Frank Vandenbroucke est assailli de questions sur la gestion des vaccins et se braque : « Je ne dirai plus rien »

Frank Vandenbroucke est assailli de questions sur la gestion des vaccins et se braque : « Je ne dirai plus rien »
Frank Vandenbroucke (Vooruit) – Isopix

Le vicepremier ministre de Vooruit a vécu une commission Santé sous haute tension, hier au Parlement. Il était question de la gestion des vaccins qui met aux prises deux entreprises, Medista et la multinationale française Movianto, qui a subtilisé le stockage et la distribution de vaccins Covid-19 dans un nouvel appel d’offres lancé en juin 2022. Une véritable film hollywoodien qui mêle 5,4 millions de factures impayées par le gouvernement et l’intervention de détectives privés israéliens.

  • « Non, non. Je ne dirai plus rien à ce sujet. Ni la semaine prochaine non plus. Vous pouvez me poser ces questions, mais je ne dirai plus rien. » En cours de séance, le ministre Vandenbroucke, connu pour être caractériel, a renvoyé les députés à l’audit interne qui doit, selon lui, faire toute la lumière sur ce dossier. Il n’a plus voulu répondre à aucune question par la suite.
  • Dans cette affaire, Medista accuse une fonctionnaire du SPF Santé publique de malversations dans l’attribution d’un marché public. Une histoire assez rocambolesque : l’entreprise située à Zaventem dispose de vidéos récoltées en caméra cachée par le bureau de détectives israéliens Black Cube. Une société de renseignements privée, connue pour abriter d’anciens membres du Mossad. Medista dit tenir « des preuves » qui montrent que la fonctionnaire se serait rendu coupable « de prise de contact clandestine pour discuter en détail du nouveau marché public » avec Movianto.
  • Interrogé, le ministre Vandenbroucke a d’abord livré ses explications calmement : il a décrit Medista comme une entreprise « avide d’argent » qui voulait « récolter le plus d’argent possible, par tous les moyens ». L’entreprise qui a perdu le contrat de logistique des vaccins dans un nouvel appel d’offres, en 2022, est en effet allée très loin : la fonctionnaire incriminée a par exemple reçu une lettre de Medista le 4 octobre dernier à son adresse personnelle, relate Het Nieuwsblad. Un courrier lui intimant « de démissionner immédiatement » sous la menace d’autres « initiatives judiciaires ».
  • Le PDG de Movianto, le Français Thomas Creuzberger, a lui-même été menacé. Vandenbroucke a expliqué aux députés que le chef d’entreprise a été « approché de manière très agressive par Medista » qui « voulait une grosse somme d’argent ». Le ministre a lu devant les députés un courrier du patron de Movianto qui dénonçait ces faits, ce qui a plutôt surpris l’assemblée.
  • Enfin, le ministre est revenu sur les raisons du changement d’attribution du marché public. “Movianto était tout simplement beaucoup moins cher que Medista. 10 millions d’euros contre 15 millions”, avance le ministre de la Santé, qui continue de nier toutes irrégularités dans la procédure.
  • Quant aux factures impayées, évaluées à 5,3 millions d’euros, le ministre dit « qu’elles n’étaient pas justifiées. Et qu’il était impossible de contrôler ce qui était exactement facturé. » Frank Vandenbroucke a ensuite renvoyé les députés vers l’audit interne qui devra faire la lumière sur ce différend. Un audit qui, rappelons-le, avait par le passé été refusé à au moins deux reprises par le ministre, car « c’était trop compliqué ».
  • Le moins que l’on puisse écrire, c’est que les explications de Vandenbroucke n’ont pas convaincu les députés, y compris au sein de la majorité. Ainsi, Nawal Farih du cd&v a voulu en savoir plus « sur un accord de prix écrit à l’avance », ou sur le fait que « Medista a eu plus de 40 inspections du gouvernement fédéral ces deux dernières années ». Plus aucune réponse n’a émané de la bouche de Vandenbroucke.
  • Du côté de l’opposition, on ne pouvait pas non plus se satisfaire des explications du ministre. La députée N-VA Kathleen Depoorter a reproché au ministre de retenir des informations. Elle a en outre accusé le ministre d’être « le porte-parole de Movianto ». Pour la députée, un audit interne n’a « aucune crédibilité » au vu des circonstances. « Vous devez porter le dossier au Parquet », estime Kathleen Depoorter.
  • Même son de cloche de la part de la députée des Engagés Catherine Fonck qui pense que Vandenbroucke « n’est plus objectif dans cette affaire. » Elle aussi demande à ce que l’on renvoie l’affaire devant le Parquet : « Une enquête par l’Audit Interne Fédéral a peu de crédibilité dans ces circonstances. Surtout parce que le cabinet de conseil Deloitte et la Smals sont également mentionnés comme parties impliquées. Allez-vous porter l’affaire devant le Parquet ? Votre rôle n’est pas de jouer aux arbitres dans cette saga »
  • Le ministre est resté muet. L’audit interne se poursuivra. Et dans l’attente de ses résultats, la fonctionnaire sera temporairement retirée du dossier. Cette dernière a d’ailleurs porté plainte contre Medista auprès de la police. La multinationale française a fait de même.
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