Par analphabétisme financier ou par un certain « je-m’en-foutisme », l’indépendant moyen en Flandre offre depuis des années des milliers d’euros au fisc. Par rapport à ce que nos entrepreneurs laissent ainsi filer, la très contestée taxe sur les plus-values est relativement peu de chose. En ce sens, cette nouvelle taxe constitue un signal d’alarme bienvenu, un appel à une prise de conscience financière accrue. Mieux encore : si le gouvernement veut vraiment instaurer une taxe sur les plus-values, il devrait l’accompagner d’une formation financière obligatoire pour les indépendants, et par extension pour tous les Belges. Cette réforme pourrait rapporter davantage à la classe moyenne et aux entrepreneurs qu’elle ne leur coûterait.
Une enquête récente menée auprès de plus de 500 entrepreneurs flamands vient de montrer que les indépendants donnent en moyenne 5 800 euros par an au fisc sans le savoir. Quelles en sont les raisons ? Le manque de temps, de connaissances et, parfois, la nonchalance. Moins de la moitié d’entre eux savent, par exemple, comment sortir leurs bénéfices de la société à des fins fiscales, et seuls 45 pour cent ont optimisé leurs bénéfices. À peine 41 pour cent ont pris des dispositions financières, fiscales et juridiques pour protéger leurs proches. Et c’est triste à dire : beaucoup restent sans voix lorsqu’on les interroge sur leur chiffre d’affaires, leurs coûts, leurs objectifs ou leurs bénéfices.
Non, l’entrepreneur flamand n’est évidemment pas stupide. Mais il est souvent tellement absorbé par son activité qu’il en oublie l’essentiel : gagner de l’argent. En outre, nos entrepreneurs flamands souffrent parfois d’un certain analphabétisme financier. Jusqu’à ce que l’on parle de « taxe sur les plus-values ». Là, on crie au scandale, alors que pendant des années ils ont laissé filer des milliers d’euros faute d’avoir activé les bons leviers – souvent même les plus simples – sur le plan financier.
En ce sens, l’impôt sur les plus-values peut obliger nos entrepreneurs à se préoccuper davantage de la gestion financière de leur activité professionnelle et de ses fruits. Les entrepreneurs devront encore mieux comprendre ce que vaut leur entreprise, comment ils travaillent de manière optimale d’un point de vue fiscal et comment ils structurent leur patrimoine. C’est loin d’être toujours le cas aujourd’hui. Le boulanger, le médecin ou le chef d’entreprise engagé de votre quartier restent souvent des professionnels passionnés, mais il leur manque trop souvent le réflexe de gérer leur argent de manière avisée.
En ce sens, cette réforme est une opportunité pour plus de maturité financière, à condition qu’elle soit accompagnée d’un encadrement adéquat et de règles du jeu claires. Le simple fait que seuls 5 pour cent des Belges investissent devrait déjà nous faire réfléchir. En effet, comment se fait-il qu’un groupe si restreint mette son argent au travail, alors que nous vivons à une époque où l’accès aux marchés est plus démocratique que jamais, notamment grâce à des produits comme les ETF ?
Mais… dans la manière dont le gouvernement s’y prend aujourd’hui, la taxe sur les plus-values risque de devenir davantage une barrière psychologique qu’un frein financier. Ceux qui investissent déjà ne s’arrêteront sans doute pas. Mais pour ceux qui ne le font pas encore, l’effet psychologique pourrait être tout autre : alors que nous sommes déjà faiblement formés sur le plan financier et que nous faisons souvent les mauvais choix par ignorance, cette mesure risque d’être encore plus dissuasive. Et c’est bien dommage.
Voilà la grande occasion manquée de notre gouvernement. Au lieu de simplement brandir le nouvel impôt sur la fortune, il aurait mieux fait de le coupler à une éducation financière obligatoire pour les indépendants, et par extension pour tous les Belges.
Attention, cette taxe supplémentaire touchera quand même beaucoup de monde. Car ceux qui investiront judicieusement en retireront un rendement moindre – même s’il ne s’agit que de quelques dixièmes de pour cent. Si l’on critique, à juste titre, les frais de gestion de 0,6 pour cent ou 1 pour cent par an, alors l’impact de la taxe sur les plus-values ne doit certainement pas être sous-estimé.
Mais au fond, qu’est-ce que cela change, si nos entrepreneurs de 2025 ne prennent déjà pas les bonnes décisions fiscales et financières, et laissent ainsi filer des milliers d’euros ? Si quelqu’un parvient à leur faire comprendre cela, la taxe sur les plus-values leur fera peut-être plus de bien que de mal. Car le temps du laisser-aller est bel et bien révolu.
Roberto Musardo, fondateur de House of Finance

