À Hambourg, l’AfD vient de créer un site permettant aux étudiants de dénoncer anonymement les enseignants qui parlent négativement du parti.
Les élections ont eu lieu dimanche dans l’État fédéral allemand de Bavière. Selon les dernières estimations, la CSU, le parti frère bavarois de la CDU d’Angela Merkel, a subi une défaite humiliante. Même s’il a remporté le plus grand nombre de voix lors des élections régionales de dimanche en Bavière, avec 37,2 % des suffrages, il s’agit de son pire résultat en 68 ans. Depuis les dernières élections bavaroises de 2013, il a perdu plus de 12 % d’électeurs.
Le partenaire de la coalition, le SPD, est tombé sous les 10 % (9,7 % exactement), ce qui ne fera qu’accroître la pression sur la coalition fédérale à Berlin.
Les Verts – du côté gauche du spectre politique – sont les grands vainqueurs de ces élections, avec 17,5 % des suffrages. Le parti anti-immigration Alternative für Deutschland (AfD) a cependant obtenu 10,2 % des voix, ce qui lui permet d’entrer au Parlement bavarois. Un parti conservateur indépendant, les Freie Wähler (‘électeurs libres’), a recueilli 11,6 % des votes, et pourrait maintenant s’allier avec la CSU pour former une coalition.
La radicalisation extrême de l’AfD
Mais le plus troublant est la radicalisation extrême de l’AfD. Autrefois parti anti-euro dirigé par des intellectuels allemands, l’AfD a été temporairement repris par les populistes au moment de la crise des migrants pour être transformé en un parti d’extrême droite à l’ancienne, partageant un point commun avec tous les partis d’extrême droite à l’étranger : une aversion pour l’immigration.
Les recettes brunes de l’AfD
La création d’un portail Internet sur lequel les enfants peuvent dénoncer de manière anonyme les enseignants anti-AfD, une méthode utilisée à l’époque des nazis, témoigne du fait que l’AfD aime les recettes brunes.
L’AfD se considère comme une victime et déclare qu’il veut mettre fin au prétendu endoctrinement politique mené par le gouvernement dans les écoles grâce à ce site.
La politique allemande a toujours évité de faire la comparaison entre l’AfD et les méthodes introduites à l’époque du fascisme. Mais quiconque ne voit en l’AfD qu’un parti populiste se trompe. À cet égard, ce parti se distingue de partis tels que la Lega en Italie ou le Rassemblement National, nouveau nom du Front national de Marine le Pen. Les observateurs politiques commencent à voir dans l’AfD un parti nazi moderne.
Les leçons de Chemnitz
Cela est devenu évident lors des émeutes qui ont eu lieu dans la ville de Chemnitz en septembre. Seul l’AfD a bénéficié de ces émeutes. Non seulement, l’AfD était le parti le plus important de l’organisation, mais de plus, des leaders du mouvement ont été signalés lors des manifestations. Parmi les slogans scandés, on pouvait entendre : « Oog om oog, tand om tand » (‘Oeil pour oeil, dent pour dent’), « Wir sind das Volk » (‘Nous sommes le peuple’), « Lügenpresse » (‘presse menteuse’) et « National Sozialismus ! Jetzt ! Jetzt ! Jetzt ! » (‘Socialisme National ! Maintenant ! Maintenant ! Maintenant !’ – National Sozialismus est l’expression dont est issu le mot nazi).
Selon le Frankfurter Allgemeine, le parti ne peut être tenu pour responsable sur le plan juridique, car tout ce qu’il fait reste parfaitement dans les limites de la loi. Le ministre de la Justice, Barley (SPD), parle de « trahison organisée telle qu’elle existe dans les dictatures », mais le gouvernement demeure impuissant.
Dans le Land de Bade-Wurtemberg, l’AfD veut aller encore plus loin en publiant la liste des enseignants dénoncés par les élèves. Comme le gouvernement ne peut rien faire, les enseignants espèrent pouvoir invoquer les lois sur la protection de la vie privée pour se défendre.