Washington et Tel Aviv.

Le problème de Yair Lapid

La question de savoir si une coalition peut encore émerger pour bloquer Netanyahou après les prochaines élections dépend du résultat final et du puzzle complexe de la répartition des sièges entre les 40 partis participant au scrutin. Quoi qu’il en soit, la coalition sortante entre le Premier ministre Yair Lapid, un centriste, et l’ancien Premier ministre Naftali Bennett, un ancien dirigeant de droite dans les territoires occupés, semble peu susceptible de se répéter.

Bennett a annoncé qu’il prenait de toute façon ses distances avec la politique. Ce qui reste de son parti Yamina pourrait ne pas obtenir suffisamment de sièges pour entrer au Parlement.

Lapid espère que ses alliés de gauche, notamment les vestiges du Parti socialiste des travailleurs d’Israël, autrefois dominant, ainsi que les partis représentant les immigrés russes et d’Europe de l’Est, lui permettront de se rapprocher d’une majorité. Toutefois, pour franchir ce seuil, Lapid pourrait également avoir besoin d’un soutien renouvelé des partis représentant les citoyens palestiniens d’Israël, qui représentent environ 20% de la population. C’est l’un de ces partis, Ra’am, une faction islamiste conservatrice, qui a rendu la coalition possible la dernière fois. Mais la participation de Ra’am était de toute façon controversée parmi les Palestiniens. Les partis arabes sont également plus divisés que jamais et devraient rester bien en deçà de leur score de 2019, où ils ont remporté 15 sièges.

Option numéro trois : Benny Gantz

Une nouvelle coalition pourrait émerger autour de Benny Gantz, l’actuel ministre de la Défense et ancien chef d’état-major de l’armée. Il peut s’appuyer sur les membres mécontents du Likoud et d’autres personnes – y compris certains colons juifs de Cisjordanie – qui veulent un gouvernement de droite mais en ont assez de Netanyahou. Gantz a également cherché à se rapprocher des partis ultra-orthodoxes. Ces partis haredim, qui ont vu leur influence sur les questions sociales et le soutien financier aux érudits talmudiques s’éroder sous le gouvernement actuel, pourraient être prêts abandonner Netanyahou si celui-ci se retrouve à nouveau bloqué.

Ce sera de toute façon la dernière tentative de retour de Netanyahou, prédisent les analystes politiques. Bibi a 72 ans et a été hospitalisé pendant la nuit au début du mois après s’être plaint de douleurs thoraciques (il est apparu dans une vidéo le lendemain matin dans laquelle il faisait un bref jogging et disait être en bonne santé). Outre son état de santé, la pression est également de plus en plus forte au sein de son propre parti, le Likoud, où il a été suggéré qu’il serait plus facile d’obtenir une majorité avec un leader moins polarisant. On s’attend à ce que, si Netanyahou perd cette fois-ci, des voix s’élèvent au sein du Likoud pour lui demander de démissionner de son poste de chef de parti.

(OD)

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