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Après les diamants, la Vivaldi va finalement s’attaquer aux fonds russes détenus chez Euroclear, mais De Croo prône « la prudence »

Après les diamants, la Vivaldi va finalement s’attaquer aux fonds russes détenus chez Euroclear, mais De Croo prône « la prudence »
Le Premier ministre Alexander de Croo lors de sa visite à Kiev – Getty Images

La Commission européenne, en partenariat avec le gouvernement fédéral, espère finaliser avant la fin de l’année un dispositif pour rediriger vers l’Ukraine les actifs russes actuellement gelés chez Euroclear. Le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld), en contact étroit avec Ursula von der Leyen, présidente de la Commission, et Didier Reynders, Commissaire européen à la Justice, souligne l’importance pour la Belgique de cibler non pas les actifs en tant que tels (environ 196,6 milliards d’euros de fonds russes, dont 180 milliards d’euros de la Banque centrale russe), mais plutôt les profits accumulés depuis le début du conflit. Toutefois, De Croo met en garde : « Si des mesures radicales sont prises, il ne faudrait pas s’étonner qu’un nouveau système soit adopté dans une décennie par des pays se détachant du monde occidental. » Concrètement, l’UE envisagerait de mettre en place un cadre légal pour augmenter l’imposition sur ces profits, passant l’impôt des sociétés de 25 % à 100 %. Cette somme serait alors allouée à l’Ukraine via un fonds d’aide. Selon la présidence espagnole de l’UE, ce mécanisme pourrait rapporter entre 15 et 17 milliards d’euros. Reste à savoir si la Belgique va prendre des initiatives supplémentaires en faveur de l’Ukraine, sachant que jusqu’à présent, l’aide apportée par le gouvernement Vivaldi à Zelensky a été intégralement financée par ces « superprofits » d’Euroclear.

Dans l’actualité : La mise en place effective des sanctions sur les diamants russes est accueillie avec enthousiasme par le gouvernement fédéral, d’autant plus qu’Anvers en tire finalement profit.

Les détails : L’autre dossier majeur concernant les intérêts belges dans le conflit russo-ukrainien, celui d’Euroclear, devrait connaître une accélération dans les prochaines semaines.

  • Des annonces réjouissantes ont été faites concernant la nouvelle réglementation du commerce mondial des diamants. Le Premier ministre De Croo avait annoncé en septembre à New York, lors d’une réunion avec les acteurs du secteur, que cette réglementation était finalisée. Une visioconférence du G7 a formellement confirmé l’accord hier.
  • Le G7 et l’UE mettront en place un système commun pour tracer l’origine des diamants bruts grâce à la blockchain. Ce dispositif permettra d’appliquer un embargo sur les diamants russes, conformément aux souhaits de l’Occident en raison du conflit ukrainien. Deux hubs, la Belgique (via Anvers) et le Canada, joueront un rôle clé dans ce système.
  • C’est un pas symboliquement important : Alrosa, une entreprise publique russe dirigée par Vladimir Poutine et deuxième producteur mondial de diamants après De Beers, réalise un chiffre d’affaires annuel de près de 4 milliards d’euros. En pratique, une grande partie des diamants russes a déjà été redirigée vers la Chine, devenue un marché alternatif pour la Russie.
  • Le système, mis en place par la société fédérale d’investissement SFPIM et l’entreprise de blockchain Unbox, devrait apporter une plus grande transparence dans le commerce des diamants, à condition qu’il soit efficace. La banque KBC est prête à réinvestir dans le financement du secteur du diamant, les banques belges s’étant retirées en raison des risques de blanchiment d’argent.
  • Ce système sera pleinement opérationnel dès septembre 2024 et pourrait à terme s’étendre au-delà des diamants russes, étant donné que le secteur dans son ensemble est confronté depuis des années à la problématique des « blood diamonds ». Il pourrait même être adapté à d’autres secteurs complexes, comme le commerce de l’art, où la provenance joue un rôle crucial dans l’évaluation de la valeur et où la fraude est monnaie courante.
  • De Croo voit dans cette initiative la preuve que « la Belgique a son mot à dire au plus haut niveau sur des secteurs vitaux ». Hier, il a ajouté : « Cela offre à Anvers une opportunité unique de devenir le centre mondial du commerce de diamants éthiques ».

L’essentiel : La Belgique a considérablement bénéficié de la guerre en Ukraine sur le plan budgétaire.

  • Au-delà du secteur du diamant, la Belgique joue un rôle prépondérant et unique dans le financement du conflit en Ukraine. Par l’intermédiaire de la chambre de compensation Euroclear, basée à Bruxelles, une quantité impressionnante de titres, d’investissements et d’autres actifs russes sont conservés.
  • En 2022, cela représentait 196,6 milliards d’euros d’avoirs russes gelés, dont 180 milliards provenant de la banque centrale russe. Mais ce montant continue de croître : Euroclear investit ces actifs avec un risque minimal, générant ainsi des bénéfices supplémentaires. Pour cette année, on estime que cela pourrait s’élever à environ 3 milliards d’euros, basé sur les 734 millions d’euros d’intérêts générés uniquement au premier trimestre de 2023.
  • C’est sur ces profits que la Belgique a soudainement obtenu un surplus de revenus, grâce à l’impôt sur les sociétés fixé à 25 %. Ces centaines de millions supplémentaires dans le budget, estimés à 625 millions d’euros cette année, sont « entièrement utilisés pour soutenir l’Ukraine », a expliqué le gouvernement Vivaldi.
  • « Tout l’argent est redirigé vers eux », tel a toujours été le principe. Cependant, d’autres pays de l’UE critiquent, estimant qu’il est « facile » d’annoncer un fonds de soutien à l’Ukraine de 1,6 milliard pour les années à venir. Car jusqu’ici, tout le soutien apporté par la Belgique a été intégralement financé par ces superprofits d’Euroclear : il ne s’agit donc pas réellement d’un « don belge » ou d’un effort du gouvernement fédéral.

À venir : Une décision concernant les fonds russes d’Euroclear doit être prise cette année.

  • Au sein de la Commission européenne, l’idée d’utiliser ces fonds russes est envisagée depuis quelque temps. Nombre de pays de l’UE souffrent des milliards dépensés en raison du conflit. L’UE envisage également de fournir 40 milliards d’euros d’aide supplémentaire et 15 milliards d’aide militaire à Kiev. Ainsi, ces fonds russes gelés pourraient être utiles. L’Espagne, qui préside le Conseil de l’UE jusqu’à fin de cette année, a un plan pour récupérer 15 à 17 milliards d’Euroclear et d’autres comptes gelés.
  • Mais le sujet est extrêmement sensible. « Il faut surtout le faire correctement », nous confie le Premier ministre De Croo.
    • « Nous collaborons avec la Commission, qui souhaite boucler cela avant la fin de l’année. J’ai récemment discuté avec von der Leyen pour déterminer la meilleure façon de procéder. Et nous travaillons également en étroite collaboration avec Didier Reynders, le Commissaire à la Justice, sur ce dossier. »
    • « Il y a deux aspects : le rendement des actifs et les actifs eux-mêmes. Sur le rendement, les profits, nous prélevons actuellement une taxe de 25 %. Mais cela pourrait être revu à la hausse, et de manière significative. C’est une certitude. »
    • « Mais cela nécessiterait un cadre légal. Il faut agir à l’échelle européenne. »
  • La véritable question au sein de l’UE est donc de savoir quelle part des fonds russes sera effectivement mobilisée. Les Ukrainiens souhaitent simplement tout récupérer. Mais pour De Croo, cela n’est pas envisageable.
  • « En effet, il y a une discussion sur les actifs eux-mêmes. Nous avons toujours prôné la prudence. Car il s’agit des ressources d’une banque centrale. Si on commence à y toucher, cela pourrait engendrer divers risques. »
  • « Il est essentiel d’utiliser les profits russes pour soutenir l’Ukraine. Mais il est tout aussi prioritaire de maintenir Euroclear ici. Pour cela, Euroclear doit continuer à fonctionner comme un système global. »
  • « Si on commence à manipuler les actifs eux-mêmes de manière imprudente, il ne faut pas s’étonner que dans dix ans, un autre système soit adopté par des pays qui choisiraient de se détacher du monde occidental. »
  • Cela s’inscrit dans la stratégie de De Croo, qui souhaite se présenter comme un Premier ministre influent sur la scène mondiale, défendant fermement les intérêts belges. La prochaine présidence de l’UE ne fera que renforcer cette image. Demain, De Croo et la ministre des Affaires étrangères Hadja Lahbib (MR) présenteront les priorités de la présidence belge de l’UE.
  • Les grandes lignes seront axées sur une « Europe plus sûre, plus forte et plus verte », comme l’a révélé Lahbib lors d’une conférence à Saint-Louis, rapporte Le Soir. L’accent de la présidence sera mis sur la première moitié de ces six mois : le Parlement européen fermera ses portes le 25 avril, et au début de 2024, on espère conclure de nombreux accords législatifs : 154 textes sont encore en attente. Le Conseil européen (sous présidence belge) et le Parlement devront trouver des compromis.

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