À Francfort, les administrateurs de la Banque centrale européenne se sont rencontrés jeudi. Comme prévu, le taux d’intérêt a été maintenu au niveau actuel. Aucun changement n’est à prévoir avant la fin de l’été. Le taux de refinancement reste à 0 %. Cela signifie que les banques peuvent emprunter de l’argent gratuitement auprès de la BCE. Le taux de dépôt s’élève à moins 0,4 %. Toute banque qui dépose de l’argent à Francfort, doit payer la Banque centrale européenne.
Mario Draghi, le premier président d’une BCE sans intérêt
Le président de la BCE, Mario Draghi, restera dans l’histoire comme le tout premier président de la BCE à n’avoir jamais augmenté les taux d’intérêt. Déjà lors de sa première intervention devant la BCE le 3 novembre 2011, il avait surpris le marché en abaissant les taux d’intérêt. Il y a de fortes chances qu’il ne fasse jamais machine arrière avant son départ en octobre. Draghi deviendra alors ce que les Allemands appellent « der erste zinslose Präsident », autrement dit, le premier président sans intérêt.
Il n’est guère besoin de chercher loin pour en trouver la cause. Au lendemain de la crise financière, Draghi a lancé un programme de relance sans précédent. Des milliers de milliards d’euros ont été injectés dans l’économie. Les gouvernements et les entreprises se sont endettés jusqu’aux oreilles. Toute hausse des taux d’intérêt entraînerait donc inévitablement des défauts de paiement et des faillites. Pendant un moment, la BCE a pu maintenit les apparences. Mais à peine un an après qu’on nous a dit que la crise était finie, l’UE est confrontée à une nouvelle récession.
Europe already in a new (mild) recession? pic.twitter.com/XXmHEHnM4d
— Tiho Brkan (@TihoBrkan) January 24, 2019
Après la crise financière de 2008, le cycle économique a été remplacé par un cycle de crédit. Les cours des actions ont été poussés à la hausse. Les mesures de relance n’ont guère eu d’effet sur l’économie elle-même. Au contraire, elles ont conduit à la plus grande inégalité des revenus depuis des générations.
Économiser = perdre de l’argent
Les principales victimes de ce président sans intérêt sont, bien entendu, les épargnants. Ils ont vu leur épargne perdre de la valeur au cours des dernières années. Cet état de choses ne changera pas de sitôt. Les marchés financiers ne s’attendent pas à une hausse des taux d’intérêt avant la mi-2020. En attendant, l’économie allemande se trouve au bord de la récession, et l’Italie est probablement déjà entrée en récession. L’affaiblissement de l’économie est également un fait en France.
Un rapport récent du Forum économique mondial, fondé sur une enquête menée auprès d’un millier d’experts et de décideurs, met en garde contre des perspectives économiques moins favorables et la détérioration de la situation géopolitique. Environ 90 % des personnes interrogées s’attendent à une nouvelle confrontation économique entre les superpuissances cette année. Le rapport avertit donc que le monde risque de se diriger à l’aveugle vers la prochaine crise.
Une mauvaise nouvelle pour tous ceux qui espéraient que les intérêts de leur épargne compenseraient au moins l’inflation. En d’autres termes, comme les prix des biens et services augmentent en moyenne plus vite que la rémunération que reçoivent les épargnants, le pouvoir d’achat de l’épargne diminue. Cela a coûté environ 5 milliards d’euros aux épargnants l’année dernière. Personne ne croit que cela pourrait changer au cours du mandat de Draghi.
{Sur le graphique ci-dessous : le rendement réel de l’épargne en pourcentage}