Nikolai et Pavel Durov, les frères russes qui ont mis au point le service de messagerie Telegram, travaillent sur un Internet alternatif. Il s’appelle TON et sera lancé avant le 31 octobre de cette année. Pour ce faire, les Durov feront appel à la technologie de la blockchain. La date de lancement n’est pas une coïncidence. À partir du 1er novembre de cette année, le gouvernement russe aura le droit de fermer l’internet du reste du monde.
TON (Telegram Open Network) sera une plateforme blockchain similaire à un Internet sécurisé et extensible. Outre les sites Web (les mêmes que ceux accessibles sur Internet), TON disposera également de son propre app store, de son propre système de paiement, d’un système de stockage de fichiers volumineux, de son propre système de navigation anonyme et de son propre DNS, pour raccourcir les adresses Web complexes. Les paiements seront possibles via le système de paiement électronique allemand Wirecard. L’unité de paiement sera le Gram, qui est la propre crypto-monnaie de TON.
Telegram a toujours refusé de transmettre les données des utilisateurs au gouvernement
Les utilisateurs de Telegram peuvent échanger des messages, des photos, des vidéos et des fichiers chiffrés et autodestructibles jusqu’à 1,5 Go. Il est compatible avec la plupart des systèmes d’exploitation. Telegram se présente comme un service gratuit, plus sûr, plus rapide et plus utile par rapport à des solutions alternatives telles que WhatsApp. TON serait aussi hyper sécuritaire. La plateforme utilise pour cela un système cryptographique qui serait le plus avancé qui existe à ce jour. Selon la documentation technique, TON chiffrerait tout. Les fondateurs de Telegram ont toujours refusé de donner au gouvernement un accès aux données des utilisateurs. Rien n’indique que leur position changera en ce qui concerne TON.
On en sait peu sur le coût du projet. En 2018, toutefois, l’équipe TON a levé 1,5 milliard d’euros lors de deux ICO (Initial Coin Offering, un terme désignant les levées de fonds en matière de monnaies virtuelles). Mais les investisseurs estiment que le prix de revient de TON est deux fois plus élevé. Quelque 200 millions de personnes utilisent Telegram, un nombre qui pourrait également utiliser TON. On s’attend à ce que TON atteigne rapidement 300 millions d’utilisateurs.
L’identité des financiers de TON est un secret de polichinelle. Le nom de l’homme d’affaires russo-israélien et du propriétaire du FC Chelsea, Roman Abramovich, a déjà été cité dans les médias. De même, ceux des magnats russes Sergei Solonin et David Yakobashvili. Ensuite, on trouve quelques fonds d’investissement influents de la Silicon Valley. Il s’agit de Kleiner Perkins Caufield & Byers, Benchmark et Sequoia Capital.
Telegram Messenger est basé en Grande-Bretagne. Elle est la propriété de deux sociétés de Pavel Durov, établies au Belize et dans les îles Vierges britanniques. En outre, la société a des immatriculations aux États-Unis et au Panama et une adresse postale à Berlin. Durov a quitté la Russie en 2014 parce que « le pays est incompatible avec tout ce qui a trait à Internet ».
Rien de moins qu’une révolution web
Si TON peut effectivement garantir une confidentialité totale, il s’agit de rien de moins qu’une véritable révolution Web. TON ne sera pas seulement confronté à une opposition féroce en Russie. La Russie a déjà fermé plusieurs fois Telegram, malgré le fait que seulement 7 % de ses utilisateurs sont des Russes. La Russie oblige les entreprises à stocker leurs données d’utilisateur pendant six mois sur des serveurs situés dans le pays lui-même. A ce jour, Telegram a été en mesure de permettre aux utilisateurs russes d’accéder à l’application grâce à des détours.
Les activités de TON seront également surveillées de près dans d’autres pays où l’on ne craint pas de couper Internet de temps à autre