Réseau social des ados par excellence, TikTok est désormais bien plus que cela. Selon les données publiées par ByteDance, la société-mère, c’est désormais un terrain de jeu à 3 millions d’utilisateurs en Belgique (en tout cas pour les comptes actifs). Certains politiques l’ont compris, la majorité pas encore. Ça dit quoi la bulle politique sur TikTok ?
Première constatation, aucun parti politique belge ne dispose d’un compte TikTok à l’exception du Vlaams Belang. Fort de ses 18.300 abonnés, le compte cumule plus d’un million de vues et des dizaines de milliers de likes. Si les courtes vidéos – point cardinal de TikTok – ont pour vocation à être ludiques, elles ne sont pas là que pour faire rire les fans mais pour communiquer un message politique. Dans le cas du VB, un message (nauséabond) visant à dénoncer ‘les mosquées qui ne respectent par les règles corona’ a récolté par exemple 200.000 vues.
Au niveau des personnalités politiques, elles se comptent sur les doigts. Mais le plus populaire vous étonnera sans doute. Il s’agit d’Elio Di Rupo (PS), avec 30.000 abonnés. Et les millions de vues pleuvent, comme l’a annoncé fièrement Nicolas Dieudonné sur Twitter ce jeudi, le conseiller réseaux sociaux du ministre-président wallon. 4 millions de vues en tout et près de 200.000 likes. Les vidéos humoristiques s’entremêlent avec des messages politiques plus sérieux.
Derrière, on retrouve le président du Vlaams Belang, Tom Van Grieken, 27.000 abonnés. Ses vidéos sont un mélange d’indignation, de dénonciations et d’auto-promo, tout en apparaissant sympa et drôle aux yeux de sa communauté.
Derrière, on joue pour le moment dans une autre division. On retrouve principalement Georges-Louis Bouchez, président du MR et Conner Rousseau, président du sp.a. Avec respectivement 2.800 et 3.138 abonnés. GLB tâte le terrain et marque son territoire sans discours politiques purs et durs, mais avec des vidéos plus intimes, à l’humour plus ou moins réussi.
Du côté du jeune socialiste, 27 ans, c’est plus inné. Mais King Connah préfère largement Instagram à TikTok. Sa présence se résume d’ailleurs à seulement 4 vidéos.
Pour le reste, on a repéré Margaux De Ré et Rajae Maouane (Ecolo), ou encore Leila Agic et Frédéric Daerden (PS). A notre connaissance pas d’élus DéFI ou du cdH. Plus étonnant, pas de compte du PTB ou de Raoul Hedebauw. Pourtant, certains discours en néerlandais du porte-parole francophone des communistes fonctionnent fort sur un compte qui ne semble pas officiel.
Bien sûr, on reste bien loin de la star belge de TikTok, @célinedept, et ses 10 millions d’abonnés. Mais TikTok ne devrait-il pas commencer à trotter dans la tête des communicants des partis?
Pour Nicolas Dieudonné, conseiller d’Elio Di Rupo, c’est ‘un excellent moyen de faire découvrir le monde politique à une génération qui ne s’y attarde pas spécialement. 98% de nos abonnés sont localisés en Belgique’. C’est un argument que l’on rencontre souvent.
Encore faut-il comprendre les codes du réseau social: ‘Certaines personnalités politiques se lancent sans comprendre les codes de l’application. Du coup, leurs contenus ne décollent pas. Nous avons une approche différente qui est de s’adapter aux tendances de TikTok pour avoir le plus de visibilité possible. Et ça fonctionne ! Je pense que quand les politiques belges comprendront mieux le fonctionnement de l’application, ils s’y investiront plus, mais actuellement ce n’est pas encore le cas.’
Bon calcul?
Ce n’est pas le seul frein. Davantage que suivre une tendance, il faut savoir que la publicité politique est interdite sur TikTok au contraire de Facebook. De plus, il n’est pas possible d’y intégrer un URL qui mènerait à une autre forme de contenu: un site web, une newsletter, un article.
Mais il est vrai que le public de TikTok n’est pas le même que celui d’Instagram, et certainement pas celui de Facebook. Le tout est de savoir si cela peut se concrétiser en popularité pour son initiateur, et au bout du compte, en votes.
Encore faut-il avoir l’âge de voter. Mais on sait que, bien plus que pour des programmes, on vote pour des personnalités. Bien maîtrisé, TikTok ne doit certainement pas être négligé. D’un point de vue purement statistique, l’interaction et les engagements des vidéos sur TikTok, grâce à son algorithme, sont tout simplement impressionnants.
Aux États-Unis, la cote de TikTok a dépassé celle d’Instagram auprès du jeune public. Snapchat reste toutefois en tête, un réseau social dans lequel le politique est un peu plus investi.
Du côté des partis, on nous dit ‘essayer des choses’, tout en ‘s’y intéressant clairement’ au MR. On est bien conscient qu’il ‘faut y être authentique sans quoi on se plantera assurément’. L’objectif à plus long terme est aussi d’y faire passer des messages plus sérieux. Du côté d’Ecolo, on laisse la place ‘aux initiatives individuelles’, sans réel plan de bataille commun. Au cdH, ‘rien de prévu pour le moment’.
Mais avec 3 millions de comptes créés en Belgique, peut-on encore parler de média de niche ?