Le mystère du taux d’intérêt américain : qu’est-ce qui se passe avec le taux d’intérêt le plus important au monde ?

Le mystère du taux d’intérêt américain : qu’est-ce qui se passe avec le taux d’intérêt le plus important au monde ?
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Les taux d’intérêt américains à 10 ans ont fortement augmenté ces derniers jours, avant de redescendre en flèche. Cette nervosité sur les marchés obligataires se traduit également par des mouvements de repli sur les marchés boursiers.

Pourquoi est-ce important ?

Les obligations d'État américaines sont souvent considérées comme "l'investissement le plus sûr au monde" et le taux américain à 10 ans comme "le plus important" au monde. Lorsque les taux d'intérêt s'envolent comme ils l'ont fait ces derniers jours, les marchés boursiers s'emballent.

Pour comprendre : les obligations sont plus difficiles à interpréter que les actions, car le taux du marché est un indicateur de leur valeur actuelle. Mais ce taux a une relation inverse avec la valeur : plus le taux de marché est élevé, moins l’obligation vaut. Il faut donc regarder les choses sous un autre angle.

Ce qui était attendu : les troubles géopolitiques provoqués par le conflit entre Israël et le Hamas devraient normalement entraîner une ruée vers les titres d’État américains, ce qui se traduit par une hausse de la demande et une baisse des taux d’intérêt à long terme. La baisse des attentes économiques devrait également entraîner une chute des rendements à 10 ans, selon la théorie en tout cas.

Ce qu’il s’est passé : à la fin de la semaine dernière et au début de celle-ci, c’est le contraire qui s’est produit. Les taux d’intérêt américains n’ont pas baissé, mais augmenté. Ils ont même dépassé la limite psychologique de 5 %, soit le niveau le plus élevé en 16 ans. Il n’y a pas eu de ruée sur les obligations ni de fuite vers la sécurité, bien au contraire : il s’agissait plutôt d’une vague de vente.

Jeu de l’offre et de la demande

Quelques explications possibles :

  • Plusieurs observateurs des marchés boursiers pointent du doigt l’offre abondante d’obligations d’État. Les banques centrales ne les achètent plus, mais les vendent dans le cadre de leur politique monétaire restrictive.
  • De plus, on craint que le gouvernement américain n’émette massivement de nouvelles obligations dans les années à venir pour couvrir les déficits budgétaires. Cela ne fera qu’accroître encore davantage l’offre.
  • Mais la demande joue également un rôle. Une autre explication possible est que les investisseurs obligataires ne veulent pas engager leur argent pour 10 ans, car les obligations de plus courte durée offrent également des taux d’intérêt intéressants.
  • Tout cela est lié aux derniers signaux de la Réserve fédérale, qui indique que ses taux directeurs pourraient rester élevés pendant longtemps, voire augmenter.
  • Les craintes d’une inflation persistante jouent également un rôle : les investisseurs ne placeront leur argent pendant 10 ans que si un taux d’intérêt suffisamment élevé y est associé.
  • Et puis il y a la spéculation pure des investisseurs qui ont pris une position courte sur le papier à 10 ans. Ce qui signifie qu’ils parient sur de nouvelles baisses de valeur et donc sur de nouvelles hausses des taux d’intérêt. Les fortes variations de prix constituent un environnement idéal pour les fonds spéculatifs et autres investisseurs spéculatifs, qui peuvent ainsi réaliser d’importants bénéfices en peu de temps, du moins s’ils évaluent correctement le mouvement.

Impact sur le marché boursier et l’économie

Des implications profondes : Si les taux d’intérêt américains à long terme continuent à atteindre des sommets, cela pourrait avoir des conséquences économiques majeures.

  • Les crédits américains, tels que les prêts hypothécaires ou les prêts automobiles, deviennent plus chers, ce qui pourrait ralentir l’économie américaine.
  • Pour les entreprises, les coûts d’intérêt augmentent.
  • Les rendements obligataires élevés augmentent aussi indirectement les rendements des actions. Certains investisseurs pourraient abandonner les actions pour opter pour la sécurité des obligations.
  • Il y a aussi l’effet sur l’évaluation des actions des grandes entreprises technologiques et d’autres entreprises dont les flux de trésorerie futurs sont importants. Ceux-ci sont désormais actualisés avec des taux d’intérêt plus élevés pour estimer leur valeur aujourd’hui, et sont donc moins élevés.

Dernier élément : lundi, les rendements américains à 10 ans ont à nouveau dépassé les 5 %, avant de redescendre à 4,85 %. Certains font le lien avec un tweet de l’influent investisseur de Wall Street Bill Ackman, qui a indiqué qu’il cesserait pour l’instant de spéculer sur les titres du gouvernement américain.

(JM)

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