De nombreux ouvrages et analyses ont été publiés sur le prétendu déclin de l’Occident, souvent opposé à la prétendue montée en puissance des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud).
« All BRICS, no mortar » : la nécrologie de l’Occident est aussi prématurée qu’exagérée

Pourquoi est-ce important ?
Malgré leur critique commune de la domination occidentale, outre leur laxisme en matière de droits de l'homme, les BRICS n'ont pas de modèle politico-idéologique commun. L'Occident a aussi ses désaccords internes, bien sûr, mais ceux-ci semblent minimes par rapport aux grandes différences qui existent au sein des BRICS.Dans l’actu : lors du sommet annuel des BRICS, qui s’est tenu à Johannesburg, en Afrique du Sud, il a été décidé d’élargir le bloc des cinq pays à six nouveaux membres.
- À partir du 1er janvier 2024, l’Iran, l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis rejoindront les BRICS.
- Le fait que les ennemis jurés que sont l’Iran et l’Arabie saoudite fassent partie du même club en dit déjà long sur la cohésion de l’alliance.
- Le bloc de cinq pays, qui s’étendra donc bientôt à onze, n’est donc toujours qu’un acronyme qui sonne bien inventé par un économiste de Goldman Sachs en 2001.
- La seule chose qui relie ces pays reste leur aversion pour le dollar. Il est intéressant de noter qu’à partir du 1er janvier 2024, six des neuf plus grands producteurs de pétrole au monde feront partie des BRICS.
All BRICS, no mortar
Zoom avant : « All BRICS, no mortar » (« beaucoup de briques, pas de mortier ») est une formule souvent entendue. Cela veut dire que le bloc s’appuie davantage sur une construction médiatique émotionnelle que sur la réalité économique.
Car les chiffres, eux, ne mentent jamais :
- Le dollar reste dominant dans le commerce mondial. 40% des transactions sont réglées dans cette devise. L’euro suit avec 38%.
- La New Development Bank, financée par les BRICS, ne fait guère le poids face à la Banque mondiale avec ses 33 milliards de dollars de projets depuis 2014. Cette dernière a financé plus de 71 milliards de dollars de projets pour la seule année 2022.
- D’un point de vue économique, les pays BRICS présentent de grandes différences. Parmi ces pays, seule la Chine a connu une croissance économique plus rapide que celle des États-Unis au cours des dix dernières années. Calculé sur la base du PIB réel en prix constants. La croissance de 8% de l’Inde est inférieure à celle des États-Unis, dont le PIB a augmenté de 26%. Alors que l’Afrique du Sud (-47%), la Russie (-52%) et le Brésil (-65%) ont vu leur économie se contracter par rapport aux États-Unis.
- Même si la Chine, premier émetteur mondial de CO2, a fait des progrès impressionnants dans les domaines de la biotechnologie et du numérique, la plupart de ses concepts commerciaux sont des adaptations des idées américaines, pas vraiment des innovations.
- En matière de domination commerciale mondiale , seules 23 sociétés des BRICS figurent dans la liste Fortune Global 500 . Un contraste frappant avec les 122 entreprises américaines et les 53 de l’Union européenne.
- Malgré leur perception commune, les pays BRICS ne partagent pas nécessairement des valeurs communes. Le modèle autoritaire de la Chine est aussi différent de l’éthos démocratique de l’Inde que l’oligarchie russe l’est de la dynamique démocratie brésilienne.
Plus grand ne veut pas nécessairement dire meilleur
Zoom arrière : ce n’est pas parce qu’on agrandit un groupe qu’il s’améliore. Le G20, qui a succédé au G7 en tant que principale plate-forme de consultation économique en 2008 lors de la crise financière mondiale, continue également de se débattre avec des divergences d’opinions profondément enracinées. L’augmentation du nombre de membres n’a pas nécessairement un impact sur la recherche d’un consensus. Au contraire. Un groupe qui veut être pris au sérieux à l’échelle mondiale doit d’abord trouver un accord interne. Quelque chose qui manque encore aux BRICS pour l’instant.
(OD)