L’Europe fait-elle fausse route en investissant à tout va dans les terminaux GNL ? Le marché risque la saturation dès 2030

Les pays d’Europe cherchent à développer des infrastructures de gaz naturel liquéfié (GNL) pour accroître leur indépendance et leur capacité énergétiques. Mais l’offre de GNL pourrait dépasser largement la demande après 2030, en faveur des énergies plus durables.

Pourquoi est-ce important ?

Suite à l'invasion russe de l'Ukraine, de plus en plus de pays d'Europe adoptent les énergies renouvelables. Une transition énergétique majeure se profile, avec des implications économiques et environnementales importantes. Dans cette nouvelle dynamique, il faudra donc veiller à ne pas saturer le marché de gaz naturel liquéfié, duquel pourraient se détourner de nombreuses nations au profit des énergies solaires et éoliennes.

Zoom avant : Face à une crise énergétique menaçante, l’Europe a agi rapidement pour sécuriser l’approvisionnement en gaz naturel liquéfié (GNL) en construisant de nouveaux terminaux d’importation.

  • L’Italie est sur le point de lancer sa quatrième installation.
  • L’Allemagne fait pression pour déployer son quatrième terminal flottant, au large de l’île de Rügen en Baltique.
  • La Grèce prévoit également de rendre opérationnel un terminal flottant à la fin de cette année.
  • La Slovaquie va construire un terminal méthanier sur le Danube.
  • De leur côté, la Finlande et l’Estonie se sont accordées l’an dernier pour louer un terminal GNL flottant pour sécuriser leur approvisionnement en gaz.
  • Et l’Europe pourrait encore ajouter deux à quatre terminaux flottants supplémentaires en plus de ceux déjà prévus, a déclaré Thomas Thorkildsen, directeur commercial de Hoegh LNG, à Bloomberg.
  • Chez nous, le terminal de regazéification de GNL de Fluxys à Zeebrugge a une capacité de 9 milliards de mètres cubes par an.
    • Il y a deux ans, Fluxys a pris la décision d’investissement finale pour la construction des infrastructures supplémentaires nécessaires au terminal en deux étapes :
    • À partir de début 2024, un total de 4,7 millions de tonnes par an (ou près de 8,2 GWh/h) de capacités de regazéification supplémentaires ;
    • À partir de début 2026, toute la capacité de regazéification supplémentaire sera disponible, soit 6 millions de tonnes par an (ou près de 10,5 GWh/h).

Plusieurs milliards d’euros inutilisés ?

Zoom arrière : Il y a maintenant une préoccupation croissante que ces efforts en faveur du GNL dépassent les besoins réels dès 2030, selon un rapport de Bloomberg, laissant présager une surabondance des installations de GNL.

  • Selon l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis, la capacité d’importation de GNL en Europe devrait augmenter d’environ 50% au cours de cette décennie.
    • Pendant ce temps, la demande de GNL pourrait ne pas augmenter, voire diminuer. Selon un scénario prévu par l’Agence internationale de l’énergie, l’UE pourrait réduire sa consommation de gaz de près de 45% d’ici à 2030 au profit des sources d’énergie renouvelables.
    • Cela laisserait une capacité inutilisée de 250 milliards de mètres cubes, ce qui représente plus de la moitié de la demande totale de gaz de l’UE en 2021.
    • L’Institute for Energy Economics and Financial Analysis prévient donc que plus de la moitié des infrastructures GNL européennes pourrait rester inutilisée d’ici à la fin de la décennie.
  • En envisageant la construction de tous les terminaux prévus, il existe ainsi un risque important que des infrastructures d’une valeur de plusieurs milliards d’euros se retrouvent immobilisées, car inutiles, à long terme.
    • « Si chaque pays vise à avoir sa propre capacité d’importation et que les marchés ne fonctionnent pas en collaboration, il y aura bien sûr beaucoup de coûts irrécupérables », commente Ogan Kose, directeur général d’Accenture Plc, spécialisé dans le gaz naturel.

Conclusion : Alors que la crise s’apaise progressivement, l’Europe doit évaluer attentivement ses plans afin d’éviter des investissements excessifs en GNL et favoriser une transition énergétique équilibrée.

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