C’est loin d’être une première, mais c’est le genre d’opération qui a le don de mettre en lumière un des plus importants problèmes causés par l’Homme dans l’espace: la démultiplication des débris spatiaux. Ce vendredi, sans intervention, des restes d’un satellite météorologique auraient très bien pu percuter violemment la Station spatiale internationale.
L’agence spatiale russe, Roscosmos, a annoncé avoir modifié la trajectoire de la Station spatiale internationale (ISS) d’environ 1,2 km mercredi, en collaboration avec la NASA. La plateforme a tiré ses fusées pendant six minutes pour effectuer la manœuvre. Quelques heures après, les astronautes de la mission Crew-3, Thomas Marshburn, Raja Chari, Kayla Barron et Matthias Maurer, sont arrivés à bord.
Cette modification d’orbite de l’ISS a été mise en œuvre pour éviter une colision des débris spatiaux chinois, ont fait savoir les agences spatiales russe et américaines, qui opèrent sur l’ISS avec leurs homologues européenne et japonaise.
Proches de la « boîte à pizza »
Ces débris spatiaux proviennent d’un test antisatellite effectué en 2007, lorsque la Chine a lancé un missile contre son propre satellite météorologique, Fengyun-1C, a expliqué la NASA. Cette collision a créé environ 3.500 fragments de grande taille et de nombreux autres petits fragments.
Si l’ISS n’avait pas été réorientée, certains de ces débris seraient rentrés dans la « boîte à pizza », une zone rectangulaire plate de 4 km de profondeur et de 48 km de largeur autour de la station spatiale, à l’intérieur de laquelle tout objet est « suffisamment proche pour qu’on s’en inquiète », a précisé l’agence spatiale américaine.
« Il est logique d’aller de l’avant, d’effectuer cette combustion et de mettre cette affaire derrière nous afin de garantir la sécurité de l’équipage », a déclaré Joel Montalbano, responsable de la station spatiale à la NASA, lors d’une conférence de presse mardi, selon le New York Times.
« Le potentiel de paralyser l’ISS et de tuer l’équipage »
Selon le quotidien américain, c’est déjà la 29e fois que la trajectoire de l’ISS doit être modifiée pour lui éviter d’entrer en collision avec des débris spatiaux. Des opérations toujours très importantes, dans la mesure où ces fragments peuvent atteindre des vitesses folles (jusqu’à 28.000 km/h), ce qui, en cas d’impact, aurait des conséquences catastrophiques.
« Les débris spatiaux ont le potentiel de paralyser l’ISS et de tuer l’équipage », avait alerté Robert Frost, instructeur et contrôleur de vol à la NASA, dans un billet de blog en 2019. Mais ce risque est « hautement géré », avait-il toutefois assuré.
Tout objet de plus de 10 cm pourrait faire voler l’ISS en éclats, selon l’ESA. Même un éclat de peinture provenant d’une fusée pourrait être dangereux, en heurtant par exemple le dôme d’observation de la station. Mais seuls les objets de la taille d’une balle de softball sont surveillés constamment depuis le sol, les autres étant trop petits.
En juin dernier, la NASA avait rapporté qu’un petit fragment avait percé un trou de 5 millimètres dans l’un des bras robotiques de l’ISS. Les fragments, quelle que soit leur taille, sont de plus en plus difficiles à suivre, car l’accélération de l’activité des vols spatiaux a entraîné une augmentation spectaculaire des débris spatiaux en orbite autour de notre planète. Selon l’Agence spatiale européenne, plus de 900.000 de débris d’un à dix centimètres, ainsi que plus de 34.000 objets de plus de 10 centimètres se trouveraient actuellement en orbite terrestre.
La taille des débris qui auraient pu toucher l’ISS ce vendredi n’a pas été révélée par la NASA et Roscosmos. Tout porte à croire que certains d’entre eux étaient aussi gros qu’une balle de softball, puisqu’ils avaient été repérés.