Les automobilistes européens ne sont pas vraiment intéressés par les voitures électriques, a affirmé Klaus Frölich, responsable de la recherche et du développement chez BMW. D’après lui, ce sont surtout les gouvernements qui alimentent le battage médiatique pour faire progresser les ventes.
« En gros, il y a de la demande [pour les voitures électriques] de la part des organismes de réglementation, mais aucune demande de la part des clients », a dit Frölich. BMW pourrait « inonder » l’Europe avec un million de voitures électriques si les pouvoirs publics mettaient en place des incitations importantes, mais dans le cas contraire, « les Européens n’achèteront jamais ces machins », a-t-il affirmé.
Uniquement pour les Chinois et les Californiens
D’après lui, les véhicules électriques « coûtent plus cher en termes de matières premières pour les batteries » que les voitures à moteur thermique ou hybrides. Il a ajouté que ces coûts « pourraient encore s’apprécier davantage à mesure que la demande pour ces matières premières augmente ».
« D’après ce que nous voyons, [les véhicules électriques] sont destinés à la Chine et à la Californie. Partout ailleurs, on préfère des véhicules hybrides rechargeables dotés d’une bonne autonomie pour la partie électrique », a déclaré M. Fröhlich. Il a ajouté qu’il s’attend à ce que les moteurs diesel survivent encore au moins 20 ans, et les moteurs à essence au moins 30 ans.
Remarquablement, l’ingénieur a fait ces déclarations fracassantes alors qu’il participait à un salon au cours duquel BMW s’est vanté de son avance considérable dans le domaine de la technologie électrique. Le cosntructeur allemand a en effet annoncé qu’il allait accélérer le lancement de toute une gamme de voitures hybrides ou totalement électiques, d’ici 2023. Il a également présenté des nouveaux modèles de véhicules hybrides ou électriques, et a indiqué qu’il avait récemment vendu sa 400 000e voiture à technologie hybride ou électrique.
Une infrastrcuture débile
Toutefois, Frölich a expliqué pourquoi les consommateurs semblaient si réticents à l’égard de ces technologies. Il a pointé les lacunes de l’infrastructure, qui font qu’il peut être encore risqué de se lancer dans un long trajet en Europe sans être certain que l’on trouvera des stations de charge disponibles régulièrement tout au long de son parcours… De plus, la batterie de ces véhicules leur confère une autonomie plus faible que celle que les véhciules conventionnels obtiennent avec un plein de carburant, que l’on réalise en quelques minutes, contre plusieurs heures pour la charge d’un véhicule électrique. A ces égards, et compte tenu du dense réseau de stations service dans tous les pays européens, les voitures à moteur thermiques présentent un avantage imparable par rapport aux véhicules électriques.
De même, compte tenu de la nouveauté de la technologie, les propriétaires de voitures électriques n’ont aucune idée de la valeur de revente de leur voiture à terme, et n’ont donc aucune idée de leur rentabilité. Et cela d’autant que l’utilisation de l’électricité reste assez coûteuse. « A Munich, un kilowattheure d’électricité coûte 50 centimes », précise-t-il. « Une voiture électrique a donc un coût de fonctionnement nettement supérieur à celui d’une voiture à moteur diesel traditionnel. »
Des efforts insuffisants des pouvoirs publics
C’est pourquoi il juge insuffisants les efforts que les gouvernements déploient pour promouvoir la vente de voitures électriques au grand public.
D’après lui, la solution pourrait venir des voitures hybrides. En effet, comme ces voitures ont aussi moteur thermique, elles disposent de bonnes puissance et autonomie, tout en bénéficiant de la possibilité de se déplacer sans émissions, sur de petits trajets, par exemple. A court terme, il semble d’ailleurs que BMW ait décidé de se concentrer sur les technologies hybrides.
L’année dernière, les constructeurs automobiles européens ont vendu à peine 302 000 voitures électriques, contre… 8,5 millions de voitures équipées de moteurs à essence ont été vendues en Europe. Les ventes de ces dernières ont progressé de 11,8% par rapport à l’année précédente.
Les déclarations de Frölich ne sont pas passées inaperçues, mais ce n’est pourtant pas le premier signal négatif envoyé à l’encontre des voitures électriques. Les ventes décevantes du constructeur américain Tesla au cours du 1er trimestre 2019 étaient déjà révélatrices. De même, il n’est pas non plus le premier à lancer un appel pour de meilleures incitations des pouvoirs publics en faveur de cette technologie. Le patron de PSA, qui préside aussi l’Association des constructeurs européens, a déjà réclamé une participation des gouvernements à la création d’un réseau étoffé de bornes de recharge.