Principaux renseignements
- Huit pays européens ont déposé une plainte auprès des Nations Unies pour ingérence russe dans leurs communications par satellite.
- Les perturbations ont eu des conséquences importantes sur la sécurité, les communications et les activités économiques, et plus de 30 000 vols ont été interrompus dans les États baltes.
- La Russie a nié toute implication dans ces perturbations, malgré les preuves apportées par les enquêtes menées par les sociétés de satellites Eutelsat et SES.
Huit pays européens, dont les Pays-Bas, déposent officiellement une plainte auprès des Nations Unies concernant l’ingérence continue de la Russie dans les communications par satellite européennes. Cette plainte, étayée par des documents obtenus par Nieuwsuur, demande qu’il soit mis fin à ces actions perturbatrices.
La plainte, signée par l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, l’Ukraine, la Finlande, la France et les Pays-Bas, est adressée à l’Union internationale des télécommunications (UIT), la plus haute instance internationale chargée de superviser les communications par satellite, qui relève de la compétence des Nations Unies. Dix-sept autres États membres de l’UE et le Royaume-Uni soutiennent également cette plainte.
Engagement collectif
La Rijksinspectie Digitale Infrastructuur, une branche du ministère néerlandais des affaires économiques, a déclaré qu’en signant la plainte, les nations participantes démontrent leur engagement collectif à traiter ce problème. Patrick Bolder, expert en activités spatiales militaires au Centre d’études stratégiques de La Haye (HCSS), a exprimé son soutien à la position des Pays-Bas, soulignant l’importance de dénoncer les responsables et de quantifier les dommages infligés.
Au cours de l’année écoulée, plusieurs pays européens ont connu des perturbations sur des satellites exploités par deux grands fournisseurs européens: Eutelsat et SES. Ces satellites sont essentiels pour la radiodiffusion et la télévision, ainsi que pour la navigation aérienne.
Un incident particulièrement notable s’est produit au printemps dernier lorsque de la propagande de guerre russe est apparue de manière inattendue sur BabyTV aux Pays-Bas et dans d’autres pays européens. Au cours de la même période, des chaînes de télévision ukrainiennes ont diffusé des contenus de propagande similaires.
Perturbations provenant de Russie
Eutelsat, dont le siège est en France, et SES, dont le siège est en Suède et au Luxembourg, ont mené l’année dernière des enquêtes qui ont conclu que les perturbations provenaient de Russie. Ils visaient à perturber les émissions de télévision ukrainiennes transmises par les deux sociétés. On a considéré l’incident affectant la télévision néerlandaise comme un dommage collatéral.
Des documents révèlent que la Suède et le Luxembourg ont chargé une station de surveillance spatiale située à Leeheim, en Allemagne, de réexaminer les perturbations affectant les satellites de SES. Cet institut de recherche indépendant enquête sur les conflits entre nations concernant les interférences satellitaires. L’enquête a confirmé que les perturbations provenaient de la péninsule de Crimée occupée par la Russie et de l’enclave de Kaliningrad. La France demande maintenant une enquête sur les perturbations affectant ses satellites Eutelsat, qui ont conduit à la diffusion de propagande russe à la télévision néerlandaise.
La Russie nie toute implication
Dans des lettres précédentes adressées aux Nations Unies, la Russie a nié toute implication dans les perturbations. Malgré les invitations à engager un dialogue avec les nations touchées l’année dernière, ces tentatives ont été infructueuses. Cette semaine, cependant, la France et la Suède, les pays où les sociétés de satellites ont leur siège, ont entamé leurs premières discussions individuelles avec la délégation russe à l’ONU à Genève, ont confirmé des sources au Nieuwsuur. Pour autant que l’on sache, les Pays-Bas n’ont pas participé à ces discussions.
Au-delà des perturbations télévisuelles, le sabotage peut également interférer avec les signaux de navigation cruciaux pour le transport maritime et aérien. La Russie utilise ces interférences pour perturber les drones guidés par GPS impliqués dans son conflit avec l’Ukraine. Par conséquent, les avions et les navires civils se trouvant à proximité ont du mal à déterminer leur position. Ces perturbations affectent également les systèmes de navigation aérienne qui préviennent des risques de collision avec les montagnes.
Les discussions en cours mènent-elles à des changements?
Depuis septembre dernier, plus de 30 000 vols au-dessus des États baltes ont rencontré des perturbations, comme l’indiquent la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie dans les documents. Ils soulignent les « conséquences importantes » de ces perturbations sur la sécurité, les communications et les activités économiques.
Les compagnies aériennes néerlandaises ont également subi ces perturbations, selon les chiffres récents de l’Inspectie Leefomgeving en Transport (ILT). Le nombre de rapports a grimpé en flèche l’année dernière : Les pilotes néerlandais ont déposé 163 rapports en 2023, contre 1318 en 2024.
Reste à savoir si ces discussions en cours avec la Russie peuvent déboucher sur des changements. L’expert Bolder se montre peu optimiste: « Considérez le mode de fonctionnement de la Russie: même lorsque sa responsabilité est avérée, elle refuse de le reconnaître. La Russie n’adhère pas au droit international, mais plutôt à la loi du plus fort. »
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