Des météorites qui tombent dans nos océans, ce serait presque banal. Mais dans le cas de l’objet nommé CNEOS 2014-01-08, il y a un twist : il pourrait bien s’agir d’un croiseur interstellaire, venu d’au-delà de notre propre système planétaire. Analyser les quelques fragments qu’on en a retrouvés est donc devenu un enjeu scientifique majeur, et déjà, les passions se déchainent.
Un croiseur interstellaire, c’est quoi ? Ce sont des objets spatiaux qui, selon ce qu’on a pu analyser de leur trajectoire (voire de leur composition), ne sont pas nés dans la ceinture d’astéroïdes située entre les orbites de Mars et de Jupiter. Il ne s’agit même pas d’objets isolés dans notre système solaire, ils viennent de beaucoup plus loin, et ils sont soudainement sortis du vide interstellaire pour apparaître sur nos radars.
- Le plus connu d’entre eux reste ‘Oumuamua, ou « premier messager d’une contrée lointaine » en hawaïen, découvert le 19 octobre 2017. Ce fameux cigare cosmique déchaine toutes les passions, y compris les plus farfelues, et on a envisagé d’aller forer sur place pour en savoir plus.
- Depuis, ‘Oumuamua a été rejoint en 2019 par la comète 2I/Borissov. Et voici le (probable) troisième sur le podium : CNEOS 2014-01-08, repéré par les satellites du gouvernement américain avant de se désintégrer au-dessus du Pacifique en 2014. On l’appelle aussi plus simplement IM1, pour « Interstellar Missile 1 », ce qui relève d’un sens certain du spectaculaire de la part des astronomes.
L’Étoile mystérieuse version 2023
Un tel objet venu de si loin écrasé sur notre propre planète, ce serait absolument phénoménal de le récupérer. Et c’est ce qu’a tenté Avi Loeb, astronome renommé de l’université de Harvard, qui a fondé le projet Galileo en 2021 pour rechercher des signatures de technologies d’origine extraterrestre. Pas si simple : IM1 ne ferait pas plus d’une cinquantaine de centimètres de diamètre au moment de l’impact, et elle n’est sûrement pas restée intacte.
- L’expédition Galileo a pourtant pu repêcher une grosse poignée de particules : des centaines de minuscules sphérules de 0,05 à 1,3 millimètre de diamètre attrapées à l’électro-aimant à 2.000 m de profondeur.
- Et c’est là que ça devient intéressant : selon une analyse préliminaire de l’université de Harvard, une partie au moins des échantillons ne reflète pas le type de chimie que l’on peut attendre de notre propre système solaire.
- Ces sphérules se sont vraisemblablement formées à la surface de l’astéroïde durant sa traversée de notre atmosphère, comme des « perles » d’isotopes de fer vitrifiés par la chaleur. Mais elles sont aussi fortement enrichies en béryllium (Be), en lanthane (La) et en uranium (U), ce qui ne semble pas correspondre au type de matériaux que l’on trouve dans notre voisinage planétaire.
Le premier missile interstellaire
Tout cela reste bien sûr à confirmer, mais il semble raisonnablement probable de voir en CNEOS 2014-01-08 un croiseur interstellaire qui nous a percutés par surprise. Certains, bien sûr, ont l’imagination qui chauffe encore plus loin.
- Les conclusions de l’expédition Galileo, qui doivent encore être revues par des pairs, suggèrent qu’une telle présence d’uranium suffit à ne pas exclure qu’il s’agissait là d’un artefact, d’un vaisseau à propulsion nucléaire plutôt qu’un simple caillou. On se contentera de mentionner cette interprétation qui provient, rappelons-le, d’une organisation qui recherche activement des technologies extraterrestres.
- Cerise sur les futures polémiques : le gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée accuse l’expédition d’avoir été menée illégalement dans ses eaux nationales, les pêcheurs de caillou n’ayant pas le bon type de visa. Affaire à suivre.