La réforme fiscale et la question de la TVA provoquent des tensions entre les partenaires de la Vivaldi, mais pas seulement : De Croo est mis sous pression par ses propres députés

« Un accord d’ici le 21 juillet. » À la Chambre, Alexander De Croo (Open Vld) est paru encore confiant : la réforme fiscale est en cours. Mais pendant que le Premier ministre se montre ferme devant les caméras, des tensions éclatent dans les coulisses. Les partenaires du gouvernement sont très irrités par la manière dont le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (cd&v), tente d’imposer ses priorités. Il y aurait une réduction de la TVA sur les pneus de tracteur, dans le but de donner un coup de pouce à la nouvelle passion du cd&v : l’agriculture. « Mais ce même cd&v veut augmenter la TVA sur les chiens guides pour aveugles et les voitures pour handicapés ? Absurde », entend-on chez les socialistes. Cela montre que la réforme fiscale est encore loin d’un accord. Du côté de Van Peteghem (cd&v), on reste calme : « Nous respectons les grandes lignes et nous n’allons pas commencer à choisir à la carte chaque point. » De son côté, le Premier ministre doit faire face au courroux des députés libéraux : « On est tondus deux fois », se plaignent-ils. Ce week-end, la Vivaldi organise un nouveau marathon de négociations.

Dans l’actualité : Les pneus de tracteur moins chers, les chiens guides pour aveugles plus chers ?

Les détails : La réforme fiscale passe par une harmonisation de la TVA. Sauf que ça bricole et ça promet déjà d’être la grande agitation du week-end. Car certains partenaires de la coalition sont irrités par la façon dont le cd&v veut imposer son programme.

  • « Avant le 21 juillet, nous voulons parvenir à un accord sur la réforme fiscale. Elle aura un effet sur le salaire net de nos citoyens dès 2024 », a promis De Croo devant la Chambre. La scène a donné lieu à un rare moment d’humour pour la Vivaldi, même le Premier ministre n’a pu s’empêcher de rire un peu. Car Dieter Van Besien (Groen), le spécialiste financier chez Groen, a été le seul à applaudir la promesse de De Croo. Les applaudissements sonnaient creux, les rires de l’opposition sur cette situation bizarre ont finalement fait rire tout le monde, y compris le Premier ministre.
  • « De vos applaudissements, je déduis que vous attendez cela avec impatience. Je comprends. Donnez-nous les deux prochaines semaines pour montrer que nous sommes capables de conclure des accords à nouveau », a répliqué immédiatement le Premier ministre.
  • L’exercice pour le chef du gouvernement à la Chambre était clair, face à une série de questions de la majorité, mais surtout de l’opposition : rester calme, se comporter en homme d’État, au-dessus de l’agitation, et surtout ne rien dire qui pourrait attiser la controverse, mais plutôt « tenir le cap », et dégager de la confiance quant à un « accord à venir ».
  • L’opposition a été très critique :
    • Il n’y aura pas de tax down, mais désormais un tax shift. Et tout le monde le sait : « Nous attendons toujours. Nous savons que l’exercice devient de plus en plus léger, passant de 6 milliards à 2 milliards. La réduction d’impôt de Johan Van Overtveldt (N-VA) à l’époque était de 8 milliards. C’était autre chose », a déclaré Peter De Roover (N-VA).
    • « La montagne est sur le point d’accoucher d’une souris alors que notre population a besoin d’une vaste réforme pour redonner du sens à l’impôt et retrouver du pouvoir d’achat », a fustigé Maxime Prévot (Les Engagés).
  • Devant les caméras, le Premier ministre est resté zen, les critiques lui glissant dessus.


À la Chambre : De Croo a reçu de vives critiques au sein de son propre parti.

  • En fait, le Premier ministre avait déjà vécu une session interne intense avec son propre groupe politique, celui de l’Open VLD. Traditionnellement, les factions se réunissent en interne à la Chambre, avant de se rendre chacune en session plénière. Le Premier ministre est apparu pour la première fois devant les députés libéraux depuis « le coup d’État du Seize à la rue Melsens », le siège du parti. De Croo a pris de facto le contrôle du parti, en nommant, sans beaucoup de concertations, le nouveau président du parti, Tom Ongena.
  • « Nous avons eu droit à un discours marketing, mais beaucoup de questions concrètes, notamment sur les statuts du parti et la nomination de Tom, sont restées sans réponse. Le Premier ministre a ainsi ignoré un certain nombre d’interventions critiques de membres de la Chambre« , a déclaré un participant.
  • « De Croo semblait n’être venu que pour expliquer la réforme fiscale, et surtout pour nous rassurer. Mais au moins huit des députés libéraux, qui étaient très favorables à Egbert Lachaert (Open Vld) à l’époque, ont de grandes questions : ce sont les deux tiers du groupe, hein », nous explique un député. On sait que la réforme fiscale a été la goutte d’eau pour l’ancien président de l’Open VLD, qui a annoncé sa démission pour le mois de septembre avant d’être poussé illico vers la sortie.
  • Il y a également une grande crainte au sein du parti libéral flamand concernant ce qui pourrait sortir de cette réforme fiscale. « Le Premier ministre essaie beaucoup trop de parvenir à un accord avec Paul Magnette (PS). Ensuite, un prix devra encore être payé au sein du kern : on est tondus deux fois. Il est logique que nous soyons sur nos gardes, d’autant plus que les opposants aux plans actuels ont déjà été balayés du parti : Caroline Deiteren, la cheffe de cabinet de Lachaert, a par exemple dû partir immédiatement » : telle est l’analyse au sein du groupe de l’Open Vld à la Chambre.
  • Dans le camp autour de De Croo, on sert les rangs. Il y a peu de raisons de regarder en arrière vers l’ancienne « Équipe Lachaert ». L’irritation causée par les fuites dans la presse flamande autour du parti est grande, et c’est ce même groupe qui est accusé d’en être l’auteur. La réforme fiscale est donc un dossier explosif chez les libéraux flamands, car elle touche à leur cœur de métier : les impôts.

L’essentiel : c’est la grande foire aux propositions.

  • Les nombreuses réunions pour mettre sur papier la réforme fiscale n’ont pas encore permis de percées dans les négociations. Le Premier ministre a désormais très explicitement fixé la date limite au 21 juillet.
  • Mais une nouvelle note du ministre des Finances sur les ajustements de la TVA a entre-temps suscité la colère des partenaires de la coalition. Car elle contient toute une série d’ajustements sur mesure pour le cd&v, ce qui suscite l’irritation.
  • Le fait que la TVA sur les pneus pour tracteurs et machines agricoles devrait encore baisser, passant de 12 % (qui est déjà un tarif préférentiel) à 9 %, est mal perçu. « Ils ont déjà obtenu une réduction par rapport à tout le monde, et maintenant, il leur en faudrait une supplémentaire ? », s’époumone une source gouvernementale socialiste.
  • Mais ce qui est encore moins bien perçu, c’est la proposition d’augmenter la TVA réduite sur les chiens guides et les véhicules adaptés aux personnes handicapées. Le taux passerait de 6 à 9 %. Surtout pour les animaux, c’est quelque peu ironique : c’est l’ancien ministre des Finances Koen Geens (cd&v), un membre du parti de Van Peteghem (cd&v), qui a réduit ce taux en 2013. Les socialistes sont en tout cas prêts à se battre : « Cela ne passera pas pour nous. »
  • Le fait que ces deux questions très spécifiques sur la TVA soient divulguées, après la dernière discussion de mercredi, dérange clairement à la fois le Premier ministre et l’architecte des plans, le ministre des Finances. « Mais à la fin de la journée, il faudra bien expliquer pourquoi on augmente ou on diminue les taux sur certains produits. On ne peut pas le faire de manière aléatoire », dit-on dans les couloirs de la Rue de la Loi.
  • Van Peteghem, pour sa part, insiste sur le fait qu’il y a « une certaine logique » dans ses plans qu’il essaye de suivre depuis longtemps. « Il ne faut pas commencer à choisir à la carte quand on s’attaque à la TVA : pas pour un secteur spécifique ou un groupe cible. C’était aussi le principe de De Croo, au début des discussions. Ce sont justement nos partenaires gouvernementaux qui sont ensuite venus avec des exigences et des désirs spécifiques », entend-on.
  • Entre-temps, toute une série de points ont été passés en revue, où le taux de TVA devrait changer : « L’art, les concerts, les journaux, les boissons non alcoolisées, les transports publics, la construction, les plantes et les fleurs, les engrais, le tabac… chaque point est une exigence d’un des partis autour de la table, que ce soit pour augmenter ou diminuer la TVA. »
  • « C’est difficile de travailler de cette façon », dit un initié. Van Peteghem a toutefois une ligne rouge, qui a également été exigée par les socialistes : le panier des ménages ne doit pas devenir plus cher, le consommateur est donc épargné. Mais la réforme devra donc trouver de l’argent ailleurs.
  • Car du côté des dépenses, il y a environ 2 milliards d’euros. C’est le manque à gagner pour l’abolition de la contribution spéciale à la sécurité sociale (CSSS) et pour l’élargissement du bonus à l’emploi. Du côté des recettes, il y a la taxe Caïman, la taxe Diamant, la taxe sur les comptes-titres, qui vont toutes augmenter, et la réduction de la déduction des revenus définitivement taxés (RDT) pour les entreprises. Mais la réforme de la TVA doit aussi participer à l’effort de guerre, même si personne ne veut dire combien exactement.
  • Cela promet en tout cas d’être un week-end agité pour la Vivaldi, dans la bataille autour des augmentations et des baisses spécifiques de la TVA.

BL

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