Pas moins de 6 compagnies aériennes européennes (la Danoise Primera, les Suisses PrivatAir et Skywork Airlines, la Lituanienne Small Planet, l’Allemande Azur Air et la Belge VLM Airlines) ont déposé le bilan depuis le mois de juin 2018. Malgré cela, le secteur ne s’est pas assaini, et les autres compagnies demeurent en grandes difficultés, rapporte Bloomberg.
Les compagnies nordiques, en particulier, sont confrontées à de grandes difficultés. Les Islandaises Wow Air et Icelandair Group,sont confrontées à la concurrence féroce des plus grosses compagnies, qui les obligent à baisser le prix de leurs billets, et à la forte volatilité des cours du pétrole. En conséquence, il leur est de plus difficile de maîtriser leur budget.
Contrairement à l’Amérique du Nord, le marché demeure atomisé en Europe
Norwegian Air Shuttle, qui est très endettée, traverse aussi une période très délicate, qui fait d’elle une proie facile pour une OPA. Alitalia est insolvable depuis un an et demi et la Britannique Flybe est à la recherche d’un acheteur. Même les compagnies qui étaient florissantes, telles que Finnair Oyj, voient le cours de leurs actions chuter en raison de la frilosité des investisseurs.
Par contraste, les compagnies aériennes américaines ont réalisés des bénéfices records, grâce à des opérations de consolidation qui ont permis aux plus grandes d’entre elles (American Airlines, Delta et United Continental), de reprendre le contrôle sur les prix.
Selon Skuli Mogensen, fondateur de Wow Air, ce sont encore les compagnies low-cost Ryanair, EasyJet et Wizz Air qui fixent les règles du jeu sur le marché européen, ce qui conduit à restreindre les marges des autres compagnies. Or, ces compagnies sont très concurrentielles, et se développent rapidement, ce qui rend le marché européen très agressif. En Amérique du Nord, la consolidation a eu pour effet de limiter la concurrence.
Une évolution défavorable du marché pour des petites compagnies isolées
En effet, le marché européen est dominé d’une part par les trois grands groupes formés des transporteurs nationaux historiques British Airways, Air France et Lufthansa, issus de la fusion de 9 anciennes compagnies nationales. A côté, on trouve les vedettes du low-cost, des compagnies indépendantes qui ont réussi à bien s’implanter. Les petites compagnies, en particulier les nordiques, se retrouvent donc isolées. La volonté de grossir rapidement de Norwegian Airways a mis la pression sur ses homologues nordiques, notamment Icelandair and Wow, qui, comme elle, opèrent sur le créneau des longs-courriers low-cost, ce qui a érodé leurs marges, et les a fragilisées.
En effet, ces compagnies ont toutes été confrontées à une évolution défavorable de leur marché : une intensification de la concurrence, et surtout, une forte hausse des cours du pétrole. Les cours ont commencé à redescendre, mais ils ont presque doublé dans le courant du premier semestre de cette année. En conséquence, ces compagnies audacieuses se sont toutes retrouvées piégées entre la flambée du prix du carburant, et la nécessité de baisser le prix de leurs billets pour continuer d’attirer les passagers. En outre, certaines d’entre elles doivent payer leur personnel en devises étrangères, ce qui a augmenté leurs coûts salariaux.
Une crise de surcapacités
Mais les compagnies sont aussi confrontées à une surcapacité de sièges qui déprime les prix des billets. L’Association du transport aérien international (Iata) prévoit une hausse de 10 % des bénéfices du secteur mondial de l’aviation en 2019, ce qui devrait les porter à 35,5 milliards de dollars. Mais les compagnies européennes devront s’attendre à une baisse des leurs, en raison de la concurrence accrue, et de contrats de carburant conclus au moment où les cours du pétrole étaient au plus haut. Ainsi, les recettes en Amérique du Nord devraient représenter le double de celles de l’Europe, alors que le trafic aérien est très comparable, puisqu’il est dominé dans chacune d’elle par 3 compagnies aériennes.
Pas de restructuration en profondeur
Enfin, selon Craig Kreeger, ancien CEO de la société britannique Virgin Atlantic, en Europe, les dirigeants qui ont orchestré les fusions européennes ont trop pris en compte les sensibilités politiques locales et n’ont pas tranché dans les postes de coûts comme ils auraient dû le faire pour permettre vraiment à ces compagnies de redevenir rentables. « Il y a eu des acquisitions en Europe, mais je ne pense pas q<ue nous ayons eu beaucoup de véritable consolidation », dit-il. « Aux Etats-Unis, où il n’y a pas de frontières nationales, nous avons eu à la fois des acquisitions et de la rationalisation ».