Les taux de fret pour les navires transportant du gaz naturel liquéfié, les méthaniers, ont atteint un niveau record mardi.
Les faits : Selon les données de la société Spark Commodities, affréter un méthanier dans le bassin atlantique coûte désormais 397.500 dollars par jour. C’est ce que rapporte le site Business Insider.
- Les méthaniers sont des navires spécifiques, servant à stocker du gaz naturel liquéfié et à l’acheminer jusqu’à un terminal côtier.
- Là, le produit énergétique est chauffé et transformé en gaz dans des installations spéciales, puis il afflue vers les clients via des gazoducs.
Le contexte : Depuis que la Russie a envahi son voisin ukrainien à la fin du mois de février, les taux de fret maritime ont explosé : le coût moyen d’affrètement d’un méthanier pour une journée est passé de 14.300 dollars à un peu moins de 400.000 dollars au cours de cette période.
La faim du GNL
Pourquoi ? La réduction des approvisionnements en gaz russe – le dictateur russe Vladimir Poutine a petit à petit réduit les livraisons de gaz à l’Europe via le gazoduc Nord Stream – a rendu le Vieux Continent avide de GNL provenant de puissances plus fiables.
- La demande européenne de gaz naturel liquéfié a augmenté de 65% entre le début de cette année et le mois d’août, par rapport à la même période en 2021, a calculé l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
- Un grand nombre de ces livraisons sont effectuées par voie maritime. Selon les données de la société d’analyse financière Refinitiv, les livraisons des États-Unis ont représenté plus de 70% des importations de gaz sur le continent entre le début de l’année et le mois de septembre.
« Le gaz naturel américain bon marché appartient au passé »
Mais : Alors que le continent est confronté à une véritable crise énergétique, l’Europe ne peut plus compter sur le gaz bon marché des États-Unis. C’est ce qu’a annoncé Charif Souki, cofondateur de Tellurian, une société de GNL basée au Texas, d’une conférence sur l’énergie à Londres la semaine dernière.
- Selon Souki, qui est également président exécutif de Tellurian, les pays qui cherchent à remplacer l’approvisionnement en gaz interrompu par la Russie verront le transport du GNL devenir deux fois plus cher. En effet, aux États-Unis aussi, l’inflation a entraîné une hausse considérable des coûts de transport.
- « Par conséquent, rêver de l’époque où l’on pouvait obtenir du gaz pour 4-5 dollars (par pied cube de gaz naturel, NDLR) appartient au passé », a suggéré l’homme d’affaires libano-américain. « Nous devrions plutôt penser dans la direction de 10-12 $ » pour justifier l’investissement de Tellurian.
« Le chantage au gaz a échoué »
En outre : Le « chantage au gaz » de Poutine a désormais échoué. C’est ce qu’affirme Jeffrey Sonnenfeld, professeur de commerce à Yale. La révolution du GNL en Europe permettrait au continent de mettre fin à sa dépendance vis-à-vis de la Russie.
- Les pays européens disposent déjà de suffisamment de sources alternatives pour compenser les approvisionnements russes manquants, ayant remporté les enchères face à leurs concurrents en Asie et ailleurs.
- L’indépendance vis-à-vis de l’appareil énergétique russe a donc un prix (très) élevé.
(CP)