Manifestations en Ukraine : Zelensky perd la confiance après l’affaiblissement des institutions anticorruption


Principaux renseignements

  • Des manifestations ont éclaté dans toute l’Ukraine après que le parlement a affaibli les principaux organes de lutte contre la corruption.
  • Les critiques soutiennent que la loi accorde un pouvoir excessif au procureur général et sape l’indépendance.
  • Les partenaires internationaux ont exprimé leur inquiétude, soulignant l’importance des institutions de lutte contre la corruption pour les aspirations de l’Ukraine à l’UE.

Des milliers d’Ukrainiens sont descendus dans la rue mardi soir 22 juillet à Kiev et dans d’autres grandes villes, marquant les premières manifestations contre le gouvernement depuis l’invasion à grande échelle par la Russie. Les protestations ont été provoquées par une loi controversée adoptée par le parlement ukrainien, qui affaiblit considérablement les principaux organes de lutte contre la corruption du pays.

Les manifestants ont exprimé leur indignation en scandant « Honte !» et en brandissant des pancartes demandant un veto sur la loi, dénonçant la corruption au sein du gouvernement. Plus tôt dans la journée, les législateurs ont approuvé des amendements au projet de loi n° 12414, accordant des pouvoirs étendus au procureur général sur les enquêtes menées par le Bureau national de lutte contre la corruption (NABU) et le Parquet spécialisé anticorruption (SAPO).

Le projet de loi a reçu le soutien de 263 législateurs, seuls 13 d’entre eux ayant voté contre et 13 s’étant abstenus. Avant le vote, le NABU avait prévenu que l’adoption de ce projet de loi ferait du chef du SAPO une simple figure de proue et priverait le NABU de son indépendance, la transformant de fait en une unité relevant du bureau du procureur général.

Zelensky rassure les Ukrainiens sur la lutte contre la corruption

Pour tenter d’apaiser les inquiétudes du public, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a assuré aux citoyens que le système ukrainien de lutte contre la corruption resterait opérationnel, mais sans l’influence de la Russie. Il a souligné que le NABU et le SAPO continueraient à exercer leurs fonctions, tout en mettant l’accent sur le rôle crucial du procureur général dans la garantie de la responsabilité.

Toutefois, l’ONG Anticorruption Action Centre (AntAC), basée à Kiev, a accusé le nouveau procureur général, Ruslan Kravchenko, d’orchestrer un « assaut » contre les institutions de lutte contre la corruption. Elle a souligné la corrélation entre le calendrier du projet de loi et les enquêtes en cours impliquant des personnes du cercle rapproché de Zelensky.

Dans le cadre des ambitieuses réformes anti-corruption menées par l’Ukraine en vue de son adhésion à l’UE, le NABU, le SAPO et le Bureau de sécurité économique (BEB) ont été créés en tant qu’entités indépendantes, conformément aux normes européennes. Ces organismes ont mis au jour des systèmes de corruption présumés impliquant l’ancien vice-premier ministre Oleksii Chernyshov et son partenaire commercial Timur Mindich, ainsi qu’au sein du bureau présidentiel, qui seraient liés au chef de cabinet Andriy Yermak.

Les organismes internationaux s’expriment

La Commission européenne a exprimé son inquiétude face aux récents événements, les percevant comme une tentative directe de saper l’indépendance et le fonctionnement des institutions ukrainiennes de lutte contre la corruption. Marta Kos, commissaire européenne chargée de l’élargissement, a souligné l’importance d’organismes indépendants tels que le NABU et le SAPO pour le cheminement de l’Ukraine vers l’UE, en insistant sur le fait que l’État de droit restait un élément central des négociations d’adhésion.

Un porte-parole de la Commission a déclaré que le soutien financier de l’UE à l’Ukraine était subordonné à des progrès en matière de transparence, de réforme judiciaire et de gouvernance démocratique. Bruxelles s’est engagée à suivre de près l’évolution de la situation. Le ministère allemand des affaires étrangères a également averti Kiev que l’indépendance et la solidité des institutions ukrainiennes de lutte contre la corruption étaient cruciales pour les récents efforts de réforme. Il a souligné que l’Ukraine continuerait d’être évaluée en fonction de ses progrès dans ce domaine.

Le vote controversé de la Verkhovna Rada fait suite à des perquisitions douteuses visant le personnel de le NABU, menées par une opération conjointe du service de sécurité de l’Ukraine (SBU), du bureau d’enquête de l’État (SBI) et du bureau du procureur général, lundi dernier. Des inquiétudes ont été soulevées quant à la légalité de ces opérations, qui se seraient déroulées sans mandat judiciaire.

Avant que le président Zelensky ne signe le projet de loi, le groupe de défense des droits de l’homme Center for Civil Liberties (CCL) l’a exhorté à opposer son veto au projet, arguant qu’il constituait une menace directe pour l’État de droit et les droits de l’homme. Il a demandé aux institutions européennes de persuader les autorités ukrainiennes de révoquer le projet de loi n° 12414, en invoquant sa contradiction avec les principes fondateurs de l’Union européenne. (fc)

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