Un proche allié de Poutine a confirmé fin avril que la Russie souhaitait soutenir la valeur du rouble avec de l’or et d’autres matières premières.
Mardi 26 avril, le journal russe Rossiyskaya Gazeta a publié une interview de Nikolai Patrushev, secrétaire du Conseil de sécurité de la Russie et proche allié de Poutine. Dans cet article, Patrushev a confirmé une chose que de nombreux experts soupçonnaient depuis un certain temps : la Russie travaille officiellement sur un projet visant à soutenir le rouble avec de l’or et d’autres matières premières.
Le Conseil de sécurité de la Russie est présidé par Poutine lui-même, et Patrushev en est le secrétaire. Le vice-président du Conseil est l’ancien président russe et premier ministre Dmitri Medvedev. Le ministre des Affaires étrangères, Sergei Lavrov, siège également au sein de cet organe. Ainsi, lorsque l’ancien directeur du FSB, Nikolai Patrushev, fait cette déclaration, il s’agit d’un message soutenu par les hautes sphères du gouvernement russe.
Patrushev : « La souveraineté n’est possible que si elle n’est pas rattachée au dollar »
L’analyste des matières premières Ronan Manly a traduit un morceau de l’interview russe pour montrer quels sont les plans de Patrushev.
En effet, lorsque le journal a demandé à Patrushev ce qu’il fallait faire pour assurer l’indépendance du rouble, il a répondu comme suit : « Pour qu’un système financier national soit souverain, ses moyens de paiement doivent avoir une valeur intrinsèque et une stabilité des prix, sans être rattachés au dollar. [Il est proposé de fixer la valeur du rouble, en la couvrant à la fois par de l’or et par un groupe de marchandises, afin d’aligner le taux de change du rouble sur sa parité réelle de pouvoir d’achat ».
M. Patrushev estime également dans l’interview que la Russie ne serait pas opposée à une participation à l’économie de marché mondiale, mais affirme que le pays est « conscient que l’Occident n’accepte des pays comme partenaires que lorsque cela est rentable pour eux ».
Par conséquent, selon M. Patrushev, la Russie va déplacer son attention économique des marchés européens vers une plus grande coopération avec les marchés africains, asiatiques et latino-américains. « Nous intensifions notre coopération avec les pays des BRICS et de l’OCS, qui représentent ensemble quelque trois milliards et demi de personnes sur cette planète », peut-on lire.
Début de Bretton Woods III
La Russie envisage en fait de lancer un nouveau système monétaire multilatéral basé sur l’or et les matières premières, écrit Manly. Selon lui, cela marquerait en fait le début d’une ère de Bretton Woods III.
Durant la première période de Bretton Woods (1944 à 1971), la monnaie était adossée à l’or. Depuis la deuxième ère de Bretton Woods (1971 à aujourd’hui), le dollar est soutenu par de la « monnaie interne », c’est-à-dire des obligations du gouvernement américain. Le stratège en chef du Credit Suisse et ancien banquier de la Réserve fédérale, Zoltan Pozsar, a affirmé en mars qu’une future troisième ère de Bretton Woods sera caractérisée par une « monnaie extérieure », c’est-à-dire une monnaie adossée à l’or et à d’autres matières premières.
La Banque centrale de Russie a déjà proposé d’acheter de l’or aux banques russes au prix fixe de 5.000 roubles par gramme à la fin du mois de mars. C’était la première étape de l’arrimage du rouble à l’or, estime Manly. Cette mesure donne au rouble un prix plancher et agira comme un catalyseur pour renforcer le rouble par rapport au dollar américain.