Depuis quelques années, les banques favorisent une politique d’écologie et de durabilité, mais cela se reflète rarement dans la composition de leurs conseils d’administration. Les directions entretiennent des relations étroites avec les entreprises de combustibles fossiles, les connexions avec les secteurs durables se faisant beaucoup plus rares.
C’est en tous les cas ce qui ressort d’un rapport rédigé par des analystes de Bloomberg, qui se sont penchés sur les organes de direction de 20 grandes banques aux États-Unis et en Europe.
Les crédits
‘Les grandes banques semblent placer les énergies renouvelables et la durabilité au centre de leur politique et pourtant, ces institutions voient souvent les membres de leur conseil d’administration entretenir des liens étroits avec les entreprises de combustibles fossiles’, déclare Bloomberg. Si ces liens sont à peine perceptibles, ils influencent parfois des décisions importantes.
L’étude révèle que depuis la signature de l’accord de Paris sur le climat, il y a cinq ans, (COP21), les 20 banques étudiées auraient accordé aux entreprises de combustibles fossiles pour l’équivalent de 1.400 milliards de dollars de prêts. ‘L’analyse portait sur 600 dirigeants de banques. Il s’est avéré que 73 d’entre eux avaient déjà occupé, dans le passé, un poste dans une entreprise de combustibles fossiles’, déclare Bloomberg. Près de 16 dirigeants de banque auraient également été actifs dans le secteur pétrolier en amont de leurs fonctions dans le secteur financier.
Par ces propos, Bloomberg fait notamment référence à Lee Raymond, (un pétrolier de renom qui porte un regard sceptique sur le climat), siégeant au conseil d’administration de la banque américaine JP Morgan Chase Chase & Co. ‘Monsieur Raymond est un ancien cadre supérieur d’ExxonMobil [une société pétrolière et gazière américaine]’, soulignent les analystes. ‘Il est conseiller en matière de stratégie à long terme au sein de la banque’, ont-il poursuivi. Il apparaît aussi que Lee Raymond serait également une personne de poids pour Jamie Dimon, le patron de la banque JP Morgan Chase & Co.
Bloomberg mentionne également dans son rapport Christian Streiff, du Crédit Agricole. Ce dernier aurait déjà ‘une expérience significative dans la sidérurgie, la construction, l’automobile et l’aviation’ explique Bloomberg. Chez ING, pas moins de 6 des 15 membres du conseil d’administration seraient en relation avec les entreprises Royal Dutch Shell, (une compagnie pétrolière anglo-néerlandaise) et Daimler (un constructeur automobile).
Aucun des membres siégeant au conseil d’administration ne serait directement ou indirectement lié aux énergies renouvelables, à l’exception du président Hans Wijers, anciennement membre de l’association Natuurmonumenten (une société en faveur de la préservation de la nature aux Pays-Bas). Il importe toutefois de souligner, selon le rapport, que le groupe ING s’est intéressé à la question du climat bien plus tôt que nombre de ses pairs. ‘La banque néerlandaise a également alloué un portefeuille de prêts de plus de 600 milliards de dollars aux entreprises durables’, indique le rapport.
Les actionnaires
Face aux initiatives de certains actionnaires qui exigent que les institutions financières se positionnent davantage en faveur du changement climatique, les banques se sont vues dans l’obligation de régir. ‘Sous la pression des actionnaires, la banque JP Morgan Chase, par exemple, s’est engagée à remplacer Lee Raymond d’ici la fin de l’été’, déclare Bloomberg. Au Crédit Agricole, Christian Streiff aurait été remplacé par Marie-Claire Daveu, auparavant responsable du développement durable pour une entreprise de mode française. ‘Christian Streiff avait atteint l’âge de la retraite et il devait donc être ‘remplacé’, indique Bloomberg.
Le rapport souligne aussi que malgré ce constat, une série de directeurs entretiennent aussi des relations étroites avec des entreprises durables. Sharon Allen (de la Bank of America) serait en contact avec First Solar, (une entreprise de panneaux solaires), tandis que Lena Wilson (de la Royal Bank of Scotland) serait également directrice de l’entreprise ScottishPower Renewables. Enfin, Michael Klein (du Crédit Suisse) est aussi membre du conseil d’administration de Conservation International (CI), une organisation à but non lucratif visant à protéger les points chauds de biodiversité, les espaces sauvages à forte biodiversité et les régions maritimes importantes.